Financement viticole : « Le club deal n’implique aucun remboursement pendant la durée de l’investissement »
Maxime Debure, fondateur de la plateforme WineFunding, explique les atouts du financement par un club d’investisseurs, une possibilité méconnue du financement participatif.
Maxime Debure, fondateur de la plateforme WineFunding, explique les atouts du financement par un club d’investisseurs, une possibilité méconnue du financement participatif.
En quoi consiste le financement par un club d’investisseurs ?
Nous l’appelons « club deal » car une poignée d’investisseurs va se regrouper pour investir dans un projet précis. Ils investissent pour une durée déterminée via la constitution ou la prise de participation dans une SAS et la signature d’un pacte d’associés. C’est comme un mariage avec un divorce fixé à l’avance. À l’issue de la période fixée, ils seront remboursés via le rachat des parts, opéré par le vigneron qui aura récupéré sa capacité d’emprunt ou dégagé des revenus grâce à la réalisation du projet. À la différence du crowdfunding ou financement participatif avec capital proposé en ligne, qui rassemble habituellement plusieurs dizaines d’investisseurs avec quelques milliers ou dizaine de milliers d’euros chacun, le nombre d’associés dans un club deal se limite à 2 ou 3 et jusqu’à 6 à 7. Ils investissent quelques centaines de milliers d’euros chacun, sans passer par la plateforme internet.
À quel genre de projets s’applique ce financement ?
Il s’agit de financer des projets stratégiques et structurants. Ils sont conçus par des entreprises en croissance, mais qui ne peuvent ou ne souhaitent pas s’endetter davantage ou ne peuvent rembourser rapidement. Nous avons monté une dizaine de ce type de projets pour des montants pouvant aller de 500 000 euros à 7 millions d’euros.
Il peut s’agir par exemple de la restructuration de vignes, du déploiement d’une activité de négoce, de la construction d’un chai, ou même du financement d’un besoin en fonds de roulement.
Quels sont les points clés pour le montage d’un dossier ?
La valorisation est souvent un point de blocage, lorsque le vigneron n’accepte pas de voir son bien moins valorisé que ce qu’il imaginait. Cela conditionne la valeur des parts à l’entrée et à la sortie. L’autre point, c’est justement cette sortie, c’est-à-dire le moment auquel le vigneron devra racheter les actions des investisseurs. La durée est en général de cinq à sept ans, parfois jusqu’à dix ans. Nous cherchons toujours un équilibre « gagnant-gagnant » et nous faisons beaucoup de pédagogie. Le remboursement peut parfois être anticipé. C’est arrivé en 2023 avec un domaine bourguignon qui a racheté les parts avec un an et demi d’avance. Mais au-delà des aspects juridiques et financiers, la rencontre est la clé. Les investisseurs ne vont pas être sur le dos du vigneron mais il faut que ça matche. C’est une aventure humaine et entrepreneuriale.
Combien coûte le recours à un club d’investisseurs ?
Ce n’est pas comparable à un prêt bancaire que l’on doit rembourser. Là il s’agit d’un apport en capital qui n’implique aucun remboursement ou versement d’intérêts pendant la durée de l’investissement. Il faut ensuite pouvoir racheter les parts, qui auront pris de la valeur. Il y a aussi des frais. D’abord des frais d’étude et de montage du dossier qui peuvent aller de moins de 10 000 euros à plus de 30 000 selon la taille et la complexité. Certains projets vont en effet nécessiter une restructuration préalable de l’entreprise pour préparer la levée de fonds. Il faut parfois changer de statut, la SAS étant la structure adaptée. Ces frais peuvent être couverts par la levée de fonds. Nous prélevons aussi une commission de 5 à 8 % sur le succès de la levée de fonds.
Qui sont les investisseurs attirés par ce dispositif ?
Ce sont souvent des chefs d’entreprise ayant vendu leur affaire pour prendre leur retraite et qui ont envie de rester dans une démarche entrepreneuriale, ou des investisseurs patrimoniaux passionnés de vin. Ils ne se connaissent pas forcément au départ. Nous constituons un comité de pilotage et présidons le conseil de surveillance. Nous réunissons le club d’associés au moins une fois par an, parfois plus pour certains projets. Souvent les investisseurs achètent du vin et parlent du domaine autour d’eux, ils peuvent apporter des contacts pour la commercialisation.
Comment sélectionnez-vous les projets ?
Notre rôle est de juger du potentiel et de l’attractivité du projet. On va étudier le business plan à la lumière de notre connaissance du monde du vin pour voir s’il est réaliste, quelles sont les perspectives de développement, les marchés, les actifs, le positionnement des produits. Nous pouvons faire appel à des experts sur certains points. Nous présentons ces projets directement à nos réseaux d’investisseurs en cercle privé.