La patience des agriculteurs creusois atteint ses limites
Ce lundi 2 décembre, près d'une centaine d'exploitants creusois s’est rassemblée à Guéret pour maintenir la pression.
Ce lundi 2 décembre, près d'une centaine d'exploitants creusois s’est rassemblée à Guéret pour maintenir la pression.
Ce lundi 2 décembre, près d’une centaine d’exploitants agricoles creusois a défilé à Guéret dans une action de protestation suite à l’appel à mobilisation de la FDSEA de la Creuse et JA23. L’objectif était clair : faire entendre leurs revendications face à l’inertie des pouvoirs publics et aux difficultés quotidiennes. Cette manifestation témoigne d’une tension de plus en plus palpable des agriculteurs, impatients de voir les choses changées.
La patience a ses limites
« Nous ne sommes pas là pour semer le chaos et affamer la France, nous sommes là pour construire l'avenir et assurer notre souveraineté alimentaire, nous sommes des gens civilisés », a déclaré Christian Arvis, président de la FDSEA de la Creuse, en réponse à la présence imposante des forces de l’ordre déployées pour encadrer la manifestation. Ce sont en effet plusieurs dizaines de CRS qui ont été mobilisés pour surveiller les manifestations, au regard des précédentes actions revendicatives survenues dans le département. La préfète de la Creuse, Anne Frackowiak-Jacobs, a justifié ce déploiement par les dégradations « innommables » survenues le 19 novembre dernier à l’OFB et à la MSA. Ces incidents, selon elle, sont « remontés au niveau national », entraînant ainsi une réponse renforcée des autorités.
Cependant, si la mobilisation s’est faite sous haute surveillance, la tension n’a pas dégénéré. Les responsables de la FDSEA et des JA ont rappelé leur engagement à privilégier la négociation et le dialogue. Florian Derboule, président de JA23, a insisté : « Nous savons que ce n'est pas en cassant tout que les dossiers avancent. Tout ce qui a été obtenu jusqu'à présent, c’est par la discussion et la négociation. »
Des revendications sans réponses
Devant la préfecture, les agriculteurs ont mis en lumière la lenteur des réponses administratives et des dossiers qui stagnent depuis des mois, voire des années. Le changement de gouvernement, en particulier, a ralenti certains projets et geler d’autres. Le dossier du GNR, par exemple, est celui qui a connu les avancées les plus notables, avec l’annulation de l’augmentation de la taxe et la possibilité de remise en pied de facture sur présentation d’une attestation. Mais pour d’autres enjeux essentiels, la situation demeure préoccupante.
Le manque de réponses sur la gestion des zones humides, les contrôles administratifs abusifs, et la réglementation des pesticides a particulièrement mobilisé les manifestants. L’OFB, accusé de distribuer des contraventions « à tout-va » et de manquer de diplomatie, a été dans le collimateur des agriculteurs. Plusieurs exploitants ont d’ailleurs eu l’opportunité de s’adresser directement à la préfète pour lui exposer leur situation, notamment la difficulté à comprendre des normes environnementales parfois trop floues et difficiles à appliquer sur le terrain.
Face à cette fronde, la préfète a assuré qu’elle travaillait actuellement sur un projet de contrôle unique, visant à simplifier les démarches administratives. Elle a également rappelé les dernières annonces de la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, notamment la mise en place de caméras piéton pour les agents de l’OFB, afin de rendre les contrôles plus transparents et moins menaçants pour les agriculteurs.
Autre avancée notable : le versement d’acomptes d’aides PAC, même en cas de contrôle, réclamée depuis longtemps par l’ensemble du réseau FNSEA/JA.
Le poids de la paperasse
Après une longue discussion avec la préfète, les manifestants ont décidé d’illustrer de manière symbolique le poids administratif qui écrase les exploitations agricoles en se rendant devant la cité administrative. Ils ont ainsi déversé des centaines de feuilles et de dossiers administratifs dans une pailleuse. Les documents, représentant le fardeau bureaucratique, ont été facilement envoyés au-delà des grilles pour s’échouer dans la cour de la DDT et des Impôts.
Cette action visait à dénoncer le caractère excessivement complexe et accablant des démarches administratives auxquelles les agriculteurs doivent faire face. Entre les multiples demandes de déclarations, les contrôles incessants, et les ajustements de normes, le travail sur le terrain est mis à mal par un flot ininterrompu de paperasse. « Ce n’est plus possible de continuer à vivre dans cette jungle administrative », confiait un agriculteur au milieu des papiers qui jonchaient le sol.
Une action symbolique de solidarité
À la tombée de la nuit, FDSEA et JA ont délaissé les grilles de la cité administrative pour se rendre sur un rond-point de Guéret, où ils ont réalisé une plantation d’arbustes, armés de bêches et de pioches. Un geste symbolique fort, qui revendiquait haut et fort un message simple : « Mangez local ». L’objectif est de rappeler l’importance de soutenir l’agriculture locale, en opposition à un système qui semble parfois négliger le rôle crucial des agriculteurs dans le développement durable et l’approvisionnement alimentaire de proximité.
La plantation d’arbustes, loin d’être une simple action décorative, portait également un message de résilience. Elle représentait l’espoir de voir une agriculture durable et respectueuse de l’environnement se développer, mais aussi l’envie de bâtir un futur plus juste pour les agriculteurs creusois.
Un message sans équivoque
À l’issue de cette manifestation, la FDSEA et les JA23 ont une fois de plus exprimé leur ras-le-bol face à la lourdeur administrative et à la lenteur des réformes promises. Si l’action est restée pacifique et constructive, elle a aussi envoyé un message clair aux autorités : les agriculteurs ont atteint leurs limites.
FDSEA et JA23 réclament désormais des mesures concrètes et rapides pour résoudre les problématiques qui pèsent sur les exploitations. La patience, en dépit des efforts pour rester civilisés et constructifs, a des frontières. Et celles-ci semblent avoir été atteintes. À défaut de réformes immédiates, les agriculteurs pourraient bien renouveler ce genre d’action dans les semaines à venir, à moins que le dialogue ne mène enfin à des solutions satisfaisantes pour tous.
Le premier rendez-vous de travail, obtenu par la FDSEA et JA avec Madame la Préfète et les services de l’État dans les prochains jours pour mettre en place le contrôle unique dans le département est une première avancée.
La FDSEA et JA, toujours dans la négociation, viennent également d'obtenir une enveloppe supplémentaire pour la prise en charge des cotisations sociales pour les éleveurs reconnus foyers, impactés par les maladies vectorielles actuelles.