Mammites : « Grâce aux analyses de lait, nous avons éradiqué la source de contamination »
Dans le Cantal, le Gaec Pascal Mallet apporte un prélèvement de lait chez le vétérinaire au moindre doute de mammite. La proximité géographique entre la ferme et la clinique joue en faveur de la démarche.
Dans le Cantal, le Gaec Pascal Mallet apporte un prélèvement de lait chez le vétérinaire au moindre doute de mammite. La proximité géographique entre la ferme et la clinique joue en faveur de la démarche.
Sept minutes en voiture séparent le Gaec Pascal Mallet, à Villedieu, de la clinique vétérinaire de la Haute Auvergne. « À la moindre suspicion de mammite, nous prenons la température de la vache et effectuons un prélèvement de lait que nous apportons chez le vétérinaire », cadre Romain Pascal.
À côté de lui, Baptiste Mallet, son associé, ajoute : « J’habite sur le trajet de Saint-Flour, donc je peux rapidement et facilement le déposer sur la route du retou. » Si la manipulation n’apparaît pas contraignante, l’automatisme est pourtant récent. « Avant l’hiver 2022-2023, nous n’étions jamais trop embêtés par les mammites. Nous utilisions le même antibiotique à large spectre depuis vingt ans, ça marchait très bien », rapporte Marc Pascal, troisième associé sur quatre.
Fiche élevage
Gaec Pascal Mallet
• 4 associés
• 140 montbéliardes à 9 000 litres
• 3 AOP : cantal, fourme d’Ambert, bleu d’Auvergne
• 1 200 000 litres produits
Deux ou trois vaches au pot par semaine
Avant ce fameux hiver, les éleveurs comptaient « une mammite par mois » pour 140 vaches montbéliardes et un tank rarement au-dessus de 120 000 cellules. Mais fin 2022, ils sont confrontés à une recrudescence de mammites. « Nous mettions facilement deux ou trois vaches au pot par semaine. Nous n’étions pas habitués », relatent les associés, producteurs de lait dans trois AOP en lait cru et donc familiers de l’importance de la bactériologie. En hiver 2022-2023, la moyenne du tank grimpe à 155 000 cellules.
Ils tentent de traiter avec l'antibiotique habituel. Sans résultat. « Le premier traitement ne fonctionnait pas, nous payions les antibiotiques, nous perdions du lait et les vaches rechutaient. »
Romain Pascal et Baptiste Mallet, tous deux anciens salariés du contrôle laitier, se tournent vers les analyses bactériologiques de lait. Réaliser un échantillon aseptique de lait ne leur pose pas de souci. « Nous prenons deux minutes pour le faire correctement. » La traite, à 6 h 30 et 17 h 30, dure une heure. « Nous emmenons le prélèvement directement à la fin de la traite, qui arrive chez le vétérinaire au maximum dans l’heure qui suit, avant que le cabinet ferme. »
80 % de germes environnementaux
Trois bactéries majeures sont mises en évidence à l’issue de 54 analyses sur les douze mois, dont 80 % de germes environnementaux et 20 % de germes de traite. Les bactéries responsables de mammites étaient en majorité à Gram négatif. Les éleveurs s’attellent alors à régler le problème environnemental.
« Nous avons procédé par élimination. Nous avons changé le produit de trempage. Nous avons désinfecté les logettes avec un produit costaud pour mettre la flore à nu, puis nous avons réensemencé. » Ils s’attaquent ensuite à l’eau de l’exploitation, prélevée dans un forage. « Nous analysons l’eau tous les ans mais là, nous avons crevé les plafonds. Notre forage était pollué aux bactéries coliformes et particulier E. coli », rapporte Marc Pascal. L’eau est depuis traitée grâce à l’installation d’une pompe à chlore. « C’est une sécurité, assure Baptiste Mallet. Nous n’avons, depuis, plus de biofilm. » Tout mis bout à bout, « la pression bactérienne a baissé ».
Dans tous les cas, « les griffes sont systématiquement désinfectées à l’acide peracétique ». En décembre 2023, le Gaec Pascal Mallet a « retrouvé un tank à 56 000 cellules de moyenne. Nous n’avons eu qu’une seule mammite sur le dernier trimestre. Nous avons gagné en sérénité car nous savons que nous avons la solution pour régler le problème des mammites efficacement et rapidement. Et nous diminuons l’antibiorésistance du troupeau. C’est une démarche en accord avec les demandes sociétales ».
2 500 € économisés grâce aux traitements ciblés des mammites
« Grâce aux analyses, 40 % des vaches n’ont pas reçu d’antibiotique, car la règle était la guérison spontanée », précise Olivier Salat, vétérinaire. « L’analyse a un coût mais, quand nous soignons la vache avec le produit adapté, nous sommes gagnants économiquement et techniquement. En ciblant les traitements, nous avons économisé 2 500 € », chiffre Baptiste Mallet. À raison de 28 € par analyse, le coût annuel de la bactériologie s’élève à 650 € sur l'exploitation. En regard, le traitement systématique sans analyse d’une mammite lui coûte 150 €, contre 22 € de traitement anti-inflammatoire quand le résultat affiche bactérie simple (E. coli) ou stérile.
Alors au moindre doute, les éleveurs réalisent un prélèvement. « Si nous n’avons pas de retour trente minutes avant la traite suivante, nous appelons la clinique pour connaître au moins la famille de bactéries responsables. Si E. coli est détectée au bout de douze heures et que la vache est fiévreuse, nous appliquons un traitement anti-inflammatoire et le vétérinaire vient. Si la vache n’a pas de signe clinique, nous donnons un anti-inflammatoire et nous attendons le résultat final de l’antibiogramme pour savoir quel protocole adopter. »