Echanges
Le photovoltaïque à la croisée des crises et des débats
Alors que la pose de panneaux solaires sur les toits des bâtiments agricoles est désormais acquise, le développement de l'agrivoltaïque reste davantage controversé.
Alors que la pose de panneaux solaires sur les toits des bâtiments agricoles est désormais acquise, le développement de l'agrivoltaïque reste davantage controversé.
Dans la seconde partie de l’assemblée générale de la FNSEA63, les adhérents ont échangé sur les solutions énergétiques qui s’offrent aujourd’hui aux agriculteurs pour répondre à un triple enjeu : maitriser leurs coûts, répondre au développement de la transition énergétique tout en maintenant une agriculture productive souveraine…et tout cela dans un contexte de crises multiples !
Photovoltaïque et autoconsommation
Les débats ont principalement porté sur le photovoltaïque sur toitures ainsi que l’agrivoltaïque : deux systèmes, deux approches distinctes avec des avis divergents. Si l’agrivoltaïque (système étagé qui associe une production d'électricité photovoltaïque et une production agricole au-dessous de cette même surface) fait débat, en revanche la pose de panneaux sur toitures semble désormais acquise. Pour Laure Lefevre, Chargée d’affaire transition énergétique au Crédit Agricole Centre France, « l’installation de panneaux sur les toitures reste pertinente et se conjugue aujourd’hui avec une demande croissante d’un système en autoconsommation ». Au regard de la composition du parc énergétique installé aujourd’hui en France (nucléaire : 42,1% ; hydrolique17,1% ; thermique : 15% ; éolien : 13,7% ; solaire : 9,7% et bioénergies 1,8%) le potentiel solaire demeure effectivement important et la pose de panneaux sur toiture apparaît alors comme une opportunité pour les exploitants agricoles : complément de revenu, valorisation du bâtiment, maitrise de ses coûts énergétiques, production d’énergie verte, meilleure image, exploitations modernisées…
Mais la tendance est surtout à «l’autoconsommation qui permet une réelle maitrise de ses coûts d’énergie » insiste Laure Lefèvre. Et de citer à titre d’exemple : « avec une puissance installée de 100 Kwc soit 520m2, un ensoleillement de 1 100 heures, un coût total d’installation de 90 000€ (amortissement sur 15 ans) soit 7 300€/an et une charge annuelle de 2 500€, le coût de revient du Kwh autoproduit s’élève à 8,9 ct€, protégé de l’inflation. » De quoi susciter l’intérêt de plus en plus d’agriculteurs qui prennent aujourd’hui conseil auprès du Crédit Agricole Centre France.
Agrivoltaïsme, pourquoi pas ?
Autre son de cloche sur l’agrivoltaïque. Ce système qui associe production agricole et production d’énergie soulève encore quelques questions voire quelques craintes de la part des agriculteurs, notamment du syndicat Jeunes Agriculteurs qui y voit davantage de menaces (pertes de surfaces productives, détournement de foncier etc…) que d’opportunités. Pourtant « toutes les solutions destinées à diversifier les ressources énergétiques et à en maitriser les coûts doivent être étudiées. La profession agricole doit être autour de la table pour construire, verrouiller et encadrer les projets. Si nous ne sommes pas à la manœuvre on se fera doubler ! » souligne Michel Joux, président de la FRSEA Auvergne Rhône-Alpes.
Mais l’engouement pour l’agrivoltaïque n’est pas totalement au rendez-vous, peu de projets sortent de terre. La Fédération nationale ovine travaille depuis plus de cinq ans sur le sujet avec différents développeurs. Des projets sont conduits avec des éleveurs ovins en régions PACA et Grande Aquitaine. « L’objectif est de faire cohabiter la production agricole- via de la ressource fourragère pérenne- et la production d’énergie » explique Michèle Boudoin. Pour ce faire, la présidente de la FNO assure que « la production d’énergie et la production agricole doivent rester dans le giron des exploitants agricoles ». Un argument repris par Richard Randanne, vice-président de la FNSEA 63 qui insiste sur « la nécessité d’encadrer cette opportunité plutôt que de la laisser entre les mains d’opérateurs qui ne répondent pas à nos attentes et ne connaissent pas les enjeux de notre profession. » L’acceptation de l’agrivoltaïque dépendra en fait du consensus territorial (acteurs économiques et élus) qui se construira autour de chaque projet.
Pour le président de la FRSEA AuRA : «les projets agrivoltaïques doivent se poursuivre mais mettre des animaux sous des panneaux ne doit pas être un alibi !»