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Changer de laiterie : l’Oplase a trouvé la parade pour vendre à plusieurs acheteurs

Une organisation de producteurs, une société anonyme, un contrat principal avec Eurial, deux autres acheteurs et des opportunités ponctuelles : le modèle original de l’Oplase offre à ses adhérents de multiples débouchés tout en sécurisant les volumes.

Du fait de l’histoire, peu d’organisations de producteurs (OP) laitiers en France sont dites transversales, et peuvent négocier avec plusieurs acheteurs ; ou commerciales, avec transfert de propriété du lait. La majorité des OP laitières sont à l’inverse mono-acheteur et ne négocient qu’avec un unique/seul industriel qui est le premier acheteur du lait des producteurs adhérents.

Grâce à un contrat tout à fait original avec la coopérative Eurial (Agrial) qui était jusque-là son seul acheteur, l’Oplase a trouvé une parade qui lui permet de vendre du lait à trois acheteurs principaux et de saisir des opportunités pour dévier quelques citernes à bon prix : l’OP a créé une société anonyme (SA) qui est le premier acheteur du lait de ses adhérents. Elle le revend ensuite aux industriels.

« Tous les producteurs ont donné mandat à l’OP Oplase, plante Michel Rohrbach, son président. Puis l’OP a un contrat avec la SA qui est le premier acheteur de l’intégralité du lait des adhérents. » La question de la propriété du tank à lait est ensuite cruciale pour déterminer où va partir le lait en fonction des contrats qui ont été négociés avec les transformateurs.

« Historiquement, nos producteurs de l’est de la France sont propriétaires de leur tank. En Normandie, les tanks étaient loués à Eurial. Lors des discussions pour le nouveau contrat, nous avons négocié pour que les producteurs puissent racheter leurs tanks à tarif préférentiel afin qu’ils gagnent en autonomie vis-à-vis des laiteries. »

Première option : le tank appartient à Eurial qui effectue la collecte

Pour les producteurs dont le tank appartient toujours à Eurial, pas de choix possible : ils sont collectés par la coopérative (ou dans le cadre d’un échange de collecte par l’industriel qui a un accord avec Eurial). L’Oplase SA reste le premier acheteur mais a décidé de sous-traiter la collecte et la paye de lait à Eurial. « Nous avons donné mandat à la coopérative pour faire notre travail. Si Eurial s’occupe des modalités administratives, officiellement la paye vient bien d’Oplase SA qui est le premier acheteur », explique Michel Rohrbach. Les producteurs seront payés au prix Eurial, soit bassin Ouest Normandie, soit bassin Est pour les quinze producteurs situés en Haute-Marne et dans l’Yonne.

Deuxième option : un tank en propriété, une collecte Eurial et des opportunités ponctuelles

Deuxième possibilité : l’adhérent est propriétaire de son tank à lait, il est collecté par Eurial (ou accord de collecte), et c’est là que l’originalité du contrat avec la coopérative apparaît : il peut choisir de dévier du lait vers un autre acheteur ou sur le marché spot. Le contrat avec Eurial prévoit une souplesse d’approvisionnement pour 25 % du volume collectif de l’OP. Mais si l’Oplase ne trouve pas d’autres acheteurs, Eurial s’engage à acheter la totalité du lait des adhérents. « Cela a été un coup de génie pour nous », s’enthousiasme le président de l’OP.

Concrètement, un acheteur peut se manifester auprès de l’OP pour une demande ponctuelle. « Par exemple, un acheteur cherche 100 000 litres de lait local pour fabriquer des glaces. Il propose 600 euros les 1 000 litres. Je préviens les adhérents du secteur pour savoir s’ils veulent mettre du lait. Si l’on a suffisamment de lait pour fournir la demande, on organise une tournée. Nous n’avons pas d’autres contrats de long terme, c’est vraiment fonction des opportunités du marché. » Dans cette situation, la partie administrative est dupliquée. Elle est sous-traitée pour sa partie de la collecte à Eurial. L’Oplase SA gère l’autre partie.

Troisième option : dans l’Est, des tanks en propriétés et deux acheteurs privés

Une trentaine de producteurs de l’Est sont organisés sous un troisième schéma : ils fournissent du lait à deux autres acheteurs, Savencia et une laiterie belge. L’Oplase SA s’occupe alors de tout. Le camion de collecte est payé par la SA, qui gère également la fiche de paye, les analyses du lait et, en cas de problème de germes, la venue du technicien à mi-temps chez la SA. « C’est le même fonctionnement qu’une laiterie classique, l’Oplase SA s’occupe de tout. » Côté prix, les producteurs concernés sont payés au prix moyen des deux acheteurs.

Des compléments de prix en fin d’année

Autre particularité de l’Oplase, la SA reverse des compléments de prix, un peu comme les ristournes pour les coopératives. « On donne un prix d’acompte, puis si on a trouvé d’autres acheteurs ponctuels qui ont mieux payé, si on a économisé sur tel ou tel poste, etc., on va partager ce qu’il reste aux adhérents. »

Une concurrence entre laiteries mais aussi entre organisations de producteurs

Si l’année 2024 a connu un léger mieux, la baisse structurelle de la collecte laitière française, couplée à de fortes incertitudes sur le renouvellement des générations, laisse entrevoir une mise en concurrence des industriels soucieux de saturer leur site de transformation. Si elle peut amener des conditions favorables aux producteurs de lait, une concurrence entre organisations de producteurs peut aussi en découler. Après un départ massif d’une centaine d’éleveurs à l’APLBC dans le cadre d’un nouveau contrat avec Novandie (Andros) et LSDH, l’Oplase compte désormais 150 producteurs en Normandie et dans l’Est pour 100 millions de litres de lait collectés par an. « Des producteurs de notre OP sont partis car ils ont trouvé un meilleur acheteur, témoigne Michel Rohrbach, président de l’Oplase. On s’attendait à une concurrence entre laiteries mais celle entre OP existe bel et bien. »

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