Bordeaux
La réforme de l’agrément met le feu aux poudres
Mis à mal par la crise, s’estimant menacés par la réforme de l’agrément, un collectif inter-appellations de vignerons en colère rassemblant à ce jour quelque 1000 adhérents vient d’être créé à Bordeaux.
« Du Médoc, de Fronsac, même de Saint-Estèphe, des vignerons de toutes les AOC, mis à part Sauternes, nous rejoignent », constate Daniel Fénelon, co-président de ce collectif inter-appellations. « Ce mouvement prend une ampleur extraordinaire ce qui démontre le désarroi qui existe aujourd'hui en Gironde ». Le malaise était sans doute profond mais jusqu'ici latent. Un orage de grêle dévastateur dans certaines zones a été le facteur déclencheur pour que des vignerons sortent du silence et que ce collectif prenne forme. Bernard Farges, président du syndicat des AOC bordeaux et bordeaux supérieur, le reconnaît. « Avec une baisse de 28 % du nombre de contrats enregistrés, une diminution des exportations de 16 % et un prix du vrac rouge en baisse d'1%, la campagne 2008-09 a été une année noire ». Mais cela ne suffit sans doute pas à expliquer la grogne de la base. « A toutes ces difficultés, est venue s'ajouter la réforme de l'agrément. Nos instances professionnelles ont construit des cahiers des charges impraticables avec des contrôles dans les exploitations. Si ces contrôles sont réellement effectués, ce sont trois quarts des producteurs d'AOC qui n'auront pas l'agrément. Les viticulteurs n'ont pas maîtrisé la rédaction de ces cahiers des charges. Ils n'ont pas compris que ce qui se mettait en place aller les asphyxier. C'est comme s'il y avait une volonté de tuer la petite viticulture », ajoute Daniel Fénelon. Le collectif ne demande pas pour autant la suppression des cahiers des charges et des contrôles. « Par contre, nous voulons obtenir un moratoire sur ces contrôles. Nous demandons de la souplesse, que l'on fasse de la pédagogie pendant deux ou trois ans afin de bien expliquer aux vignerons ce qu'ils doivent faire et ne pas accroître encore leurs difficultés. Car on le sait bien. Quand les décrets seront officiellement approuvés par l'Inao, les contrôles seront appliqués à la lettre et à la deuxième mise en garde, la sanction tombera. Et quand on nous dit que grâce aux cahiers des charges, les cours remonteront, autant croire au Père Noël ». Laurent Gapenne, président de la Fédération des grands vins de Bordeaux, indique qu'il entend et comprend le désarroi de tous ces vignerons. « Je ne veux pas qu'il soit dit que je suis contre ce collectif qui porte des revendications que nous voulons défendre. Il faut s'écouter plutôt que de se tirer dans les pattes. Mais pour ce qui est des contrôles, je rappelle qu'à ce jour 500 contrôles ont été effectués et que sur ce nombre, deux seulement ont posé problème. Mais il est tout de même étonnant que dans certaines AOC, on s'inquiète de ces contrôles alors qu'ils n'ont pas encore eu lieu ».