À la banque de travail agricole, ni chèques ni billets, mais de l’entraide
Une organisation informelle entre agriculteurs permet d’échanger du temps et du matériel à titre gratuit, mais de manière équitable, puisque basée sur le principe de réciprocité.
Pas de président, de directeur... Pas question d’argent non plus, pas de cotisation. Pourtant, une “banque de travail” est une formule structurée qui remet au goût du jour - et de manière équitable - l’entraide agricole. Preuve que la recette fonctionne, celle de Châtaigneraie, qui regroupe six exploitations entre Fournoulès et Mourjou, fête cette année ses 50 ans d’histoire. Une histoire que retrace Louis Boudou : “L’initiative revient à Jean Favain, André Piganiol et Jean Castanier. Car déjà à l’époque, le matériel était cher et les outils dont on se sert assez peu, difficilement rentables. Alors, l’un achetait une presse, l’autre une pirouette, etc. L’adhérent équipé effectuait les travaux aussi chez ses voisins qui lui rendaient le même nombre d’heures sur d’autres missions, avec un matériel qu’il n’avait pas.”
Un principe inchangé depuis 50 ans
“Cette banque de travail, je l’ai connue j’étais encore enfant”, se remémore à son tour Annie Boudou. Elle sait aussi que le développement de l’ensilage dans les fermes a créé des besoins croissants et que le principe du temps échangé a connu là son plein intérêt. Aujourd’hui associée avec son fils Denis, le Gaec(1) fait toujours régulièrement appel au service de la banque de travail. Par exemple, il attèle le semoir d’une Cuma sur son tracteur et part semer chez les autres. Selon un barème établi en accord avec les membres de la banque de travail, il compte un certain nombre de points par heure pour le matériel prêté (tracteur) et pour les heures passées (chauffeur). Le cumul de ces points est “facturé” à chaque bénéficiaire qui devra “lui rendre” le même nombre de points. “C’est une règle : jamais d’argent”, précisent les utilisateurs. Dans certaines banques de travail où un adhérent doit de très nombreuses heures, un système d’échange peut éventuellement se mettre en place ; du surplus de fourrage par exemple. Parfois, un capital d’heures est rapidement consommé. En cas de coup dur, notamment. Louis se souvient de 1993. Il a eu un accident de tracteur et, alors qu’il était immobilisé, c’est la banque de travail et les heures qui lui étaient dues qui ont permis de faire tourner l’exploitation. Annie pense néanmoins que la tenue rigoureuse de ces heures échangées ne doit pas aller trop loin et se substituer à un simple coup de main. Sans autre pensée que rendre service. Dans tous les cas de figure, entente et confiance sont les maîtres-mots.
(1) L’exploitation laitière de Lestrade sur la commune de Saint-Constant-Fournoulès (407 000 l. sur 38 ha), n’a que peu de matériel et adhère à quatre Cuma.
Plus d'infos à lire cette semaine dans L'Union du Cantal.
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