Les prix agricoles ont un faible impact sur les prix alimentaires
Selon un rapport sur la "formation des prix alimentaires"remis à Michel Barnier, la baisse des prix se retrouve dans les marges des distributeurs et dans davantage de concurrence entre les différents distributeurs. Le Ministre de l'agriculture croit en la pertinence de l'Observatoire des prix et des marges pour suivre l'évolution des prix à chaque étape des relations commerciales.
Mardi 16 décembre, Eric Besson, secrétaire d’Etat auprès du Premier ministre chargé de la prospective et de l’évaluation des politiques publiques, a remis à Michel Barnier son rapport sur la « formation des prix alimentaires ». Ce sont les hausses de prix dans l’alimentation en juillet 2007 qui ont justifié cette étude. Le prix du lait de vache qui baissait de manière continue depuis cinq ans a soudain progressé à partir de l’été pour ressortir en hausse de 37 % sur un an en mars 2008. Idem pour le blé dur qui a vu son prix multiplié par 2,6 en l’espace de huit mois. Quant aux fruits et légumes frais, ils ont ignoré cet épisode inflationniste. Pour le cochon, le prix à la production n’a pas répercuté la hausse de 40 % du coût de la nourriture animale. Alors le jambon et le rôti ont vu leur prix continuer à croître ! Le rapport apporte des réponses sur cette hausse des prix. Et selon l’une des premières conclusions de ce document, les prix agricoles jouent un rôle très variable dans la détermination des prix alimentaires. Le ministre de l’Agriculture estime pour sa part que les « prix agricoles ont un faible impact sur les produits alimentaires ».
Les produits périssables transmettent intégralement les variations de prix. L’exemple de la tomate est intéressant. Une hausse de 10 centimes du prix à la production se retrouve intégralement dans le prix de détail une semaine plus tard. Lorsqu’une baisse de prix de 10 centimes se produit, seuls neufs centimes sont répercutés au consommateur.
Marges
Par contre, la logique est différente lorsqu’il s’agit de produits stockables. Statistiquement, blé dur et prix des pâtes alimentaires n’ont aucun rapport : le prix producteur et le prix à la consommation sont quasiment indépendant. En « régime normal » - lorsque le prix du blé dur ne varie pas de plus de 20 à 25 % - le prix des pâtes dépend peu de la variation du prix du blé dur. Mais en période inflationniste, la transmission des chocs de prix est forte. Le prix du blé dur a augmenté de 57 % entre mai et août 2007, puis encore de 58 % d’août à novembre ce qui s’est traduit par une hausse du coût de la matière première de 24 centimes par paquet. La viande de porc reste l’exemple le plus frappant du faible impact des produits agricoles sur les prix au détail. Une baisse de prix au producteur peut se traduire par une hausse du prix de détail. Dans ce cas-là, les prix se forment aux étapes de la transformation et de la distribution et non pas à celle de la production.
Au vu de ces résultats, ce sont dans les marges de la grande distribution qu’il faut aller chercher des réponses. Selon le rapport, c’est en bout de chaîne, en contact avec le consommateur que les marges sont les plus fortes, en tournant autour de 40 %. Contre toute attente, ce sont les supermarchés et les hypers qui se montrent les moins gourmands : la marge brute moyenne est de 37 % contre 43 % dans les marchés et les magasins spécialisés. La solution pourrait alors venir des hard discount où les prix sont moins chers. Parce que marge faible ? Eric Besson temporise : « développer le hard discount pour baisser les prix n’est qu’une solution parmi d’autres, elle n’est pas suffisante en soi ». Selon lui, il faut développer la concurrence entre les différents types de distributeurs sur l’exemple hollandais. Le ministre de l’Agriculture, croit en la pertinence de l’Observatoire des prix et des marges pour suivre l’évolution des prix à chaque étape des relations commerciales. Et pour le renforcer, il a même demandé la mise en place d’un comité de pilotage pour les produits agricoles et agroalimentaires dans le cadre de cet observatoire.
Davantage d'attention portée à l'alimentation
Dans un contexte morose, les Français regardent à deux fois les prix, notamment les prix alimentaires.
Selon le baromètre des perceptions alimentaires et de la politique alimentaire de septembre 2008, l’attention portée aux prix dans le secteur alimentaire est à un niveau très élevé et a fortement progressé en un an. Elle se traduit pas une baisse des dépenses alimentaires en volume sur un an.
La part de ceux qui fréquentent le plus souvent le hard discount progresse de six points (15,2 % en 2008 contre 9,2 % en 2006). Par contre, les supermarchés et les hypermarchés sont moins fréquentés. Dans ce contexte, le critère d’achat « le produit porte sur un label de qualité » perd dix points entre 2006 et 2008. Les Français sont de moins en moins nombreux à être prêts à payer plus cher pour des critères de qualité (signes officiels),
de garantie et de respect de l’environnement et du bien-être animal, et des produits issus du commerce équitable. Pour les Français, le prix, la proximité géographique et la qualité des produits vendus sont les trois critères primordiaux du choix d’un lieu d’approvisionnement. En un an, le critère prix progresse de sept points et le critère qualité baisse de six points sur le premier critère de choix. La qualité a baissé
de 12 points entre 2006 et 2008. Toutefois, la prépondérance
de ces critères varie selon les critères sociodémographiques. Dans un contexte mondial de crise alimentaire, la demande sociale vis-à-vis des pouvoirs publics est en premier lieu dirigée vers une politique
de maintien des prix pour
permettre à tous de se nourrir.
Par rapport à 2007, la dimension santé perd de son importance. Dans un contexte morose, les Français ont davantage confiance dans les petits commerçants et l’image des agriculteurs progresse fortement.