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« J’économise 50 % de phytos dans mes vignes grâce à un programme couplé au bicarbonate de potassium »

Dans l’Hérault, Cristel Grégoire a mis au point sa propre bouillie à base de bicarbonate et développé un programme qu’il nomme « culture raisonnée environnementale », lui permettant d’économiser 50 % de phytos. Reportage.

C’est un orage de grêle, à l’approche des vendanges, qui a bouleversé la façon de travailler de Cristel Grégoire, viticulteur coopérateur à Bessan, dans l’Hérault. C’était il y a dix ans. Après avoir évalué l’ampleur des dégâts, il s’est rendu chez son distributeur en quête de conseils. Ce dernier lui a suggéré un fongicide naturel aux propriétés asséchantes pour éviter l’installation du botrytis. « Je trouvais le produit onéreux, raconte Cristel Grégoire. Surtout pour des raisins que j’estimais perdus. En lisant la composition j’ai vu que c’était à base de bicarbonate de potassium. Aussi je me suis dit que j’allais tenter par moi-même. »

Le viticulteur s’est donc procuré du bicarbonate de potassium pur, une option beaucoup plus économique. Il y a ajouté du savon noir bio, une habitude qu’il avait déjà prise avec ses désherbants pour éviter le ruissellement et améliorer l’adhésion du produit sur les feuilles. « Ça marche très bien », assure-t-il. Trois jours après son traitement, il a commencé à observer des grains secs.

Un effet asséchant sur le botrytis et le mildiou mosaïque

Au bout d’une semaine, il a renouvelé l’opération et s’est rendu compte qu’in fine, toutes les baies touchées par la grêle avaient séché. Et il n’a pas vu l’ombre du botrytis. « Je me suis alors dit, si cela marche pour la pourriture grise, peut-être que cela fonctionne aussi pour les autres champignons qui s’attaquent à la vigne », poursuit le viticulteur. Enthousiaste, Cristel Grégoire a donc réalisé un test en fin de saison sur le mildiou mosaïque. « Les tâches ont toutes été brûlées ! », lance-t-il. Tout naturellement, le viticulteur a voulu approfondir sa technique dès le début de la campagne suivante, et a sacrifié 80 ares de carignan qui étaient promis à l’arrachage. Les traitements y ont été faits uniquement au bicarbonate.

« Autant dire que les deux premières années, j’ai perdu ma récolte sur cette parcelle », ironise Cristel Grégoire. Mais à force d’obstination, le viticulteur a fini par trouver le bon équilibre. Tout d’abord, il a amélioré sa bouillie, en ajoutant au bicarbonate de potassium et au savon noir, de l’huile de lin. « C’est un cicatrisant naturel, que l’on utilisait auparavant pour les plaies des chevaux, commente le viticulteur. Ainsi la bouillie colle à la feuille, sèche et cicatrise. » Il ajoute également un stimulateur de défense des plantes sous la forme de phosphonates de potassium. De même, il a peaufiné les positionnements et a intégré sa bouillie dans un programme complet. Lors de la quatrième année de test, le résultat était pleinement satisfaisant, malgré une grosse pression oïdium.

L’observation et la prévention sont clés pour la réduction de dose

Depuis 2020, Cristel Grégoire a franchi le cap : la totalité de ses 20 hectares de vigne est désormais protégée selon son programme, qu’il nomme CRE, pour « culture raisonnée environnementale ». Concrètement, le viticulteur suit un programme conventionnel qu’il ne dose qu’à moitié tout au long de la saison et qu’il complémente de sa bouillie à base de bicarbonate de potassium. Il n’y a que pendant la fleur qu’il ne prend pas de risque, et n’utilise plus que du conventionnel en dose pleine.

« Sur la campagne, ça me fait économiser quasiment 50 % de phytos, affirme-t-il. C’est deux fois moins de produits à manipuler, mais aussi moitié moins cher et deux fois moins de résidus potentiels pour le consommateur de vin. » Le viticulteur précise qu’il n’y a rien de magique, et que cela demande malgré tout quelques précautions. Comme celle d’observer ses vignes pour n’agir que lorsque c’est nécessaire et préférentiellement en préventif, ou encore d’alterner les rangs d’un passage du pulvérisateur à l’autre pour que la bouillie circule au mieux tout au long de la saison.

« Certaines personnes m’ont contacté via les réseaux sociaux. L’an dernier j’ai suivi et conseillé trois viticulteurs, dont deux en bio. Nous avons réussi à diminuer les doses de cuivre par deux », assure Cristel Grégoire. Le viticulteur aimerait d’ailleurs mettre son expérience à profit pour aider d’autres viticulteurs et les conseiller pour les accompagner dans la réduction des produits phytosanitaires. « Il m’est impossible de donner de recette toute faite car les doses et passages dépendent du contexte, des cépages, de la problématique… L’accompagnement est véritablement nécessaire pour ne pas se planter », expose-t-il. À l’heure de l’annonce du plan Ecophyto 2030, voici un exemple instructif…

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