Flavescence dorée : adopter les bons réflexes
Le réseau Winetwork, destiné à la diffusion des connaissances européennes, a édité une fiche technique pour aider la profession à gérer la maladie de la flavescence dorée avec plus de précision. Voici les points qui demandent une vigilance particulière.
Le réseau Winetwork, destiné à la diffusion des connaissances européennes, a édité une fiche technique pour aider la profession à gérer la maladie de la flavescence dorée avec plus de précision. Voici les points qui demandent une vigilance particulière.
Repérer l’apparition du vecteur
Il existe plusieurs méthodes pour déterminer la période d’activité du vecteur. Placer des bois de deux ans d’une parcelle abritant des cicadelles dans des cages d’émergence, à surveiller tous les jours, est un moyen très efficace pour déterminer l’éclosion des œufs. Un piège englué placé à l’intérieur permet de capturer les larves dès leur sortie. Il est possible d’utiliser des outils d'aide à la décision (OAD) de modélisation, capable de prédire l’apparition en fonction des températures et des observations passées. Le contrôle visuel des stades larvaires sur les feuilles est toutefois indispensable pour choisir la date du premier traitement. Cette opération doit se faire idéalement le matin en évitant de faire bouger la végétation, de mi-mai à août, en regardant la face inférieure des feuilles sur les pampres et la base du cep. Dans les parcelles exemptes de cicadelles, il peut être intéressant d’installer des pièges collants jaunes pour surveiller l’apparition des adultes et prévenir l’infection. La surveillance s’applique aussi sur les parcelles infestées, pour décider d’un éventuel insecticide supplémentaire sur les adultes. Ces pièges, à placer à l’intérieur du feuillage à 1,5 m de hauteur et à raison de 5 à 6 unités par hectare, doivent être contrôlés tous les sept jours.
Maîtriser l’application insecticide
Le premier traitement doit être effectué un mois après éclosion des œufs, durée d’incubation du phytoplasme avant que les larves ne soient infectieuses. C’est le traitement le plus important. L’application insecticide doit couvrir toute la surface foliaire de la vigne, ainsi que le tronc et les pampres. Ces zones sont particulièrement exposées puisque la femelle pond sous l’écorce de 2 ans. Il est par ailleurs recommandé d’enlever les gourmands avant le traitement. Dans le cas d’une application au pyrèthre pour les viticulteurs bio, mieux vaut traiter sur des formes jeunes, et renouveler le traitement après une semaine. Il est recommandé de l’appliquer en fin de journée pour ne pas exposer la molécule aux UV et aux hautes températures. Mais aussi de traiter rapidement après préparation et d'utiliser un bidon récent et une eau au pH inférieur à 6,8.
Soigner la prospection
La surveillance du vignoble est l’un des principaux éléments de gestion de la flavescence dorée. La Bourgogne, qui est souvent prise en exemple pour la bonne gestion de la maladie (voir encadré), a justement fait de la prospection un cheval de bataille. L’intégralité du vignoble est prospectée tous les ans. L’apparition de nouveaux foyers en 2018, corrélée à la diminution de l’implication de certains domaines depuis quelques années, conforte la position des services sanitaires régionaux. Dès 2019, la prospection sera obligatoire dans cette région, et la facture du prestataire envoyée aux récalcitrants.
Gérer les plants infectés
L’arrachage d’un plant contaminé est une obligation réglementaire. L’idéal est d’arracher une vigne infectée au plus tôt une fois la contamination avérée, entre mai et août si cela est possible. Si jamais le déracinement n’est pas possible à cette période, il peut être reporté après la récolte, en prenant soin toutefois de couper le cep ou ses parties arborant les symptômes. Il est important de bien extraire la partie porte-greffe pour éviter tout rejet. Car les vignes américaines sont porteurs-sains, et risqueraient de continuer à transmettre le phytoplasme sans que l’on s’en rende compte. De même, il est conseillé d’assainir les bords du vignoble en supprimant les vignes sauvages. Cette opération de nettoyage doit être faite en hiver, en pensant à enlever et brûler les débris pour éliminer les potentiels œufs de cicadelle. Les vignes sauvages américaines ne doivent pas être détruites en été, au risque que les adultes présents migrent vers les vignes cultivées.
Une stratégie collective régionale payante
La Bourgogne est l’une des rares régions où l’épidémie de flavescence dorée est maîtrisée, voire en régression sur la période de 2012 à 2015. La lutte dans ce bassin repose sur quatre piliers : l’arrachage des souches contaminées et la lutte insecticide contre la cicadelle comme dans toutes les régions de France, mais aussi et surtout sur une surveillance systématique du vignoble pour la détection des ceps exprimant les symptômes, ainsi que la plantation de plants traités à l’eau chaude. Par ailleurs, un arrêté a également été pris pour rendre obligatoire l’arrachage de pieds atteints par le bois noir, maladie aux symptômes similaires à la flavescence. « Notre force majeure est aussi d’avoir une bonne synergie entre les organisations professionnelles, les Fredon, le Sral et les viticulteurs, explique le service sanitaire bourguignon. La réussite passe par une stratégie de lutte coconstruite, des positions et discours cohérents, une forte implication des organisations professionnelles viticoles et la bonne connaissance de la situation sanitaire des vignobles. »
Une machine pour aspirer les cicadelles
Lancé en 2018 pour quatre ans, le projet Vacuum Bug est développé par la chambre régionale d’agriculture avec les chambres du Vaucluse et des Bouches-du-Rhône, l’Irstea, la Fredon, le Grab, l’Itab, l’Inra, l’IFV et le CNRS. Il est financé sur des fonds Feader. Le cœur du projet est la création d’une machine capable d’aspirer les cicadelles afin d’éviter l’emploi d’insecticides. Le temps d’expérimentation est calé chaque année sur les 4 mois du cycle de vie de la cicadelle. Un premier volet du projet étudiant la possibilité de propagation de la cicadelle par son transport sur les machines viticoles a été mené en 2018. Le protocole de test a été déployé sur des actions d’écimages. Des mesures ont été faites sur l’écimeuse à l’aide d’un souffleur de feuille inversé en début de travail, en fin de parcelle et après un transport.
Le projet va étudier l’impact des machines à vendanger
« Les résultats ont amené à préconiser d’éliminer les traces de feuilles avant de rouler et changer de parcelle pour éliminer la probabilité de transporter des cicadelles », explique Ana Chavarri, conseillère viticole-œnologue à la chambre d’agriculture des Bouches-du-Rhône et l’une des animatrices du projet. L’étude de l’impact du transport est à nouveau envisagée cette année avec la mise au point d’un protocole de test pour une machine à vendanger.
En parallèle, la mise au point d’un « aspirateur » est lancée. La première étape est le cahier des charges. Il est en cours de rédaction. Le prototype développé par l’Irstea pourrait être mis sur le terrain en 2020. Les expérimentations d’usage de la machine se doubleront d’un volet sur la mesure de la biodiversité pour évaluer l’impact de l’appareil sur la biodiversité à la vigne. À ce stade, « on ne sait pas si c’est l’aspiration qui va convenir le mieux. On s’est rendu compte qu’elle demandait beaucoup de puissance et provoquait des nuisances sonores et générait beaucoup de contraintes techniques à résoudre », souligne Ana Chavarri.