Comment s’équiper en stations météorologiques?
Gel, irrigation, maladies… Les stations météorologiques connectées et les outils d’aide à la décision qui les accompagnent permettent d’optimiser les quantités d’intrants et de maximiser la quantité et la qualité de la récolte.
Gel, irrigation, maladies… Les stations météorologiques connectées et les outils d’aide à la décision qui les accompagnent permettent d’optimiser les quantités d’intrants et de maximiser la quantité et la qualité de la récolte.
Concilier sécurisation de la production et optimisation des moyens mis en œuvre est aujourd’hui un enjeu majeur. Les stations météorologiques peuvent y contribuer. Ces dernières années, la pression sociétale incite aussi à encore mieux piloter l’utilisation des intrants. En parallèle, plusieurs modèles sont apparus sur le marché au sein d’outils d’aide à la décision (OAD), permettant de mieux comprendre le développement de ces maladies, en fonction des cépages, des types de sol. Ces OAD permettent d’intervenir davantage en préventif, à des doses plus réduites et, selon les années, à une fréquence moindre.
Cependant, ces modèles fonctionnent avec des données météorologiques issues de différents prévisionnistes de marché. « Certains modèles établissent des calculs sur une maille d’un kilomètre, c’est-à-dire un carré d’un kilomètre de côté, quand d’autres s’appuient sur une maille de 30 kilomètres », explique Édouard Loiseau, président de Promété. On comprend donc la nécessité d’avoir une précision plus fine, avec des stations météorologiques connectées.
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Optimiser un traitement préventif ou précipiter le curatif
S’équiper d’une ou plusieurs stations météorologiques permet de confronter les estimations aux réelles valeurs de pluviométrie, de température, etc. En intégrant ces données locales, les OAD vont donner des préconisations beaucoup plus fiables. L’équipement minimal de la station météorologique est un pluviomètre et un capteur de température. En outre, la mesure d’hygrométrie complète les mesures de température et de pluviométrie, en indiquant si le microclimat est favorable au développement de la maladie.
En fonction des données récoltées, l’OAD permet d’agir de manière préventive ou curative. « Avec une connaissance fine du microclimat, le viticulteur est amené à traiter au bon moment, de manière préventive, avec une dose sensiblement réduite, explique Édouard Loiseau. Selon les années, notamment sèches, les quantités appliquées peuvent être considérablement réduites. Jusqu’à 50 % en moyenne. Certains clients n’ont par exemple réalisé aucun traitement cette année en Champagne, alors qu’ils auraient réalisé un ou deux passages de manière sécuritaire sans station ni OAD. »
Mais les informations données par une station peuvent au contraire précipiter un traitement. Président de Weenat, Jérôme Le Roy cite comme exemple le cas d’une parcelle distante du siège de l’exploitation et dans laquelle on vient d’appliquer un traitement juste avant une pluie. « Une fois rentré, il ne tombe que quelques gouttes dans la cour de l’exploitation, ce qui laisse à penser que le traitement reste efficace. Heureusement, le pluviomètre à la parcelle renseigne qu’un gros orage y a lessivé le traitement que l’on vient d’appliquer. Dans cette situation, on précipite un traitement, mais on s’assure d’une récolte saine. »
Aussi, si certains capteurs couplés à des OAD aident à décider de la pertinence d’aller traiter, d’autres renseignent si le moment est opportun. L’anémomètre informe sur la vitesse du vent et peut éviter de préparer inutilement une bouillie pour pulvériser une parcelle soumise aux vents, alors que l’air est calme au siège d’exploitation. Le capteur de point de rosée, ou encore mieux le capteur d’humectation foliaire, placé dans les rangs de vigne, renseigne de l’état de la rosée sur les feuilles et donc de l’efficacité de l’application. « Une rosée trop importante peut faire échouer un traitement de contact, qui ruissellera, explique Thomas Lemaire, de Sencrop. Au final, on gagne ou on optimise son temps et on évite de gâcher une bouillie qui sera mal appliquée. Et pour le confort, on peut programmer un réveil sur l’application, au-delà d’une heure raisonnable paramétrée par le viticulteur, lorsque les conditions de vent et d’hygrométrie sont optimales, afin d’aller faire les traitements matinaux. »
Des nuits plus sereines pendant les gels printaniers
Autre risque pour les vignes, les gels printaniers, encore plus menaçants alors que la douceur des hivers et printemps favorisent un débourrement précoce. La mesure de la température humide comparée à celle de la température dite sèche permet d’anticiper un gel. En cas de risque avéré, une alerte est envoyée au chef d’exploitation, sous forme d’appel téléphonique, de SMS…, afin qu’il mette en place les solutions de lutte. Le délai de prévenance est paramétrable selon le temps de la mise en œuvre de la méthode de lutte.
Plus tard dans la saison, le manque d’eau peut être un facteur de stress et impacter la maturation et le rendement des grappes. Dans les exploitations équipées d’installations d’irrigation, certains modèles, s’appuyant sur des données météorologiques (pluviométrie, évapotranspiration potentielle) à large échelle permettent de piloter l’arrosage. S’équiper au minimum d’un pluviomètre est un prérequis pour gagner de manière importante dans la précision de l’irrigation. "Investir dans des capteurs d’humidité dans le sol, comme les tensiomètres ou les sondes capacitives, réduit le besoin d’un modèle informatique pour piloter, poursuit Jérôme Le Roy. Avec une connaissance fine des types de sol dans son parcellaire et un positionnement adéquat des tensiomètres selon le type de sol, on gère seul l’irrigation depuis notre application Weenat. Il suffit de rentrer le type de sol, le cépage, le stade de développement de la vigne. L’application définit quatre seuils : saturation en eau, confort, vigilance, stress. Selon les objectifs de production (quantité, terroir, type de vin souhaité), on définit des alertes qui avertissent le viticulteur en temps voulu. »
Sondes capacitives ou tensiomètres ? Jérôme Le Roy tend à préconiser les seconds parce qu’ils sont moins chers et traduisent mieux le fonctionnement de la culture. Une sonde capacitive informe sur la quantité d’eau dans le sol. Mais cette eau n’est pas forcément facile à extraire. Le tensiomètre renseigne, lui, sur la force nécessaire pour extraire cette eau. En revanche, il est nécessaire de placer plusieurs tensiomètres à différentes profondeurs, ces dernières étant différentes pour une jeune vigne, dont l’enracinement est encore peu profond, que pour une vieille vigne. Et il faut un jeu de tensiomètres par type de sol. « Certains de nos clients ont jusqu’à 13 types de sol différents », illustre Jérôme Le Roy. Sencrop privilégie les sondes capacitives de son partenaire Corhize. « Les tensiomètres sont des capteurs de contact, explique Thomas Lemaire. Si le contact se perd, par rétractation de l’argile par exemple, on n’a plus l’information. La sonde capacitive mesure un champ électrique, c’est donc un capteur volumétrique qui n’a pas ce problème de contact. »
Bien positionner ses stations
Le choix du nombre de stations et de leur emplacement est à décider avec le fabricant ou le conseiller technique local. Bien sûr, il est inutile d’investir massivement dans une multitude de stations toutes très équipées. « Un investissement raisonné peut comprendre une station principale toute équipée à proximité du siège d’exploitation et une multitude de stations avec quelques capteurs, selon l’objectif de lutte souhaité », explique Édouard Loiseau. Le positionnement de la station dans la parcelle est à décider selon les connaissances du viticulteur de son terroir et de son objectif. « Par exemple dans le cadre de la lutte contre les maladies, le viticulteur peut choisir de placer ses sondes dans les zones qu’il sait naturellement plus propices aux attaques, afin d’empêcher tout développement, poursuit Édouard Loiseau. Mais dans un objectif de réduction des phytos, il placera alors ses sondes dans une zone plus représentative, tout en conservant un œil sur les zones plus sensibles. »
La densité d’implantation est à déterminer en fonction de la variabilité sur son parcellaire et de son budget, « même si un traitement économisé rembourse immédiatement l’investissement dans une station bien équipée », fait remarquer Édouard Loiseau. En outre, le partage des données entre exploitations, par exemple en investissant collectivement, ouvre la voie à des connaissances fines sur tout un secteur.
Dans un contexte où la viticulture est de plus en plus surveillée, ces équipements peuvent également s’avérer être des outils de traçabilité. « L’un de nos clients champenois s’est fait attaquer par son voisinage, qui l’accusait de traiter par conditions venteuses », cite pour exemple Valérie Gros, de Sencrop. L’historique de la station connectée sur la parcelle a donné raison au viticulteur, puisque le vent n’a jamais atteint 20 km/h au moment du traitement.