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L'offre française des rosés se redessine

Le succès des rosés met toutes les régions sous pression. Trouver des volumes et bien positionner leur offre : tels sont les enjeux en ce début de campagne 2014-2015.

© J.-C. Gutner

La prévision du stock pour les trois appellations de Provence au 31 décembre prochain est de 3500 hectolitres. Autant dire un stock nul qui n'est pas un cas à part dans le paysage des régions productrices. En Vallée du Rhône, en Languedoc, en Anjou... les stocks sont également historiquement bas. Mécaniquement, cette rareté fait grimper les prix à des sommets, notamment ceux de fin de campagne : les côtes de provence vrac se sont envolés à un pic de 260 euros par hectolitre durant l'été.

La grande distribution cherche une alternative aux rosés provençaux


Dans ce contexte, l'offre française se redessine. Les appellations de Provence assoient une position de leader du marché en occupant les segments de prix les plus hauts en grande distribution (4,53 euros par col). Mais depuis 2010, les appellations provençales voient leurs volumes commercialisés en grande distribution (GD) s'éroder, recul qui est contrebalancé par un développement très dynamique de l'export. Challenger de la Provence, les rosés de Loire, qui représentent 25 % de parts de marché pour un volume de 500 000 hectolitres, connaissent une stabilité de prix depuis 2010 à 3 euros par col. Les autres régions productrices cherchent à tirer leur épingle du jeu ; un jeu facilité par des ruptures de stocks qu'ont connues certaines AOP provençales. " Dans le bassin Languedoc, les volumes produits en rosé ont augmenté de 22 % ", illustre Jérôme Villaret, du Comité interprofessionnel des vins du Languedoc (CIVL). Cette progression de l'offre trouve facilement un débouché. " Devant la montée des prix provençaux, la grande distribution cherche des alternatives ", analyse Brice Eymard, économiste pour InterRhône. Et d'affirmer : " avec une AOP lubéron à 2,80 euros par col, la marge de la grande distribution est meilleure qu'avec une AOP de Provence ".
Reste que si toutes les régions affichent des chiffres de progression très positifs, l'inquiétude n'en est pas moins latente. La progression, oui, mais jusqu'où ? Les rosés représentent aujourd'hui 35 % de l'offre française et grignotent petit à petit l'offre rouge ; le blanc restant quasiment insensible à cette déferlante rose. À quel point, l'équilibre entre rouge et rosé sera-t-il trouvé ? Devant l'emballement général, les économistes des différentes interprofessions viticoles appellent les opérateurs à garder la tête froide. " Le rosé ne se garde pas. Du coup, toute la production doit être vendue dans l'année. Il faut en tenir compte lors de l'accroissement du volume proposé sur le marché ", conseille Christian Vital, économiste chez InterLoire. Et du point de vue des prix, là encore, la prudence est de mise. " Il y a des prix au delà desquels les acheteurs peuvent diminuer leurs achats de volume ou changer leurs modes de consommation pour un produit donné, c'est un phénomène très complexe ", glisse Michel Couderc, économiste au Centre interprofessionnel des vins de Provence.


Les côtes de provence demandent une hausse de rendement


Calmer la hausse des prix, voilà qui pourrait apparaître comme un voeu pieux en 2014. Durant cette campagne, la vraie problématique de la production sera de proposer suffisamment de volumes. Dans chaque région, l'amont se met en position de répondre à la demande. En Provence, les producteurs anticipent un marché très tendu : les côtes de provence et les coteaux varois ont demandé un déplafonnement du rendement autorisé pour pouvoir vendanger 60 hl/ha au lieu de 55 hl/ha. Les pays d'oc, quant à eux, font valoir la souplesse de leur offre dont les cépages, traditionnellement rouges, peuvent produire des rosés. C'est notamment le cas du merlot qui est de plus en plus utilisé en vinification rosé. « Avec 56 cépages et un rendement autorisé à 90 hectolitres par hectare, les rosés pays d'oc offrent une diversité. Au-delà du cinsault, les cépages noirs comme la syrah, le grenache ou le merlot sont adaptés à des vinifications rosées »,  fait ainsi valoir Laure Lacombe, économiste d'InterOc. Ce transfert des cépages rouges vers les rosés connaît cependant une limite. " La capacité technique des caves entrave la capacité à produire ", indique ainsi Michel Servage, président de Foncalieu.
Ce jeu de transfert de l'offre a-t-il une limite ? " Oui ", répond sans hésiter Fabrice Chaudier du cabinet Nemesis. " Face à une offre réduite, le consommateur peut effectivement transférer son achat sur une autre origine, mais il peut aussi tout simplement ne pas acheter. " Et de conseiller à toutes les régions qui veulent s'imposer sur le marché des rosés de travailler sur leur image. " Le transfert se fera d'autant mieux que l'image sera forte. " C'est aussi une question de commerce. " Il va falloir que les régions soient très agressives et qu'elles investissent. "

Les records des rosés en 2013-2014


. 300 000 hectolitres de rosé d'anjou commercialisés, le volume le plus 
important enregistré depuis 1970.

. En pays d'oc, certains prix de rosés de cépages étaient supérieurs à ceux des rouges : du jamais vu !

. Le prix vrac de certaines côtes de provence a dépassé les 250 euros par hectolitre.

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