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« Le consommateur dicte l’avenir de nos filières » selon Jean-Michel Schaeffer, le président de l’interprofession volailles de chair

Pour l’Anvol, l’étiquetage des volailles transformées devient incontournable pour limiter la portée négative des accords commerciaux internationaux en cours d’approbation.

Aviculteur label rouge en Alsace, Jean-Michel Schaeffer est également président de la Confédération de l’aviculture française et de l’Itavi. « J’espère qu’Emmanuel Macron maintiendra son refus de l’accord avec le Mercosur en l’état actuel et convaincra les autres dirigeants européens. » © P. Le Douarin
Aviculteur label rouge en Alsace, Jean-Michel Schaeffer est également président de la Confédération de l’aviculture française et de l’Itavi. « J’espère qu’Emmanuel Macron maintiendra son refus de l’accord avec le Mercosur en l’état actuel et convaincra les autres dirigeants européens. »
© P. Le Douarin

Quelle est la situation du marché français ?

Jean-Michel Schaeffer - « La consommation française est toujours dynamique. L’an dernier, elle a crû de 1 % par rapport à 2017, à 1,8 million de tonnes. Mais le début de cette année a été difficile pour la volaille produite en France. Au premier trimestre, la production de poulet a diminué de 22 000 tonnes d’équivalent carcasse tandis que les importations ont augmenté de 15 000 tec pour alimenter la hausse de consommation de 19 000 tec. Le taux de 45 % de la consommation importée en poulet va certainement augmenter cette année, alors qu’il restait à ce niveau depuis 2012.En dinde, la production a reculé de 10 000 tec et la consommation de 3 000 tec. En poulet label, les labélisations ont diminué de 5 % au premier trimestre. Nous pensons qu’il y a un effet du plafonnement du volume des promotions par la loi Égalim. Avant le vote, nous avions attiré l’attention sur ce risque."

Comment cela s’explique-t-il ?

J.-M. S.- « Toutes ces évolutions sont la conséquence de la modification des comportements alimentaires. En résumé, les Français s’orientent de plus en plus vers les produits transformés fabriqués avec des viandes importées moins chères, et consommés hors domicile. Ils achètent donc moins en grande distribution. Dans le même temps, les consommateurs préfèrent acheter des produits crus découpés, ce qui pénalise le poulet label rouge vendu entier pour 70 % des volumes. La découpe label rouge étant plus chère, ils en achètent moins. »

Où en est le commerce international ?

J.-M. S.- « Les opérateurs ukrainiens ont profité d’un trou dans la raquette réglementaire de l’Union européenne. Pour éviter d’atteindre très vite les 200 000 tonnes importées, les professionnels ont obtenu que l’UE bloque la porte d’entrée, en échange d’une compensation qui est malheureusement trop forte (50 000 t supplémentaires). D’autre part, cette année, le Brésil redevient le premier fournisseur (+ 23 % à fin août par rapport à 2018) avec l’espoir de gagner encore 180 000 tonnes d’accès sans droit à payer. Sachez qu’en Europe, le cours du filet de poulet est très dépendant du cours du filet brésilien importé. Or, les Européens ne seront jamais au prix de revient brésilien. Nous demandons que les autorités européennes arrêtent de déclarer que cet accord est bon pour la volaille ! L’UE a sacrifié le poulet pour d’autres avantages. Ces 180 000 tonnes sont à multiplier par quatre pour avoir une idée du tonnage de poulets entiers qui seraient produits en moins. Et si on ajoute le Brexit, sur lequel nous n’avons aucune visibilité, il y a plus d’un million de tonnes de filet à replacer dans l’UE. Gros importateur, la France sera le pays le plus impacté par ces évolutions. »

Qu’attendez-vous des autorités européennes ?

J.-M. S.- « L’accord avec le Mercosur est inacceptable en l’état, tout comme il est inacceptable que seuls les produits importés alimentent la croissance de la consommation européenne. Nous demandons que des mesures spécifiques à la volaille soient prises. En effet, les 700 millions d’aides compensatoires données en une seule fois et à toutes les filières seront largement insuffisantes. Il faudra aussi plus de contrôles sanitaires aux frontières avec un budget à la hauteur. »

Que peut faire la France pour rééquilibrer la distorsion de concurrence ?

J.-M. S.- « Nous espérons qu’Emmanuel Macron maintiendra son opposition à l’accord et convaincra ses homologues. Nous demandons aussi que l’origine du pays soit inscrite sur toutes les volailles, quels que soient leur niveau de transformation et leur circuit de vente. C’est simple et efficace, sachant que la restauration hors foyer pèse pour 27 % de la consommation et que 80 % de ce volume est fourni par l’importation. De plus, 89 % des consommateurs disent qu’ils préfèrent manger de la volaille française. Ils doivent pouvoir avoir le choix d’acheter en connaissant l’origine. Après en avoir discuté avec les ministères français des Finances et de l’Agriculture, nous sommes optimistes et nous espérons que l’obligation d’étiqueter l’origine dans la restauration (commerciale et collective) sera appliquée dès le 1er janvier 2020, après l’approbation par la Commission européenne. Dans cette hypothèse, la posture des acheteurs et transformateurs pourrait changer en notre faveur. »

Le plan de filière présenté fin 2017 est-il encore d’actualité ?

J.-M. S.- « Ses deux objectifs principaux étaient de reconquérir des volumes d’importations et de développer les signes de qualité (+15 % en label et + 50 % en bio sur 5 ans). Force est de reconnaître que ce sera difficile, mais nous restons mobilisés. Nous sommes le seul pays au monde à avoir une offre aussi diversifiée en termes de productions et de modes d’élevage qui permet de répondre à de nombreuses attentes sociétales et nous le prouvons avec des outils d’évaluation : Eva pour la durabilité, Ébène pour le bien-être, RefA2vi pour la réduction des antibiotiques. »

« La France est la plus sensible aux importations »

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