Elevage
La France va-t-elle vraiment sacrifier nos vaches et nos prairies pour mieux importer ?
L'ensemble du monde de l'élevage déplore les récentes positions du ministre de l’Économie et de la Cour des Comptes. Un coup de com’ qui cacherait une ambition beaucoup plus pernicieuse : asphyxier l’élevage français pour laisser libre champ à l’import.
L'ensemble du monde de l'élevage déplore les récentes positions du ministre de l’Économie et de la Cour des Comptes. Un coup de com’ qui cacherait une ambition beaucoup plus pernicieuse : asphyxier l’élevage français pour laisser libre champ à l’import.
Depuis une dizaine de jours, les attaques envers l’élevage se multiplient. Ce qui n’a pas manqué de faire réagir à juste titre, les organisations professionnelles du secteur.
Ces recommandations sont ressenties comme une « vraie blessure », affirme le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau. « On est particulièrement agacés du procès qui est fait à l’élevage français », explique-t-il. Dans une lettre ouverte adressée le 23 mai (voir HLP sem21) à Elisabeth Borne, la FNB (éleveurs de bovins viande, FNSEA) exhorte la Première ministre à donner son « plan » pour la filière viande bovine, au lendemain de la publication du rapport de la Cour des comptes et de la présentation du plan du gouvernement pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre. « Nous voulons savoir ce que vous planifiez, vraiment, pour l’avenir de notre secteur », demandent les producteurs. Les conclusions des magistrats de la rue Cambon sont « simplistes et court-termistes », dénoncent les Jeunes agriculteurs.
Dans un communiqué de presse, les éleveurs du grand Massif central s’interrogent ainsi : « La France veut-elle d’un Grand Massif central sans éleveurs, sans vaches, sans prairies ? ». Et de pointer du doigt, les récentes déclarations de certains membres du Gouvernement (ndlr : celle de Bruno Le Maire) et le rapport de la Cour des Comptes faisant, depuis quelques jours, les gros titres des médias nationaux.
Un rapport qui, bien que soulevant certaines questions pertinentes sur l’élevage bovin et son lien fort avec les territoires sur lesquels il est implanté, se résume finalement à deux recommandations, sans appel : réduire drastiquement le cheptel français et accompagner les éleveurs dans une reconversion professionnelle. Ceci, en ignorant une réalité pourtant bien concrète : la baisse de production de viandes bovines en cours depuis de longues années, et qui s’est accélérée dernièrement se traduit, déjà, par une forte augmentation des importations.
En 2022, plus de 25% de la viande bovine consommée en France était importée : une donnée que les sages de la Cour des Comptes semblent avoir éloigné, volontairement ou non, de leur raisonnement.
Produire moins pour importer : où est la logique ?
Selon les éleveurs du berceau allaitant, « la Cour des Comptes fait ici un mauvais calcul, puisque depuis Bruxelles, alors même que nous débattions en France du pourcentage de vaches et de prairies à rayer de nos paysages, l’Europe offrait à l’Australie, dans le cadre d’un accord de libre-échange en cours de négociations, un nouvel accès privilégié au marché communautaire pour 24 000 tonnes de viandes bovines. »
Des viandes produites principalement au sein de « feedlots » : des parcs d’engraissement industriels contenant plusieurs milliers de bovins, dopés aux antibiotiques utilisés comme promoteurs de croissance.
La durabilité plutôt que la stigmatisation
Mais où est la logique ? « Toujours moins produire, sur nos territoires, pour dérouler la politique de libre-échange et proposer aux consommateurs des viandes produites toujours plus loin, respectant toujours moins les normes de production sanitaires et environnementales imposées aux éleveurs européens ».
Face à cette hypocrisie, les éleveurs du Grand Massif central proposent une autre approche : « définir, collectivement, quels sont les systèmes d’élevage durables que la France entend conserver sur ses territoires et recentrer la consommation de viandes sur celles issues de ces élevages. Ceci, afin de permettre à la France de tenir ses engagements environnementaux sans sacrifier inutilement des emplois, des entreprises, des familles et des territoires tout entiers. Parce que notre secteur est déjà en danger de mort, il est urgent que les responsables politiques assument, enfin, des décisions fortes et cohérentes. Dans quelques années, il sera trop tard. Et les dégâts, dans le Grand Massif central, seront malheureusement nombreux ».