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Les cinq défis d’Annie Genevard

La nouvelle ministre de l'Agriculture, Annie Genevard découvre la plupart des dossiers de son ministère. D’ici juillet 2025, et la possible réouverte d’une dissolution, cinq défis l’attendent; avec une enveloppe incertaine...

© D.R.

Venue de l’Éducation nationale et de formation littéraire, la nouvelle ministre n’est, a priori, pas une technicienne des dossiers agricoles. Elle bénéficie toutefois d’un solide ancrage politique dans le Doubs, département très laitier, où elle est née.


Les crises d’abord


D’ici juillet 2025, et la possibilité réouverte d’une dissolution, cinq défis attendent la nouvelle minis- tre : la gestion des crises, l’adoption de la loi d’orientation agricole (LOA), la mise à jour de la déclinaison nationale de la Pac (PSN), l’élaboration de la Snanc (stratégie nutrition climat) et l’Egalim européen.
Le premier chantier, sans surprise, sera d’éteindre les crises qui ont pris de l’ampleur cet été (MHE, FCO, mauvaise moisson, crise viticole…) notamment à la faveur d’un gouvernement démissionnaire aux marges de manœuvre limitées. « Je vais faire en sorte que, dans les semaines qui viennent, de premiers résultats se voient dans les cours de ferme », a promis Annie Genevard à l’occasion de sa passation. Le 22 septembre, le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, lui a donné « 15 jours » pour annoncer des mesures sur des prêts bonifiés aux céréaliers, viticulteurs et éleveurs en crise et sur la vaccination des troupeaux face aux épizooties. La première urgence « concerne le PGE (prêt garanti par l’État, NDLR) agricole, c’est-à-dire un prêt bonifié par l’État et par les banques qui permet aux agriculteurs de financer leur cycle d’exploitation, qu’ils soient céréaliers, viticulteurs ou éleveurs. Ça, c’est la priorité », a déclaré Arnaud Rousseau à l’AFP.  La deuxième urgence, pour M. Rousseau, c’est d’« obtenir des vaccins rapidement pour que les éleveurs puissent vacciner le maximum possible leurs troupeaux et faire en sorte que pour ceux qui ont perdu des animaux, on commence la campagne d’indemnisation », a-t-il ajouté. « On donne à la ministre 15 jours pour être capable de nous dire ce qu’elle entend faire sur les mesures d’urgence », a-t-il déclaré. Mais les moyens dont elle disposera restent incertains. Le Gouvernement, qui doit présenter début octobre son projet de loi de finances (PLF) pour 2025, a d’ores et déjà annoncé des coupes budgétaires, sans préciser quels ministères seraient concernés. Lors de son audition face aux députés de la Coméco, le président de la FNSEA a évoqué la piste de l’enseignement agricole, principal poste de dépenses du ministère, si celui-ci venait à être visé. Les dossiers fiscaux (GNR, TATFNB, taxe irrigation) promettent d’être particulièrement tendus.


Faire adopter la LOA


« J’espère que nous mènerons à son terme » la loi d’orientation agricole (LOA), a promis Annie Genevard, dans un discours de passation inscrit globalement dans la continuité de son prédécesseur. C’est le deuxième chantier que lui laisse Marc Fesneau. Un épais dossier qu’il n’aura pas réussi à faire aboutir, bien que les concertations aient débuté en décembre 2022. Le texte avait d’abord tardé à être présenté à la rentrée 2023, et son examen s’était interrompu en juin avec la dissolution de l’Assemblée nationale. Annie Genevard n’a pas détaillé sa méthode. Pour en finir avec ce dossier, deux parlementaires LR ont travaillé cet été, et abouti à des stratégies différentes. Le député Julien Dive propose de réécrire un texte de loi, incluant notamment de nouveaux sujets comme la séparation de la vente et du conseil des pesticides, ou les relations commerciales. Il estime qu’il serait risqué d’amender la LOA telle qu’adoptée en première lecture par l’Assemblée, de peur d’être censurés pour cavalier législatif. De son côté, le sénateur Laurent Duplomb propose de reprendre la LOA, et de faire adopter au préalable une proposition de loi dédiée aux « entraves », qu’il prévoit d’écrire d’ici octobre-novembre. Au menu : réautorisation de l’acétamipride, suppression de la séparation de la vente et du conseil sur les pesticides, expérimentation de l’épandage par drone, réforme des prérogatives de l’Anses… C’est à cette condition qu’il accepterait d’adopter la LOA telle que négociée à l’Assemblée entre la droite et l’ex-majorité présidentielle. Julien Dive et Laurent Duplomb s’opposent également sur le sort d’Egalim. À l’instar de la FNSEA, le député souhaite l’inscrire dans une grande loi de rentrée. À l’inverse, Laurent Duplomb veut prendre le temps de travailler à nouveau le dossier. C’est aussi l’avis de l’ancien ministre de l’Agriculture Stéphane Travert (Renaissance). L’échéance d’une application durant les prochaines négociations commerciales semble, en tous les cas, inatteignable. Dans son discours, Annie Genevard n’a pas évoqué directement le dossier.


De la Snanc à la PAC


S’il est un dossier où Annie Genevard aura l’occasion de marquer son empreinte, c’est la déclinaison française de la PAC (PSN), qui peut être amendée chaque année et plus largement en 2025. La réglementation européenne prévoit que la modification du transfert de crédits entre le 1er et le 2d pilier n’est possible qu’une seule fois durant la programmation, en 2025. Une question devrait revenir rapidement sur son bureau : les éco-régimes, dont l’Inrae avait critiqué l’absence d’ambition environnementale. Dès l’automne 2023, le CGAAER avait évoqué l’idée de « rehausser le niveau d’ambition de l’éco-régime, notamment sur le volet adaptation et sur la gestion durable des sols ». En contrepartie, les auteurs proposaient « de le doter de moyens renforcés ».

Ils fixent comme échéance l’année 2025, qui « serait dès lors un point de rendez-vous à ne pas manquer ». On peut en déduire que le renflouement des éco-régimes proviendrait du second pilier de la PAC (MAEC, ICHN, bio, DJA…).
La Fnab (agriculteurs bio) est très attentive au sujet ; elle a demandé à la ministre la tenue rapide d’un Conseil supérieur d’orientation sur le prochain PSN.
Autre sujet épineux : la Snanc (Stratégie alimentation nutrition et climat) que la nouvelle ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, embarque avec elle au ministère de la Transition écologique. La consultation n’a cessé de traîner ces derniers mois. Elle inclut des arbitrages explosifs sur le futur de la consommation de produits carnés et de l’élevage, mais aussi du gazole non routier (GNR). 

À Bruxelles, où une nouvelle Commission s’installe, les affaires sont encore calmes. Annie Genevard pourrait avoir à traiter des propositions sur le renforcement de la position des agriculteurs dans la chaîne alimentaire («Egalim européen»). Le texte de la Commission est attendu entre fin 2024 et printemps 2025.
La négociation de la prochaine Pac est encore loin. Le nouveau commissaire à l’Agriculture devrait présenter sa « vision » pour l’avenir du secteur vers le mois de mars. La première proposition de nouvelle Pac de la Commission est attendue pour le mois de juin. C’est aussi à cette date qu’expirent les mesures de libéralisation des échanges avec l’Ukraine. Un mois plus tard, la possibilité d’une nouvelle dissolution sera rouverte.

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