Santé : prévenir les ulcères de la caillette chez les bovins laitiers
Omniprésents en élevage bovin, les ulcères de la caillette restent difficiles à diagnostiquer. Des mesures simples permettent de limiter les risques.
« Les ulcères de la caillette touchent 32 à 76 % des veaux laitiers en bonne santé et 1 à 2,6 % des vaches adultes », soulignait Rodolphe Robcis, vétérinaire à l’école vétérinaire de Toulouse (ENVT), lors des journées nationales des groupements techniques vétérinaires. Le diagnostic est difficile, car l’affection prend de multiples formes et les causes sont multifactorielles.
Différents types sont identifiés selon la profondeur de la dépression sur la paroi, de l’érosion minime (type I) à l’ulcère hémorragique (type II), puis l’ulcère perforant à l’origine d’une péritonite locale (type III) ou d’une péritonite généralisée (type IV).
Les signes cliniques peu spécifiques des ulcères de la caillette
Les premiers signes cliniques sont peu spécifiques (anorexie, apathie, inconfort abdominal). Chez les adultes, les ulcères de type I n’ont pas de répercussions zootechniques. Ceux de type II entraînent la présence de sang dans les fèces, avec baisse de la rumination. Pour les ulcères de type III, les signes sont l’anorexie, l’apathie, la congestion de l’œil, des coliques.
Chez les veaux, l’affection est souvent silencieuse jusqu’à ce que l’ulcère devienne perforant, entraînant une péritonite dont les premiers signes sont des coliques, des anomalies de posture (dos voussé, tête basse, oreilles pendantes), un inconfort abdominal à la palpation, l’atonie ruminale, le plongement de la bouche dans l’abreuvoir sans prise de boisson.
Des examens complémentaires peuvent aider à la prise en charge, notamment la recherche de sang dans les fèces, avec beaucoup de faux positifs toutefois, ou une échographie en cas de suspicion d’ulcère perforant. « L’échographie doit s’accompagner d’une ponction du liquide abdominal, dont l’odeur putride, un pH faible, voire la présence de particules alimentaires suffisent comme diagnostic de certitude. »
Trois à huit repas par jour pour les veaux
Des mesures simples peuvent limiter le risque. Chez les veaux à l’alimentation exclusivement lactée, augmenter les prises alimentaires, de trois à huit fois par jour, permet d’éviter des pics trop importants de baisse de pH. La constance de l’aliment (lait ou aliment d’allaitement) doit aussi être de mise.
Une étude a montré que le lait entier entraîne plus de risque d’ulcère du fait d’une baisse du pH plus importante. La transition à une alimentation sèche, entre 3 et 8 semaines, doit aussi être bien maîtrisée, avec une attention portée à la qualité des fourrages, des fourrages trop grossiers comme la paille étant un facteur de risque d’apparition d’ulcères de caillette.
Attention aux carences en cuivre et sélénium
Autre point important : éviter les carences en cuivre et sélénium. Lors d’une étude (Mills et al., 1990), plus de 50 % des veaux atteints d’ulcères de caillette étaient déficitaires en cuivre et 60 % en sélénium. « Un bon apport minéral est donc conseillé », insiste le vétérinaire.
Limiter les stress, facteur de risque d’apparition d’ulcères de la caillette, est également essentiel : maîtrise de la densité des lots, des stress thermiques, des actes (écornage, castration, vaccination), interactions avec les congénères ou l’homme. Une étude montre qu’un contact humain (parole, caresse, stimulation du réflexe de succion) de 90 secondes réduit le risque d’apparition d’ulcères de caillette. Enfin, le rôle contributif d’agents infectieux, spécialement de Clostridium perfringens, étant établi, la vaccination peut aider à limiter les risques d’ulcères.
La difficile prise en charge de l’ulcère de la caillette
« Le traitement de l’ulcère de caillette vise à protéger la muqueuse, gérer les baisses du pH et prévenir d’éventuelles complications », indique Rodolphe Robcis, vétérinaire. Le phosphate d’aluminium, à l’efficacité prouvée chez le chien et l’homme, est une piste, avec de fréquentes administrations pour atteindre la caillette, située après le rumen de 100 litres.
L’apport d’oméprazole, inhibiteur de la pompe à proton, permet d’augmenter le pH de la caillette chez le veau. Autre possibilité : l’érythromycine, qui favorise la vidange de la caillette et donc l’élimination plus rapide du contenu acide. Son efficacité est prouvée chez le veau, mais elle est interdite en vache laitière. Enfin, la chirurgie est possible, mais n’est pas le traitement de choix des ulcères de la caillette.