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Vrai-faux sur la mégabassine de Sainte-Soline, selon la Chambre d’Agriculture des Deux-Sèvres

Retour sur la mobilisation contre la réserve de substitution des Deux-Sèvres et les messages véhiculés par les opposants au projet avec le décryptage de la Chambre d’agriculture des Deux-Sèvres.

Manifestation à Sainte-Soline
Malgré l’interdiction de la manifestation par la préfecture des Deux-Sèvres, samedi 29 octobre 2022 4 000 personnes selon les autorités, 7 000 selon les organisateurs, le collectif « Bassines, non merci », se sont réunies à Sainte-Soline pour protester contre la réserve d'eau en construction, l'une des 16 prévues dans les Deux-Sèvres.
© Les Soulèvements de la Terre

Malgré l’interdiction de la manifestation par la préfecture des Deux-Sèvres, samedi 29 octobre 2022 4 000 personnes selon les autorités, 7 000 selon les organisateurs, le collectif « Bassines, non merci », sont réunies à Sainte-Soline pour protester contre la réserve d'eau en construction, l'une des 16 prévues dans les Deux-Sèvres.


Rappel des faits

Une manifestation, ayant mobilisé 1500 gendarmes, et durant laquelle 61 gendarmes et 30 manifestants ont été blessés, intervenue quelques jours après le coup d’envoi du chantier de la deuxième retenue d’eau sur le bassin de la Sèvre Niortaise Marais Poitevin à Sainte-Soline (baptisée SEV15).

Portée par la coopérative la Coop de l’eau 79, après celle de Mauzé-sur-le-Mignon, cette réserve d’une capacité de 627 868 m3 bénéficiera à 12 exploitations agricoles. « Sont principalement concernées des exploitations en polyculture élevage ovin, caprin, bovin allaitant et laitier, volailles et canards, représentant au total une vingtaine d’emplois directs, dont quatre jeunes installés » selon la coopérative.

 

Après deux jours de mobilisation, les opposants aux projets ont installé des tours en bois sur un terrain privé prêté jusque mi-mai par un agriculteur opposé au projet pour surveiller les travaux. « On a bien l'intention d'en faire l'usage. Ce sera le point de départ de tout un tas d'actions de harcèlement qui vont être menées si les travaux venaient à continuer », a déclaré Julien Le Guet, porte-parole du collectif, à l’AFP, qui attend l’annonce par le gouvernement « d’un moratoire » sur le projet. Alors que le 30 octobre au, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin avait annoncé le maintien de « plus de 1000 gendarmes » dans la zone, « autant qu'il faudra », pour empêcher « qu'aucune ZAD ne s'installe ».


Derrière le terme de mégabassine, des réserves de substitution

Le projet de la Coop de l’eau 79 consiste à créer des réserves de substitution encore appelées retenues d’eau. Le principe : la réserve est creusée dans le sol, surélevée par la création d’une digue de quelques mètres de hauteur et étanchéifiée par une membrane géotextile ; son remplissage se fait par pompage dans le milieu naturel (nappes et rivières) pendant l’hiver (du 1er novembre au 31 mars) pour permettre l’irrigation des cultures en été. « Les prélèvements hivernaux se substituent à des pompages qui se faisaient auparavant en période d’étiage (printemps, été) » souligne la Coop de l’eau 79.

Face aux messages véhiculés par les opposants qui accusent une poignée d’agriculteurs d’accaparer l’eau avec les projets de « mégabassines », la Chambre d’Agriculture des Deux-Sèvres répond sur son site internet dans une foire aux questions.

 


« Le projet de réserves d’eau concerne une minorité d’irrigants »

Faux ! répond la Chambre d’agriculture des Deux-Sèvres, selon qui le projet (des 16 retenues et non seulement de celle de Sainte-Soline, ndlr) concerne 230 exploitations soit 435 agriculteurs (sur les 847 agriculteurs des 62 communes du bassin Sèvre-Mignon) et 140 salariés. 55% des exploitations sont des éleveurs


« Les réserves d’eau vont surtout servir à irriguer le maïs »

Faux ! répond la Chambre d’agriculture des Deux-Sèvres. Actuellement l’irrigation du maïs concerne une « grosse moitié de l’eau d’irrigation (pour un tiers des surfaces) », affirme-t-elle. Certes le maïs grain représentait plus de 80% des surfaces irriguées dans la zone au début des années 2000 mais en Deux-Sèvres et dans les départements de l’ex-Poitou Charentes, les surfaces de maïs irrigué (grain et ensilage) ont été divisées par deux depuis 10 ans et par presque trois depuis 20 ans, selon la Chambre d’Agriculture.

Sur le bassin Sèvre-Mignon, le maïs irrigué a été remplacé par des céréales d’hiver arrosées au printemps, mais aussi par des cultures permettant de dégager un meilleur revenu avec moins d’eau : protéines végétales, semences, vergers, maraîchage. « Le maïs ensilage et les prairies irriguées (luzerne, méteils…) permettent l’autonomie fourragère des polyculteurs-éleveurs, qui représentent presque la moitié des irrigants », souligne encore la chambre d’Agriculture.


« Les bassines vont assécher les nappes et les rivières »

Faux ! répond la Chambre d’agriculture des Deux-Sèvres. Selon les modélisations du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) de juin 2022, les réserves auraient un effet positif en printemps et en été, de l’ordre de +6% sur le gain de débit en sortie de bassin pour le mois de juillet. Sur certains cours d’eau, comme celui du Mignon, une augmentation de débit de l’ordre de 40% pourrait être atteinte par rapport au débit observé entre 2000 et 2011. En hiver, le BRGM estime que la perte de débit en sortie de bassin pourrait être de -1%.

Sur les zones humides, et notamment le Marais poitevin, le BRGM estime que les débits entrants dans le Marais par le réseau hydrographique superficiel seraient améliorés en printemps/été de 6% et dégradés en hiver de 1%.

Sur les nappes, « l’étude d’impact a démontré des gains de niveau de nappe pouvant aller jusqu’à 4 mètres » souligne la Chambre d’agriculture des Deux-Sèvres.

« L’eau des bassines à ciel ouvert va s’évaporer »

Vrai ! Mais « les valeurs maximales d’évaporation constatées à ce jour de l’évaporation sur les réserves de substitution sont de l’ordre de 3 à 4% du volume stocké. La pluviométrie compense largement l’évaporation », assure la Chambre d’Agriculture des
Deux-Sèvres.
 

Une chronique sur LCI très appréciée par les agriculteurs

Ces arguments ont été repris par le chroniqueur Pascal Perri sur LCI dans l’émission 24h Pujadas le 31 octobre. Une chronique appréciée et largement relayée par les agriculteurs sur les réseaux sociaux.


Des projets d’entreprises du territoire dépendent de la construction des bassines

Sans ce projet de Coop de l’eau 79, « l’existence de la Coopérative laitière de la Sèvre (Echiré et Celles sur Belle) serait compromise », affirme la Chambre d’agriculture des Deux-Sèvres. « Le semencier Delplanque mise aussi sur l’irrigation pour prendre des marchés en plein essor, comme les semences potagères bio », poursuit-elle. Le fabricant d’aliment du bétail Alicoop démarche aussi les irrigants du bassin pour cultiver 10 000 hectares de soja non-OGM pour les filières locales.
 

Ces retenues d’eau sont un non-sens pour la Confédération paysanne

Des arguments qui sont loin de convaincre la Confédération paysanne pour qui « cette idée de retenues d’eau est un non-sens ». Le syndicat minoritaire agricole cite Christiane Amblard, spécialiste de l’eau et des systèmes hydrobiologiques, selon qui « lorsqu’on stocke l’eau de manière artificielle, on assèche les sols et brise la continuité écologique » et qui promeut l’idée selon laquelle « pour avoir une bonne gestion de la ressource en eau, il faut tout faire pour qu’elle s’infiltre dans le sol ».

Même point de vue pour Emma Haziza, docteure de l’Ecole des Mines de Paris, qui, selon la Confédération paysanne, « se dit favorable aux petites retenues collinaires qui récupèrent les eaux de pluie par ruissellement, mais opposée au captage dans les nappes, un modèle californien de la gestion de l’eau qui ne profite qu’à quelques-uns ».

« Aujourd'hui, au vu du dérèglement climatique et de son accélération, au vu de l'état des nappes, on se rend compte que la solution des méga bassines est une solution de court terme, très égoïste puisqu'elle ne sert qu'une minorité. Et si on se tourne vers d'autres pays européens, l'Espagne, qui s'est beaucoup lancée dans ce type de stockage d'eau il y a quelques années, se retrouve aujourd'hui dans l'impossibilité de les remplir vu les sécheresses à répétition. Ne refaisons pas les mêmes erreurs », a ainsi déclaré Nicolas Girod, porte-parole national de la Confédération paysanne, le 31 octobre sur France inter.

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