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Un jour avec
Un jour avec Simon Garnier et Sébastien Dubreuil, manucures des brebis

Pour couper les onglons des chèvres ou des brebis, les deux pareurs charentais interviennent, seuls ou à deux, dans la moitié Ouest de la France. Au compteur : 50 000 animaux par an chacun et autant de kilomètres.

9 h 00

Simon Garnier et Sébastien Dubreuil sont pareurs d’onglons en Charente. Ils interviennent dans les troupeaux caprins et ovins lait et se déplacent dans tout l’Ouest de la France, de la Bretagne jusqu’à la frontière espagnole. Arrivés la veille dans l’Aveyron pour une semaine entière, ils vont intervenir pendant un jour et demi au Gaec des Grands Claux, à Sévérac-d’Aveyron, sur un troupeau de 950 brebis. Les deux pareurs ont chacun leur propre entreprise. Mais, depuis huit ans, ils interviennent à deux dans les grands cheptels, soit la moitié de leur temps. « Au lieu de nous tirer dans les pattes, nous préférons travailler ensemble, nous entraider et, ainsi, gagner de nouveaux clients », disent-ils. Ils parent chacun 40 000 à 50 000 animaux par an. Chacun a son propre équipement, transporté dans une remorque fermée, qu’ils déballent prestement et installent dans le couloir d’alimentation de la bergerie : cage de retournement, barrières, sécateur… Pour diminuer la pénibilité du travail, ils ont installé sur la cage un basculement hydraulique commandé par un moteur électrique qu’ils déplacent sur un diable. « Nous changeons de cage tous les quatre ans. Nous les achetons en manuel et nous mettons en hydraulique nous-mêmes. » Le retournement est actionné avec la jambe, ce qui laisse les deux mains libres.

9 h 30

Les premières brebis arrivent aux cages de retournement. Elles passent par la salle de traite rotative, le seul chemin qu’elles connaissent, attirées par un peu d’aliments. Quatre personnes sont à la tâche pour les guider vers les cages, les trois associés (Jean, Maxime et Stéphane Barascud) et le salarié qu’ils emploient pendant les mises bas. Elles sont parfois récalcitrantes. Le parage se fait tous les ans à un moment très précis, la semaine qui précède la vente des agneaux et le démarrage de la traite, le 15 mars pour stresser le moins possible les brebis. Le Gaec livre son lait (2 800 hl), la société Triballat Noyal. Ils font intervenir les deux pareurs depuis leur conversion en bio, il y a cinq ans, et le changement de laiterie et de système, avec une seule période de mise bas. « Avant, on le faisait nous-mêmes toute l’année selon les besoins, expliquent les éleveurs. Mais, depuis que nous distribuons une ration humide, les onglons poussent plus vite. Il faudra sans doute envisager de la faire deux fois par an. Une brebis qui boîte et a des difficultés à se déplacer, mange moins et produit moins de lait. »

10 h 15

Pause-café et cigarette après le premier lot. Une planche calée sur une cage pour poser les gobelets et le thermos de café. On discute du métier, on se charrie, Aveyronnais contre Charentais. « Avec Simon, on rigole bien », confie Sébastien. « J’aime bien bosser mais j’aime aussi faire la chouille », rétorque son collègue. Bref, un vrai plaisir à se retrouver pour cette opération annuelle. Les pareurs racontent comment ils ont vécu cette année si particulière. « Au premier confinement, tout s’est arrêté pendant 15 jours, puis l’activité a repris tout doucement. Habituellement, notre pic de travail se situe de mars à juin, qui concentrent 50 % de notre activité, et nous ne travaillons pas du 15 juillet au 1er septembre. Là, nous avons continué tout l’été. Avant, on savait qu’à telle période, nous allions chez untel. Tout s’est décalé. Certains ont même fait l’impasse une année. Les onglons vont être longs… » « Nous sommes peu à faire ce métier et sans doute les seuls à se déplacer sur un si large rayon, ajoutent-ils. Mais, nous sommes toujours preneurs de nouveaux clients. » Ils parcourent 40 000 à 50 000 kilomètres par an.

10 h 35

C’est reparti pour une succession de lots de 90 à 150 brebis. Trois vont s’enchaîner sans relâche tout au long de la matinée, suivi d’un petit lot de béliers viande. Les pareurs ont tombé le pull. La cadence est rapide, moins d’une minute par brebis. Les gestes s’enchaînent avec précision, comme des automatismes : ouvrir de la porte de la cage, actionner le compteur manuel des animaux qui défilent dans la cage, faire entrer la brebis et parfois la redresser quand elle se laisse tomber, enclencher la contention, retourner l’animal, prendre le sécateur et couper les onglons (presque toujours dans le même ordre), reposer le sécateur à sa place, remettre la brebis sur ses pattes, la libérer et la faire sortir. Un métier « pénible et physique », reconnaît Sébastien. Le bruit aussi et parfois un coup de pied mal placé.

13 h 00

Fin du premier acte. Quelque 350 brebis et béliers sont passés par les deux cages tout au long de la matinée, un lot de plus que prévu. « Parfois, on commence à 8 heures et on fait 400 à 500 brebis dans la matinée », affirment les pareurs. La fatigue commence à se faire sentir. « Ça fait du bien de se poser », dit Sébastien. Il est temps de faire la pause déjeuner. Les repas commandés à un restaurant sont arrivés. Chacun prend place autour de la grande table du nouveau bureau du Gaec. Une vraie salle de réunion. On réchauffe si besoin au four à micro-ondes. Le moment idéal pour poursuivre les confidences et sceller un peu plus encore l’amitié qui se construit au fil des ans. Ils racontent les 250 nuits par an qu’ils passent en dehors de leur domicile et loin de leur famille : « Nous avons des épouses conciliantes ». Le plaisir aussi de travailler « au contact des éleveurs et des animaux et de voir des façons différentes de travailler ». Les pareurs racontent leur parcours personnel. « J’ai toujours voulu travailler dans l’élevage mais n’étant pas d’origine agricole, c’était compliqué, confie Simon. Quand j’ai annoncé à mes parents que je montais une entreprise de parage d’onglons, ils ont été très surpris. J’aurais du mal à avoir un patron au-dessus de moi. » Il dévoile ses projets de création avec son épouse d’un centre équestre sur un petit domaine qu’ils viennent d’acquérir : « Je continuerai le parage, mais le but c’est de moins partir en déplacement ».

14 h 30

C’est reparti. Les lots de brebis vont se succéder tout au long de l’après-midi, autant que dans la matinée. « C’est dur de s’y remettre, concède Maxime Barascud, qui s’est levé à 4 h 30. Ce sont deux jours intenses mais, après, c’est fait et bien fait. C’est comme la tonte. » Simon Garnier facture ses prestations à 1,90 euro par brebis auquel s’ajoutent les frais de déplacements. Le tarif au kilomètre est cependant réparti sur tous les clients vus dans la semaine dans la même région.

17 h 00

Fin de la première journée. Une matinée suffira pour terminer le troupeau. Après quoi, il faudra nettoyer et désinfecter le matériel avant d’aller chez un nouvel éleveur pour cette semaine aveyronnaise. Les pareurs viennent, à deux ou seul, dans le département quatre semaines par an. Ils dorment dans leurs camions aménagés avec couchette, coin cuisine et chauffage. Le Gaec met à leur disposition la douche et le bureau/salle de repas créés récemment pour les salariés. Reste le smartphone, un précieux allié pour maintenir le lien familial.

Curriculum

Simon Garnier

Bac pro en élevage de chevaux
Formation de maréchal-ferrant et exercice du métier pendant quelque temps
Rencontre avec un pareur puis démarrage de l’activité avec le contrôle laitier
Lancement de son entreprise il y a 10 ans

Sébastien Dubreuil

Bac pro en élevage caprin
Éleveur caprin avec son père
Arrêt de l’exploitation au décès de son père
Création de son entreprise de parage il y a 8 ans

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