Le savoir-faire des éleveurs de porcs d’Evel’Up ayant le meilleur index santé
Evel’Up a enquêté les pratiques des exploitations dont l’Index de santé est le plus élevé. Il souligne l’importance de la cohérence de la conduite en bandes.
Evel’Up a enquêté les pratiques des exploitations dont l’Index de santé est le plus élevé. Il souligne l’importance de la cohérence de la conduite en bandes.
Conduite en bande stricte en maternité et en post-sevrage, limitation des adoptions, qualité des porcelets au sevrage, respect des fondamentaux notamment sur les chargements en post-sevrage et engraissement… : telles sont les principaux facteurs d’amélioration qui ressortent de l’enquête réalisée par Evel’Up auprès des élevages ayant le meilleur Index Santé et présentée lors du forum annuel organisé en décembre à Carhaix. L’Index santé est un indicateur synthétique qui vise à quantifier le niveau de santé de l’élevage, à suivre son évolution dans le temps et à démontrer l’intérêt d’un changement de pratiques, en se basant sur des données chiffrées objectives. Défini par les équipes techniques d’Evel’Up, il attribue une note sur 20, calculée en fonction de cinq critères de GTE, chacun se voyant attribuer le même poids : l’indice de consommation global, le GMQ 8-115 kg, le taux de pertes sevrage-vente, le taux de saisies et les dépenses de santé par 100 kilos de carcasse. L’enquête a porté sur une sélection de 44 élevages, dont l’index Santé était supérieur à 16 et stable sur les trois dernières années. Par comparaison, la moyenne des élevages Evel’Up était de 12 en 2018.
Une conduite en bande stricte en maternité
Mélanie Ropars, du service R & D, a caractérisé les élevages ayant le meilleur index. Plus de la moitié d’entre eux ont une taille comprise entre 100 et 200 truies. La taille moyenne des bandes est de 33 truies (variant de 12 à 95 truies par bande). « La majorité des éleveurs ont des conduites en 4, 5 ou 7 bandes, permettant des écarts de temps élevés entre bandes. » La part des élevages en conduite 7 bandes est cependant plus importante que pour l’ensemble des élevages en GTE (58 % contre 45 %). Le sevrage est réparti équitablement entre 21 et 28 jours. L’âge au sevrage n’est donc pas un facteur différenciant.
Concernant la gestion des cochettes, 9 élevages sur 10 pratiquent une quarantaine longue de plus de 9 semaines, pour favoriser leur adaptation et la stabilité sanitaire de l’élevage.
En verraterie-gestante, ils s’astreignent à une conduite stricte pour avoir peu de variabilité de l’effectif de truies d’une bande à l’autre. « 81 % d’entre eux déclarent avoir moins d’une bande sur 10 avec un nombre de truies à la mise bas supérieur à 10 % de l’objectif. » En cas de surplus et pour limiter la variabilité, ils réforment des truies pleines juste après l’échographie.
En maternité, ils disposent en moyenne de 7 % de places tampons, ce qui donne un peu de souplesse pour la gestion de la variabilité de la taille de bande et des adoptions (plus de la moitié d’entre eux sont équipés d’une salle tampon). « 75 % des élevages ne font jamais de sevrage précoce. Ceux qui le pratiquent le font sur 5 % des porcelets tout au plus. Enfin, le redoublement des porcelets (décalage sur la bande suivante) est très peu pratiqué. 91 % des élevages ont une conduite en bande stricte. »
Respect des normes de chargement en post-sevrage et en engraissement
Ce souci de cohérence et de régularité entre bandes se poursuit après le sevrage. À l’arrivée en post-sevrage, le mélange des portées est réduit grâce à des tailles de cases limitées (moins de 22 porcs dans 36 % des élevages, de 23 à 30 pour 50 % des élevages). 82 % des élevages regroupent 2 à 3 portées par case de post-sevrage. Les porcelets sont d’abord triés en fonction du rang de portée des truies, puis du poids au sevrage. À noter que deux tiers des élevages pèsent tous les porcelets au sevrage. Les petits sont isolés dans une même case. 9 élevages sur 10 ne font aucun mélange de bandes en post-sevrage.
Concernant la densité, 60 % des élevages présentent des normes optimales du sevrage jusqu’à la vente. « 80 % ne surchargent jamais les cases et utilisent des alternatives en case de surplus d’effectifs (vente de laitons, salle tampon…). » Enfin, 90 % des éleveurs éliminent les non-valeurs économiques au sevrage et en fin de post-sevrage.
« Les éleveurs au meilleur index ont de meilleures performances techniques en post-sevrage (-0,03 d’IC 8-30kg, -1,3 % de pertes en PS) mais aussi en engraissement (-0,1 d’IC 30-115, -1,2 % de pertes), correspondant à un écart théorique de marge par truie de 30 euros et 81 euros respectivement », calcule Hervé Pelleau, responsable du service technico-commercial et nutrition Evel’Up. « Si l’on additionne les deux marges, on arrive à 5 centimes d’écart sur le prix de revient. » C’est la preuve, s’il fallait le démontrer, que l’amélioration de la santé est source de gain économique en plus des intérêts sur la démédication et le bien-être animal, et qu’elle joue à tous les stades de production.
Un tableau Excel pour mieux planifier les salles
L’EARL de Kerrogard (230 truies naisseur engraisseur) à Evellys, dans le Morbihan, a entièrement remis à plat la cohérence de son parc de bâtiments de post-sevrage et d’engraissement, réparti sur deux sites (conduite en 5 bandes, sevrage à 21 jours). L’objectif était d’enrayer la baisse des performances techniques liées à un statut sanitaire complexe, entraînant des mélanges de bandes et des dépenses de santé élevées. « Dans un premier temps, nous avons remis en service une nurserie dans laquelle les porcelets les plus petits au sevrage sont élevés pendant 28 jours, avant d’arriver en post-sevrage », explique Romain Lamour, l’un des associés de l’élevage. « Cela a permis d’augmenter leur poids d’entrée en engraissement (32 kg à 103 jours maximum) et d’arrêter les dédoublements en début d’engraissement et les mélanges de bandes. » En parallèle, un planning de rotation des salles a été construit avec l’encadrement technique pour avoir une rotation plus rationnelle avec une seule bande par salle, sachant que l’élevage compte quatre modules d’engraissement avec des tailles de salle différentes. « Nous nous sommes basés sur le facteur limitant de l’élevage, qui est le nombre de places en engraissement », précise Thierry Boulet, d’Evel’Up. Ce nombre a été recalculé avec un chargement à 0,7 m2 par porc, qui donne un peu de souplesse. Les salles ont été couplées pour avoir des modules d’engraissement plus équilibrés. « L’outil de planification sous forme de tableau Excel nous donne une vision par bande de l’IA jusqu’à l’abattage des cochons, constate l’éleveur. Il permet de connaître bien en amont la destination des porcs par salle, le nombre maximum à entrer en post-sevrage et en engraissement, de mises bas nécessaires, de truies à garder après échographie… et de mieux anticiper les dates de transfert. » Après six mois de recul, le premier tri des porcs est désormais facilité. Le niveau sanitaire s’est largement amélioré, notamment en post-sevrage. Le taux de pertes sevrage-vente a été réduit de 4,4 % (passant de 13,6 à 9,2 % entre avril et octobre 2019) avec l’objectif d’atteindre 7 % d’ici deux mois.
Refonte totale de la biosécurité pour produire sans antibiotiques
Le Gaec de Kerbohec (380 truies NE) à Baud, dans le Morbihan, s’était donné comme objectif en 2014 de réduire la pression infectieuse et l’usage d’antibiotiques notamment en post-sevrage. Il a mis en place une démarche d’amélioration progressive qui s’est faite sur le long terme et par étapes et qui a fini par porter ses fruits. « Nous avons pu intégrer un cahier des charges zéro antibiotique dès 2018, explique Arnaud Lidurin. Nos dépenses de santé ont diminué à 4,85 euros pour 100 kilos de carcasse en 2019 tandis que la productivité s’est améliorée. Le SDRP est maîtrisé. Les dernières sérologies montrent que l’ensemble des animaux est devenu SDRP négatif. » Les différents changements opérés au cours des cinq années avaient pour objectif d’améliorer la marche en avant et la biosécurité interne et externe : allotement par rang de portée en post-sevrage, allongement de la durée de quarantaine de 6 à 10 semaines et déplacement du bâtiment équipé d’un quai spécifique, ajout d’un sas d’entrée principal et de sas intermédiaires pour les blocs maternité et sevrage-engraissement, lavage et désinfection des couloirs après chaque transfert, construction d’un engraissement et réorganisation des sens de circulation des porcs en entrée en post-sevrage et en engraissement (plus de couloirs communs), création de deux infirmeries, diminution de la densité de 0,3 à 0,35 m2/porcelet en post-sevrage et de 0,65 à 0,75 m2/porc en engraissement.
Un audit biosécurité pour cibler les actions prioritaires
Le Gaec Élevage Damany à Langoat, dans les Côtes-d’Armor, a réalisé un audit biosécurité fin 2017, en amont d’un projet de restructuration de son élevage de 450 truies naisseur engraisseur (reprise d’un site voisin pour le transformer en engraissement, contexte sanitaire SDRP difficile avec des signes cliniques sur les truies). Réalisé avec l’outil Porcprotect de l’Ifip, cet audit a permis de hiérarchiser les points d’amélioration en fonction de leur priorité et de leur facilité de mise en œuvre. « Cela permet de commencer dans le bon ordre pour voir des premiers effets positifs et ne pas se décourager, l’objectif étant de progresser graduellement en allant à son rythme », explique Anthony Damany. L’audit a permis de mettre en avant certaines dérives, de rediscuter des pratiques et d’améliorer l’observance. Il a impliqué tous les acteurs : l’ensemble des personnes travaillant sur l’élevage ainsi que l’encadrement technique et vétérinaire. L’effet des différentes actions mises en place a pu être mesuré grâce à l’index Santé passé de 12,6 en 2017 à 15,2 en 2019.
L’intérêt de la vaccination démontré
À la SCEA de la Lande, l’index Santé a bondi en l’espace de deux années de 12 à 19,2, grâce notamment à la mise en place d’un autovaccin streptocoque dans un contexte de co-infections en post-sevrage. L’élevage de 600 truies naisseur engraisseur à Pommerit-le-Vicomte, dans les Côtes-d’Armor, a subi durant 2016 des mortalités très élevées en post-sevrage (jusqu’à 12 % de pertes) avec des signes de maladie de l’œdème et d’infections à streptocoques suis. « Dans un premier temps, nous avons mis en place une vaccination contre la maladie de l’œdème et travaillé sur les facteurs de risque de la streptococcie, la maladie se déclarant lors d’un stress ou d’une baisse de l’immunité », ont expliqué Michel Le Bour et son vétérinaire Marcel Dethinne. Cela a permis de réduire les pertes en post-sevrage, mais pas suffisamment. Il a donc été décidé de compléter le programme vaccinal sur les porcelets avec un autovaccin contenant une, puis deux souches de Streptococcus. Cela a contribué à une baisse du taux de pertes au sevrage de 4 % à 1,1 % en moyenne sur l’année. Le retour sur investissement suite à la mise en place des deux vaccinations a été calculé à 2,12 euros de gain par porc pour 1 euro investi. Les dépenses de santé ont été divisées par quatre, grâce à la réduction du recours aux antibiotiques. Les index d’indice de consommation global et de GMQ 8-115 ont également tous deux progressé.