Collecte laitière : le déclin s'amorce en Europe
Pour 2024, la Commission européenne estime possible une légère hausse de la collecte laitière dans l'Union européenne. Mais, à long terme, la Rabobank prédit une baisse, plus ou moins forte, dans les pays du nord de l'Europe.
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Dans son dernier rapport de prévisions, la Commission européenne estime que la production laitière européenne pourrait légèrement progresser en 2024 par rapport à 2023. « Malgré la diminution constante du cheptel de vaches laitières (-0,5 %), l'offre de lait de l'Union européenne pourrait évoluer de +0,4 % avec le jour supplémentaire de l'année bissextile. » (NDLR : si l'effet année bissextile est annulé, cette très légère hausse sera moindre).
Baisse du cheptel mais hausse du rendement laitier
Une hypothèse qui repose sur la prolongation des tendances actuelles : des prix des intrants et des prix de vente du lait et de la viande qui se stabilisent, et des conditions météo pour le pâturage et la production des aliments pour animaux qui sont plutôt favorables, en dehors de certains pays comme l'Irlande, très touchés par des pluies très abondantes en début d'année. Dans cette hypothèse, les marges des producteurs de lait européens seraient confortées, ce qui permettrait de soutenir une hausse des rendements laitiers des vaches européennes, à +0,9 %.
Si à court terme, l'augmentation de la productivité par vache permet de compenser la baisse du cheptel de vaches laitières, à plus long terme, cela ne suffira plus. Dans un rapport publié en mai, la Rabobank(1) présente deux scénarios de baisse de la collecte à l'horizon 2035.
De -13 à -20 % entre 2023 et 2035
Le rapport se focalise sur quatre pays européens, qui ont été les moteurs de la croissance laitière européenne sur la dernière décade : Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Danemark. Et qui, depuis fin 2023, montrent des signes de déclin dus aux contraintes environnementales, au manque de main-d'œuvre, une rentabilité plus faible et davantage d'aléas climatiques. « Les réglementations environnementales, notamment celles relatives à la qualité de l'eau et à la biodiversité, laissent présager un déclin accéléré du cheptel laitier, en raison de la baisse du chargement animal par hectare et de nouvelles restrictions sur l'utilisation et l'application d'engrais chimiques », pointe la banque néerlandaise.
Dans le premier scénario, la collecte baisse de 13 %, ce qui la ramènerait à son niveau des années 2010. Un second scénario envisage une chute de 20 % de la collecte, due à un renforcement des mesures d'amélioration de la qualité de l'eau et de l'air, de la biodiversité, de réduction des émissions de gaz à effet de serre et des mesures en faveur du bien-être animal.
À retenir
Sur la dernière décade, l'Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique, le Danemark, l'Irlande et la Pologne sont à l'origine de 70 % de la croissance de la collecte de lait européenne depuis 2010. Depuis fin 2023, seule la Pologne reste encore dynamique.
La demande mondiale pourrait rester faible en 2024
Le rapport de la Commission européenne souligne la faiblesse de la demande en produits laitiers, malgré quelques signaux positifs. « La consommation de produits laitiers dans l'UE pourrait bénéficier d'une légère baisse de l'inflation des denrées alimentaires et rester stable dans l'ensemble. » Le rapport rappelle la progression des exportations de l'UE en 2023, et estime qu'elles pourraient encore augmenter, pour les fromages et le lactosérum. Par contre, « il est peu probable que les exportations de poudre de lait européennes augmentent encore, en raison du potentiel de croissance limitée des pays d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient – qui avaient stimulé la croissance des exportations en 2023 – tandis que la concurrence mondiale pourrait s'intensifier ».