Témoignage
La FCO-8 ravage les élevages ovins du Puy-de-Dôme
Samuel Sion, éleveur ovin dans le Puy-de-Dôme, a perdu 10 % de son cheptel en trois semaines, des suites de la FCO‑8.
Samuel Sion, éleveur ovin dans le Puy-de-Dôme, a perdu 10 % de son cheptel en trois semaines, des suites de la FCO‑8.
Au sein de la coopérative ovine Copagno, qui compte près de 240 éleveurs adhérents répartis sur trois départements (43, 63, 15), le nombre de brebis mortes des suites de la fièvre catarrhale ovine de sérotype 8 (FCO-8) s'élevait à plus de 1 000 le 29 août dernier. « Les exploitations de la chaîne des Dômes sont particulièrement touchées, avec en moyenne 10 à 15 décès par troupeau de 300 brebis. On décompte pour le moment plus de 500 brebis mortes en Haute-Loire, 300 dans le Puy-de-Dôme et 200 dans le Cantal » détaille Thomas Chazalette, technicien de la coopérative. « C'est difficile d’estimer le nombre exact de morts car nous ne disposons que des données issues des résultats d'analyses. L’équarrissage n’a pas donné de chiffre pour le moment ».
Entre 2 et 20 % des effectifs finissent par mourir » - Thierry Orcières, président de Copagno.
Lorsqu'un cheptel ovin est touché, « entre 2 et 20 % des effectifs finissent par mourir » rapporte Thierry Orcières, président de Copagno. « 20 %, cela reste exceptionnel. Le plus souvent, on compte entre 5 et 10 % de mortalité » nuance-t-il. Une mortalité élevée, due à une mutation de la FCO-8 qui la rend plus virulente cette année, à des conditions météorologiques idéales pour le développement des culicoïdes (moucherons piqueurs vecteurs de la maladie) et à l'absence d'immunité dans les élevages. En effet, le coût des doses de vaccins, entièrement à la charge des éleveurs, a dissuadé la plupart d'entre eux de vacciner leur troupeau en amont de la période estivale. Comme de nombreux autres éleveurs, Samuel Sion, adhérent à la coopérative, se retrouve lourdement impacté par la FCO-8.
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« 10 % de nos bêtes sont mortes »
Éleveur ovin et bovin à Égliseneuve-près-Billom (Puy-de-Dôme), Samuel Sion nous reçoit sur son exploitation lundi 1er septembre. À notre arrivée, un troupeau de brebis traite Lacaunes avance en file indienne vers son bâtiment. En queue de peloton, trois d'entre elles clopinent péniblement. Enflées, yeux mi-clos, nez coulant et irrité : elles ne sont pas belles à voir. « Ce sont les trois dernières à être tombées malades » explique l'éleveur. Pas question pour les infectées de rentrer avec les autres. Samuel et son associé Dominique les embarquent dans une camionnette pour les isoler au "mouroir", où les attendent une quarantaine d'autres malades. En trois semaines, le Gaec a perdu plus de 80 têtes, sur 870 brebis en début d'année, soit près de 10 % des effectifs. « Elles meurent en 2 à 3 jours, les plus résistantes au bout de cinq jours» rapporte Samuel Sion.
Notre bac à équarrissage est toujours plein. Lors de leur dernier passage, une quinzaine de cadavres attendait d'être retirée. » - Samuel Sion, éleveur ovin.
Difficile de suivre le rythme pour l'équarrissage qui passe pourtant tous les trois jours. « Notre bac est toujours plein. Lors de leur dernier passage, une quinzaine de cadavres attendait d'être retirée. » Une vision d'autant plus triste qu'avec la chaleur, l'odeur des corps diffuse dans l'air. Fin septembre 2023, « nous étions la seule exploitation touchée par la FCO-8 dans le secteur. Nous avions perdu 50 ovins. Cette année, tous les élevages de la commune (trois Ndlr) sont infectés ». Au-delà d'être plus mortelle, la maladie a donc gagné du terrain. Côté agnelage, « nous avons constaté 5 ou 6 avortements. Après la mise bas, certaines brebis sont tombées malades. Pas de perte chez les petits, qui semblent plus résistants ». Bien qu'impacté sanitairement, le Gaec créé en 2003 devrait pouvoir se relever financièrement de cet épisode. « C'est plus inquiétant pour les jeunes installés qui n'ont aucune trésorerie » souligne Samuel Sion. Par ailleurs, cela risque de compliquer la recherche de successeurs pour reprendre la ferme des associés.
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Isolation et vaccination
Il y a trois jours, nous avons vacciné 200 agnelles contre la FCO-8 avec des doses de Syvazul BTV. 39 jours sont nécessaires avant que les vaccinées soient immunisées » - Samuel Sion, éleveur ovin.
Dès la détection des premiers signes cliniques, « nous avons rentré les brebis viande ainsi que les agnelles laitières en catastrophe ». Une stratégie qui semble payante, puisque la FCO-8 ne sévit plus dans ces deux groupes. Pour le troupeau de laitières, c'est une autre histoire : « nous devons les laisser pâturer encore jusqu'à la fin de la semaine. Pour limiter la casse, nous les avons désinsectisées. » D'ici là, les éleveurs font le dos rond. « Il y a trois jours, nous avons vacciné 200 agnelles contre la FCO-8 avec des doses de Syvazul BTV. 39 jours sont nécessaires avant que les vaccinées soient immunisées » rapporte Samuel Sion. Une attente d'autant plus longue que ce vaccin (il en existe deux autres sur le marché français) ne serait pas efficace à 100 %, comme semble le démontrer l'expérience de Thierry Orcières. Malgré une vaccination complète de son troupeau au printemps avec le Syvazul, le président de Copagno a en effet subi des dizaines de pertes au sein de son élevage. Toutefois, le vaccin Syvazul est peu onéreux (environ deux euros) et ne demande qu'une injection, contre deux dans le cas du vaccin BTV PUR. La semaine dernière, Copagno en livrait 9 000 doses à ses adhérents. « À cause de la pénurie des vaccins, 4 000 ne pourront pas être livrés » ajoute Thomas Chazalette, technicien de la coopérative. Pour rappel, de nouvelles doses devraient être disponibles à partir d'octobre.
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