Et s'il n'y avait plus d'éleveurs ?
Les actions des agriculteurs se multiplient. La Lozère est entrée dans le mouvement mercredi 27 janvier. À l'appel de la FDSEA et des JA du département, des tracteurs sont partis des quatre coins du département et ont rallié Mende. Une centaine de tracteurs a occupé la place Urbain-V à Mende.
L'agriculture française et l'élevage, en particulier, ont besoin d'une stratégie forte et d'une vision à long terme, plaide la FNSEA, pour sortir de l'ornière. Alors que les actions syndicales se multiplient sur le terrain, les enveloppes débloquées par le ministre de l'Agriculture étaient « attendues, nécessaires et indispensables », a déclaré Xavier Beulin devant la presse, le 27 janvier à Paris. « Je demande que les pouvoirs publics s'activent dans la mise en oeuvre », a-t-il ajouté pour signifier l'urgence de la situation et rattraper le retard pris dans la concrétisation du plan du 3 septembre. « Il n'y a que 187 millions d'euros qui ont été perçus par les agriculteurs et non 700 millions comme l'a déclaré à plusieurs reprises le ministre de l'Agriculture », corrige-t-il. De nouvelles mesures d'ajustement ont été décidées. Près de 290 millions d'euros supplémentaires au plan de soutien à l'élevage ont été annoncés par le ministre de l'Agriculture Stéphane Le Foll. À écouter les agriculteurs du département, « il ne s'agit que de mesurettes ».
Pallier les multiples crises, économiques et sanitaires reste le principal objectif des nouvelles sommes en jeu. Ce nouveau montant se décline via trois outils : le fonds d'allégement des charges, les cotisations MSA et l'année blanche. Sauf que le principe de l'année de blanche, « personne n'en veut ou alors à la marge, s'agace Christine Valentin, la vice-présidente de la FDSEA de la Lozère. L'année blanche ne fait que reporter les annuités en fin de tableau. Ce que je constate de blanc, c'est le revenu des agriculteurs, beaucoup n'ont plus de trésorerie et sont au bord de la faillite. » Les charges des producteurs de lait ne font que s'alourdir, « le prix du lait ne les couvre même plus, se désole Vincent Martin, vice-président des Jeunes agriculteurs de la Lozère et responsable du dossier lait. Nous sommes à 30 centimes aujourd'hui, probablement à 27 au printemps. Depuis la fin des quotas, nous n'avons plus aucune régulation. » Cinq à six centimes sur le prix du litre du lait, soit 350 euros les mille litres. Voilà ce qu'il faudrait aux producteurs pour sortir la tête de l'eau. « Ce n'est pourtant pas grand-chose, assure Julien Tufféry, président des Jeunes agriculteurs de la Lozère. Mais il y a autre chose qui nous inquiète, un embargo russe qui n'en finit pas, les conséquences du traité transatlantique, la mondialisation d'un marché sur lequel nous ne pouvons pas rivaliser avec nos normes et nos contraintes bien françaises. »
Guillaume Chevalier et Jonathan Delcros sont étudiants au lycée agricole Terre nouvelle à Marvejols, ils rêvent d'agriculture mais trouvent sa situation préoccupante : « Nous étudions les payes de lait en cours. On voit bien que de moins de moins d'argent va dans la poche de l'éleveur. Pour l'instant, on ne se pose pas la question de la réorientation... » Et si c'était le cas ? « Technicien d'élevage, oui, nous serons formés pour. Mais s'il n'y a plus d'éleveurs, quel est l'intérêt ? » Mobilisé aussi, Olivier Escrig, entrepreneur de travaux agricoles à Estables, « les conséquences de cette crise, nous les ressentons aussi, si nous ne faisons pas preuve de solidarité, nous ne nous en sortirons pas. » Solidarité aussi du côté de la Cabep avec son président Jean-Michel Marquès : « Vous agriculteurs, nous artisans, si on nous enlève du paysage économique lozérien, il n'y a plus rien dans le département ! »
La suite dans le Réveil Lozère, page 4, édition du 4 février 2016, numéro 1345.
L'agriculture se meurt
« La situation de l'agriculture française ne cesse de se dégrader et le gouvernement n'a pas pris la mesure de l'enjeu. Avec Bruno le Maire, ancien ministre de l'Agriculture, et plusieurs de nos collègues députés, nous avons interpellé le président de la République afin que des actions concrètes et efficaces soient mises en place afin de relever l'agriculture française. La détresse agricole est profonde. C'est tout un pan de l'économie nationale qui souffre. Notre agriculture se meurt. La réaction de l'État doit être à la hauteur des attentes », a déclaré Pierre Morel-à-l'Huissier, député de la Lozère.