Nourrisseurs et abreuvoirs connectés, mode d’emploi
À Maroué, dans les Côtes-d’Armor, Jean-Charles Cantin a investi dans quatre nourrisseurs et abreuvoirs connectés en post-sevrage. Le système appelé « Pig-Insight » a été installé par la société Asserva.
À Maroué, dans les Côtes-d’Armor, Jean-Charles Cantin a investi dans quatre nourrisseurs et abreuvoirs connectés en post-sevrage. Le système appelé « Pig-Insight » a été installé par la société Asserva.
Jean-Charles Cantin est probablement le premier éleveur en France à s’équiper d’alimentateurs et d’abreuvoirs connectés. Un investissement réalisé en 2017 dans quatre cases de l’une de ses salles de post-sevrage qui en compte huit en tout. Les cases « connectées » sont occupées par 25 animaux chacune, de même que les autres cases. Les cases ayant une surface de 8,5 m², la place disponible par animal est de 0,34 m² (poids de sortie à 29 kg).
Pour identifier les porcelets qui mangent ou boivent, il faut en premier lieu les équiper d’une boucle RFID (radio-identification). En second lieu, il faut des équipements d’alimentation et d’abreuvement connectés. Les nourrisseurs se présentent sous la forme de places individuelles équipées d’un bol au fond duquel une sonde est fixée. Quand elle est découverte, cette sonde permet de savoir que le bol est vide. La largeur de l’emplacement est de 25,5 cm et sa profondeur est de 47,5 cm + 16,5 cm pour le bol nourrisseur. Derrière chaque nourrisseur, une antenne identifie l’animal qui vient manger grâce à sa boucle. Au-dessus se trouve une trémie reliée à un système d’alimentation multiphase. La trémie et les porcelets ne sont pas pesés.
Les nourrisseurs connectés fonctionnent comme un Selfifeeder, le système d’alimentation des truies gestantes développé par Asserva. Quand un animal se présente, la goulotte de la trémie s’ouvre pendant une seconde, permettant la descente d’une dose de 20 grammes dans le bol du nourrisseur. Le fond du bol est équipé d’une sonde qui déclenche l’apport d’une nouvelle dose 30 secondes après qu’elle est découverte. La quantité contenue dans la dose est un paramètre que l’on saisit dans l’ordinateur après l’avoir vérifié manuellement. Chaque trémie est remplie une fois par jour de façon à ce qu’il reste de l’aliment jusqu’au lendemain. Les abreuvoirs constitués d’un bol inox sont reliés à un compteur d’eau (débitmètre). Quand un porcelet se présente, il est détecté par une antenne d’identification située derrière l’abreuvoir. Un relevé d’eau est réalisé pour chaque animal grâce à un compteur. L’emplacement dédié donne accès à un seul animal à la fois.
Pour chaque animal, une fiche est disponible sur l’ordinateur d’interface relié aux abreuvoirs et aux nourrisseurs. Au sevrage, tous les animaux sont détectés après quatre à cinq heures de présence dans la case, parce qu’ils sont allés boire ou manger : pas besoin de saisir l’identification individuelle de chaque animal. Le nombre de porcelet par case est automatiquement calculé. « Les porcelets vont très bien au nourrisseur et à l’abreuvoir, je n’ai jamais rencontré d’animaux réfractaires ou peureux vis-à-vis du système », souligne Jean-Charles.
Dans chaque case équipée, les individus sont repérés en temps réel en train de boire ou de manger via le numéro de boucle. La fiche rapport indique également quel abreuvoir ou nourrisseur est le plus utilisé par les animaux grâce à l’affichage du pourcentage d’utilisation de chacun. Pour chaque case, on peut ensuite afficher les résultats individuels des porcelets quant à la consommation d’eau et d’aliment par jour. Des « alertes », avec des points rouges ou orange, s’affichent quand un animal n’est pas allé manger ou boire depuis 12 heures ou bien si sa consommation d’eau ou d’aliment a subi de fortes variations par rapport aux jours précédents. L’éleveur va ensuite voir dans la case les animaux concernés : « c’est pratique, l’ordinateur voit avant moi les animaux éventuellement malades. Une fois dans la case, je cherche l’animal à l’aide du lecteur de boucle. L’application sur la tablette va me dire quel est l’animal “bipé” et m’afficher sa fiche », commente l’éleveur.
On peut aussi connaître le nombre d’accès au nourrisseur par jour et le temps de présence en secondes par jour pour chaque animal. Des courbes lissées permettent également de bien voir l’évolution des consommations d’eau et d’aliment pour chaque animal dans le temps, pour éventuellement mettre en évidence des « décrochages ».
Le sevrage des 460 porcelets débute vers 8 heures pour finir à 10 heures. Trois personnes sont présentes sur cette activité : une qui pousse les porcelets de la sortie de la maternité jusqu’à la bascule et deux autres qui pèsent et prennent individuellement les animaux pour faire les deux vaccinations. Cette efficacité s’explique par la planification préalable de la répartition des porcelets dans les cases de post-sevrage. Les animaux destinés aux cases connectées sont bouclés en même temps que les vaccinations avec des boucles RFID basse fréquence, les mêmes que celles utilisées pour les truies alimentées au Selfifeeder. Le temps de travail supplémentaire est d’environ 15 minutes pour 100 porcelets. L’élevage est équipé de trois jeux de 100 boucles réutilisables. Selon Jean-Charles, « la mise des boucles ne prend pas beaucoup de temps, ce n’est pas une contrainte en soi. Par contre, ce qui l’est plus, c’est de les enlever ! Il faut compter 45 minutes pour les 100 porcelets, auxquelles il faut ajouter le temps nécessaire au retrait de la fiche mâle insérée dans la boucle, le lavage et la vérification de leur bon fonctionnement, soit environ 15 minutes ». Ainsi, en tout, le bouclage-débouclage prend environ 1 h 15 pour 100 porcelets.
Pour l’instant, l’inconvénient majeur de cet équipement est le prix élevé des boucles RFID. Mais il va certainement baisser. Le temps de travail pour mettre et enlever les boucles est aussi un frein. Il se peut également que lorsqu’un animal se couche dans ou très près de l’abreuvoir, son temps de présence soit comptabilisé, sans générer cependant d’erreur sur la consommation, puisque celle-ci est mesurée avec le compteur d’eau. Des essais sur le temps écoulé entre deux doses d’aliment distribuées sont en cours pour optimiser ce paramètre (il est actuellement de 30 secondes). Comme chaque case est équipée de deux trémies, il serait possible d’utiliser l’une d’elles pour l’aliment premier âge et l’autre pour le 2e âge. En couplage avec un système de pesée devant le nourrisseur, chaque porcelet recevrait une alimentation adaptée à son poids. Des mesures sont en cours pour évaluer d’autres impacts de ce type d’équipement, notamment la prévention sanitaire. L’étude comportementale des animaux permettrait une meilleure anticipation de la survenue d’éventuelles maladies : durée de présence à l’abreuvoir, au nourrisseur, horaires d’alimentation…
estelle.kerguillec@bretagne.chambagri.fr« Une mine d’informations »
« J’ai réalisé quelques comparatifs entre les cases connectées et les quatre autres cases de la même salle : les données montrent des résultats similaires tant en termes de GMQ, d’IC que de taux de pertes. Par contre, l’outil est précieux pour connaître au jour le jour les données individuelles et de groupes, ce qui facilite mon suivi au quotidien : c’est une réelle mine d’informations. »