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Le suivi des sucres pour piloter son profil vin

À travers son approche reverse, la société Vivelys aide les vignerons à adapter leurs pratiques viti-vinicoles en fonction d’un objectif de production. Avec, comme point d’entrée, l’analyse du chargement en sucres.

Définir son objectif de production et identifier les leviers techniques qui permettent d’y parvenir, tel est le but de l’approche reverse, construite par Vivelys. Les ingénieurs s’appuient notamment sur la séquence aromatique du raisin, qui évolue du fruit frais vers le fruit mûr, en passant par une phase de neutralité aromatique. L’outil Dyostem, capable de calculer le chargement en sucres des baies, permet d’anticiper ces évolutions pour piloter la récolte. « Car il n’y a pas de date de vendange idéale, assure Nicolas Bernard, en charge des solutions vigne chez Vivelys. Tout dépend du produit que l’on souhaite obtenir. » Il suffit de réaliser un prélèvement classique, de 200 ou 300 baies. « Celles-ci sont placées sur un plateau et, de là, le Dyostem prend une photo pour mesurer leur volume et leur couleur », détaille Nicolas Bernard. Les raisins sont ensuite récupérés par l’opérateur en vue d’une analyse de concentration en sucres classique. « Avec le volume des baies et leur teneur en sucres, l’outil calcule leur chargement et envoie les données vers une base accessible par ordinateur, poursuit le consultant. En quelques secondes seulement, nos modèles proposent une interprétation des résultats, à partir de données récoltées sur une soixantaine de cépages dans dix pays distincts. » Pour un suivi optimal, il recommande de démarrer relativement tôt, à mi-véraison. « Pour les rouges, un point par semaine est largement suffisant, explique-t-il. Avec les blancs, en revanche, les fenêtres aromatiques sont beaucoup plus restreintes. En particulier pour les cépages thiolés. » Il oriente donc vers deux mesures hebdomadaires.

Surveiller la date d’arrêt de chargement en sucres

« En situation classique, c’est-à-dire dans 90 % des cas, les raisins connaissent une phase d’accumulation active, qui dure 4 à 6 semaines », observe Nicolas Bernard. Durant tout ce temps, les baies, en plein boom métabolique, se gorgent de sucres et de précurseurs aromatiques. Et ce, jusqu’à atteindre un plateau, au moment où les sucres cessent de s’accumuler. « C’est un jalon très important, commente-t-il. Car à partir de là, les fruits basculent progressivement dans leur phase de vieillissement. » Dans le cas du sauvignon par exemple, les précurseurs des thiols atteignent un pic au moment de l’arrêt du chargement en sucres. Après cela, les processus métaboliques basculent, ce qui conduit à la formation de composés aromatiques terpéniques. « D’où l’intérêt de prévoir cette évolution pour choisir la meilleure fenêtre de vendange », observe l’ingénieur.

Certains cépages ont un cycle beaucoup plus long. C’est le cas du cabernet sauvignon, qui a besoin d’au moins 45 jours pour exprimer pleinement ce volet terpénique. « C’est ce qui explique la différence d’équilibre entre les cabernets bordelais et chiliens », illustre Nicolas Bernard. Et de comparer les pratiques dans le médoc, où les raisins sont récoltés autour de J + 20 à J + 30 (c’est-à-dire 20 à 30 jours après la date d’arrêt de chargement en sucres), et au chili, où l’on ramasse autour de J + 50 ou J + 60. « Résultat, les cabernets français sont beaucoup plus frais. »

Éviter les erreurs sur les parcelles à bas potentiel

Mais au-delà des caractéristiques génétiques propres à chaque cépage, l’évolution de la séquence aromatique est directement liée à l’état hydrique de la parcelle. En cas de très forte contrainte, le chargement en sucres est lent, et conduit à des degrés alcooliques potentiels bas au moment de la fin du chargement en sucres. Par la suite, les fortes chaleurs entraînent des pertes de volumes sur les baies, et donc un effet de concentration conduisant in fine à des degrés élevés. « Quoi qu’il en soit, en cas de contrainte, la photosynthèse se bloque, ce qui se traduit par une faible production de précurseurs aromatiques », poursuit Nicolas Bernard. Selon lui, deux solutions s’offrent aux vinificateurs. Soit rentrer la vendange tôt, avant flétrissement, et opter pour des process industriels types thermo-vinification ou flash détente. Soit attendre et pousser en maturité pour obtenir un côté sucrant et concentré. « Dans cette situation, l’aromatique du vin se construit plutôt au moment de l’élevage en barriques », note le consultant.

Dans le cas des parcelles en excès d’eau, Vivelys observe là encore des degrés potentiels bas au moment de l’arrêt de chargement en sucres. « On obtient bien des profils fruit frais, mais dilués. En revanche, ces raisins-là n’expriment pas le volet fruit mûr, constate l’expert. L’erreur classique consiste à attendre alors que la parcelle n’atteigne jamais le potentiel voulu. Mieux vaut repenser son itinéraire de vinification. » Sur cépages rouges par exemple, il recommande la production d’un vin léger, d’entrée de gamme, ou d’un rosé.

En conséquence, les analyses par Dyostem sont un levier efficace pour maîtriser la vendange en fonction de l’objectif de vinification. Mais derrière, reste tout le travail de l’œnologue. « Car un même profil de raisin peut bien sûr conduire à différents vins », note Nicolas Bernard. En fonction de l’objectif visé, les vignerons peuvent opter pour des vinifications plus ou moins réductrices par exemple. Ou adapter le choix de la souche de levure. « Si l’on cherche à obtenir du variétal frais, moyennement concentré, il va falloir travailler sur les tanins, souligne-t-il. Car sur ce genre de matrice, ils sont très agressifs. » En conséquence, il recommande un apport d’oxygène au moment de la vinification, ou via un élevage en barriques. De même, il déconseille les bouchons trop hermétiques. « Pour ce qui est du gras et de la sucrosité, on va pouvoir travailler sur le choix des bois ou sur le batonnage », ajoute l’ingénieur. À l’inverse, il préconise un process plus réducteur sur les cépages thiolés. « Mais il y a aussi tout le travail de révélation des arômes au moment de la fermentation, explique-t-il. Cela passe, entre autres, par le choix des souches ou la nutrition des levures. »

témoignage

(((Laborde)))

« Des gros manseng plus aromatiques »

« Le syndicat des vignerons indépendants de Jurançon s’est équipé d’un Dyostem en 2013. Et aujourd’hui, nous sommes près d’un tiers des adhérents à l’utiliser, moyennant 20 euros par parcelle et par an. Je pense que tout le monde est satisfait. D’ailleurs, des vignerons nous ont rejoints en cours de route. Vivelys nous a accompagnés dès le début du projet pour caractériser les gros manseng, et travailler nos vins blancs secs. Grâce au Dyostem, nous nous sommes rendu compte que les arômes de fruits frais étaient très marqués 8 à 10 jours après la date d’arrêt de chargement en sucres. À partir de 12 jours, la bascule commence à se faire vers une fenêtre neutre, qui correspond à l’apparition des arômes fermentaires. Et au-delà de 14 jours, il n’y a plus que les notes fermentaires. En revanche, nous n’avons jamais observé de profils fruits mûrs. Mais j’imagine qu’à Madiran ou en côtes de Gascogne, les choses sont différentes. Au domaine du Cinquau, nous voulions travailler des blancs plus aromatiques. Et ces observations nous ont poussés à vendanger plus tôt que nous ne l’aurions fait a priori. D’un point de vue organoleptique, le résultat est là. En revanche, cela n’a pas trop impacté nos conditions de vinification car nous étions déjà dans cette recherche de fraîcheur et d’aromatique. Maintenant, la prochaine étape sera peut-être de travailler sur nos petit manseng. »

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