Quels sont les principaux dossiers que vous allez porter à l’interprofession ces prochains mois ?
Philippe Bizien - Le sujet le plus préoccupant du moment est la baisse de la production.
Nous en sommes déjà à près de -10 % en deux ans, et cela risque de perdurer si rien n’est fait. L’interprofession est concernée car si la production décline, c’est toute la filière qui souffre. Nous devons recréer les conditions pour que les éleveurs restructurent et développent leurs outils de production, ceci pour de multiples raisons : baisser les coûts pour être plus compétitifs, améliorer l’attractivité du métier pour inciter les jeunes à s’installer et embaucher des salariés plus facilement. Nous devons accompagner la transition écologique en construisant des bâtiments mieux isolés, en développant des énergies renouvelables. C’est également le moyen de répondre aux demandes sociétales en améliorant le bien-être animal. Nous sommes aussi très attentifs à toutes les réglementations en cours sur l’étiquetage des produits et la défense des dénominations propres à nos produits. La France compte plus de 400 recettes de charcuterie. C’est un atout indéniable qu’il faut valoriser.
Malgré les cours élevés, on ne voit pas arriver cette relance des investissements. Que faut-il faire pour que la dynamique s’enclenche ?
P. B. - Cela commence par la simplification nécessaire des dossiers administratifs et le raccourcissement des délais d’instruction et du traitement des recours. Il faut savoir qu’aujourd’hui, la majorité des dossiers déposés en France sont attaqués par des associations antiviande, quelle que soit la taille des élevages. Ces attaques découragent les porteurs de projets. Nos concitoyens doivent avoir conscience que nos exploitations sont familiales, loin des modèles développés dans la plupart des autres pays producteurs. Notre objectif est de maintenir la production afin d’assurer la souveraineté alimentaire. Mais pour cela, les éleveurs ont besoin de visibilité pour conforter et développer leurs activités à moyen et long terme.
Inaporc communique activement pour promouvoir le porc français. Pourtant, la consommation baisse. Faut-il en faire plus ?
P. B. - La relance de la consommation de viande de porc ne se fera pas que par la baisse des prix. La promotion du porc français et l’innovation sont aussi des éléments essentiels. Toute forme de communication est la bienvenue, qu’elle soit institutionnelle ou de proximité. Mais il faut s’en donner les moyens. Pour cela, tous les acteurs de la filière doivent se mettre autour de la table de l’interprofession.
Le nouveau cahier des charges adossé au porc français peut-il être un vecteur de cette relance de la consommation ?
P. B. - Les éleveurs sont prêts à répondre aux nouvelles exigences des consommateurs, mais sans se déconnecter des réalités économiques afin de maintenir un coût de production compétitif. Le cahier des charges Le Porc français va dans ce sens. Cependant, les investissements sont parfois lourds, notamment pour les petits élevages qui nécessitent d’importants travaux de restructuration. Sur cet aspect aussi, donner aux éleveurs la possibilité d’investir pour moderniser leurs outils de production est une nécessité vitale.
Vous avez récemment engagé une réflexion sur la mise en place d’une démarche RSE. En quoi consiste-t-elle ?
P. B. - L’objectif de cette démarche est de donner une projection à chaque famille de l’interprofession à l’horizon 2035. Cette projection porte sur les aspects environnementaux, sociétaux et économiques. Elle tient compte des évolutions réglementaires en cours et à venir. Elle donne à chacun une ligne conductrice et des objectifs sur dix ans. Sans anticiper les conclusions qui seront présentées à la prochaine assemblée générale en juin 2024, on peut imaginer des objectifs ambitieux en termes d’installations et de restructuration d’élevage, points cruciaux pour assurer la souveraineté alimentaire. Tous les éleveurs de porcs sont d’accord pour s’impliquer dans une démarche de progrès. Mais il faut qu’en parallèle, le gouvernement s’engage à les accompagner et à favoriser les investissements nécessaires.
« Tous les acteurs de la filière doivent se mettre autour de la table de l’interprofession.