Attractivité : quand les laiteries aident les éleveurs à partir en vacances
Les laiteries basques Etxaldia et Onetik ont constitué des groupements d’employeurs et aident financièrement une soixantaine de leurs partenaires éleveurs à se faire remplacer afin que ceux-ci puissent prendre des congés.
Les laiteries basques Etxaldia et Onetik ont constitué des groupements d’employeurs et aident financièrement une soixantaine de leurs partenaires éleveurs à se faire remplacer afin que ceux-ci puissent prendre des congés.

Pour améliorer l’attractivité laitière sur leur bassin des Pyrénées-Atlantiques, deux laiteries liées par une même gouvernance, Etxaldia et Onetik, ont mis en place en 2024 un dispositif qui aide les éleveurs à se faire remplacer pour prendre des vacances. Ce soutien pour le bien-être des éleveurs confrontés aux problèmes de main-d’œuvre, s’est inspiré de la longue expérience de la coopérative Jeune montagne dans le Massif central, qui anime des groupements d’employeurs depuis 1996 (lire ci-dessous).
Sur le plan financier, les deux fromageries basques viennent en complément du crédit d’impôt auquel ont droit les exploitants agricoles au titre des dépenses engagées pour leur remplacement pendant leurs congés, à hauteur de 60 % pendant dix-sept jours, soit 120 heures. « Nous prenons en charge les 40 % restants, durant 72 heures. Soit un coût moyen par ferme de 630 euros pour la laiterie, explique Antton Etxeberri, en charge des relations avec les producteurs pour Onetik et Etxaldia. La prise en charge s’effectue par exploitation et non par associé. Pour les associés en couple qui partent en vacances ensemble, elle s’élève à 100 heures (50 heures multipliées par deux). »
Cinq groupements d’employeurs
Pour trouver et fidéliser des salariés, le mieux est de les embaucher à temps plein toute l’année et en CDI. Les deux fromageries se sont chargées de mettre sur pied des groupements d’employeurs pour partager les salariés, « en partenariat avec un service de remplacement local qui s’occupe de l’embauche, des feuilles de paie, du remboursement de frais de transport et vestimentaires… », précise Antton Etxeberri. Cinq groupements d’employeurs, constitués chacun de six à onze éleveurs, emploient chacun un salarié. « Une ferme doit s’engager pour au moins 120 heures par an afin que le salarié ne se disperse pas sur plus d’une dizaine de fermes. » Depuis la création du premier groupement d’employeurs en mai 2024, environ 5 000 heures ont été remplacées en 2024 pour congés.
Le Gaec Mehaberria engagé pour 250 heures par an
Anthony Plantard, 38 ans, en reconversion professionnelle après un BPREA, est l’un des salariés embauchés. Depuis août 2024, il travaille dans six fermes. Jean Mollon a recours à ses services : « Avec mon frère, nous élevons 36 vaches laitières et 330 brebis à la traite. Avant, nous faisions appel au service de remplacement très ponctuellement, quand l’un de nous avait un problème de santé. Il nous arrivait de prendre une semaine de congé par an, durant la période sèche des brebis, chacun notre tour. Le dispositif de la laiterie nous a tout de suite plu, car nous avons plus de 50 ans et nous avons besoin de souffler et de profiter de davantage de temps libre. »
Les deux frères se sont engagés dans le groupement d’employeurs pour 250 heures par an minimum. « Anthony Plantard vient sur notre ferme trois à quatre jours par mois. Quand l’un de nous est absent, il épaule l’autre sur l’élevage, notamment à la traite. Comme il connaît l’exploitation, il sera tout de suite autonome quand il faudra nous remplacer sur une semaine tous les deux. »
En 2024, pour 115 heures de travail de remplacement du 1er août au 31 décembre, les éleveurs ont déboursé 2 560 euros, qui donneront droit en totalité au crédit d’impôt de 60 %. « La laiterie nous a versé 630 euros d’aide au remplacement. Nous toucherons le crédit d’impôt cet été. La première année, il y a donc une avance de trésorerie à prévoir. Au final, le remplacement ne nous aura coûté que 400 euros en 2024. »
Le saviez-vous ?
Le crédit d’impôt concerne autant l’emploi direct de salariés que le recours à des personnes mises à disposition par un tiers (service de remplacement, groupement d’employeurs, prêt de main-d’œuvre).
Priorité aux maladies ou accident
Les agriculteurs se retrouvent tous les deux mois avec Antton Etxeberri et l’animatrice du service de remplacement basco-béarnais, pour faire le bilan de la période passée et le planning à venir. « Quand nous avons besoin d’un remplacement sur une semaine pour nos congés, il faut le planifier avec les autres éleveurs du groupe », ajoute Jean Mollon.
En cas de maladie ou d’accident d’un éleveur, celui-ci est prioritaire pour avoir le salarié. Si l’arrêt de travail dure et désorganise les autres éleveurs, le service de remplacement trouve un autre salarié.
Six salariés pour remplacer les éleveurs de la coopérative laitière Jeune montagne
Jeune montagne, coopérative fromagère dans le sud du Massif central, a monté le premier groupement d’employeurs en 1996 pour le remplacement des éleveurs coopérateurs, avec une aide financière. Ce dispositif lui permet de sécuriser ses approvisionnements en lait.

Pour ce qui est du remplacement des éleveurs financé par une laiterie, la coopérative Jeune montagne, dans le sud du Massif central, a été pionnière quand en 1996 elle a créé un groupement d’employeurs avec une aide au remplacement. « Sur nos zones de moyenne montagne, il y avait à l’époque et encore aujourd’hui, un besoin important de main-d’œuvre pour permettre aux producteurs de se faire remplacer pour prendre des congés », souligne Stéphanie Girbal, de Jeune montagne.
Aujourd’hui, la coopérative compte près de 90 fermes, dont 85 % adhèrent à un groupement d’employeurs.
Des salariés formés au cahier des charges
Soixante-dix-sept exploitations membres de la coopérative sont en AOP laguiole. Leur groupement embauche cinq salariés à temps plein pour les remplacements. Douze exploitations en AOP cantal forment un groupement qui emploie un salarié à temps plein. Les salariés effectuent des remplacements pour congé, maladie ou accident. Ils doivent donc être autonomes pour gérer les troupeaux. Pour se rassurer quant au respect des cahiers des charges AOP et à la maîtrise de la qualité du lait cru, les administrateurs de chaque groupement forment les salariés à la traite et au cahier des charges.
Un salarié à 60 euros par jour
L’aide financière de la fromagerie permet à l’éleveur d’avoir un salarié pour un tarif de 60 euros par jour, contre 140 à 150 euros par jour de coût réel, durant 25 jours par an. L’aide est versée directement au groupement d’employeurs. En cas de maladie ou d’accident, l’aide court sur la durée de l’arrêt de travail. « Cela sécurise l’éleveur et la fromagerie. Les jeunes éleveurs installés témoignent souvent que cette aide, ainsi que le groupement d’employeurs avec des salariés formés au cahier des charges, les réconfortent sur la possibilité de se faire remplacer à un coût raisonnable », ajoute Stéphanie Girbal.