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Mécanisation : cinq conseils pour chiffrer et raisonner un investissement

Bien cerner ses besoins, calculer le coût d'un matériel en propre par rapport à une délégation et bien négocier avec les vendeurs. Ces grandes étapes balisent la réflexion avant d'investir dans de la mécanisation.

Investir trop lourdement peut fragiliser toute entreprise. C’est particulièrement vrai en exploitation agricole en ce qui concerne la mécanisation. La vigilance doit rester de mise sur ce poste de charge, d'autant plus que les prix ont fortement augmenté. Des approches rationnelles de l’investissement en matériel, comparé à d'autres solutions comme la délégation, sont à privilégier afin d’éviter les déconvenues économiques et la dégradation des conditions de travail.

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Le processus décisionnel se déroule en plusieurs étapes : cerner ses besoins pour établir son cahier des charges ; rassembler des informations judicieuses et faire établir des devis ; évaluer les avantages et inconvénients des solutions achat ou délégation, selon les coûts et l’impact sur le temps de travail ; négocier son achat ; signer un bon de commande avec un délai de livraison et enfin procéder à un bilan de la décision.

1 - Établir son cahier des charges

L’acquisition d’un nouveau matériel doit être issue d’une réflexion sur les besoins techniques à satisfaire. « L’acheteur doit rencontrer les concessionnaires avec un cahier des charges précis, ce qui va permettre une véritable comparaison des devis. Cet exercice de comparaison serait impossible en cas de propositions trop disparates », explique Didier Debroize, ingénieur en machinisme à la chambre d'agriculture de Bretagne.

Pour un tracteur, l'agriculteur évalue son besoin en matière de puissances moteur et de performance hydraulique. Il faut aussi adapter le rapport poids/puissance en lien avec le principal usage : traction lourde, travaux superficiels ou transport ?...  Et faire attention à ne pas se laisser influencer vers plus, voire trop de puissance.

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Il ne faut pas négliger la monte en pneumatiques lors de la négociation. Leur taille, leur type et leur technologie sont à définir selon l’usage majoritaire. Par exemple, pour limiter le tassement des sols, le choix de pneumatiques ayant la capacité à supporter la charge à faible pression est à privilégier. Attention, car le tarif peut aller du simple au double. La largeur de travail des outils doit être en lien avec le cahier des charges. 

2 - Comparer le coût de différentes solutions

Pour procéder à l’évaluation des solutions, les instituts et organisations agricoles (chambres d’agriculture et le réseau Cuma notamment) proposent des calculateurs conçus pour aider la prise de décision. Ceux-ci sont d’autant plus pertinents que les prix des équipements et des matériels agricoles ont connu une augmentation sévère. Ainsi, d’après le document Coûts des opérations culturales 2023, le coût annuel d’un tracteur acheté 160 000 €, pour un usage de 500 à 900 heures, s’établit respectivement de 47 à 40 €/h, carburant inclus, soit un budget annuel de 23 500 à 36 000 €.

Il faut aussi prendre en compte le service après-vente, le coût des pièces d’usure et de coût d’entretien régulier préconisé par le constructeur.

3 - Compter le temps pour aller jusqu’au coût de chantier

Le temps étant de plus en plus contraint sur les exploitations agricoles, il s’agit de le prendre en compte et de calculer un coût du chantier. Pour cela, il faut ajouter le coût de l’outil attelé au coût du tracteur et ajouter la valeur de la main-d’œuvre en tenant compte de la totalité du temps nécessaire, incluant le déplacement, l’attelage dételage… Ceci permettra de comparer ce coût avec une offre de prestation disponible en local, et de décider entre « je fais moi-même avec mon propre matériel » ou « je fais faire par Cuma ou ETA ».

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Pour une entreprise, avoir investi dans des équipements et faire appel à un prestataire par manque de main-d’œuvre disponible pour effectuer le travail, est anti-économique.

4 - Prévoir le délai de livraison

À l’issue de ces calculs, le ou la chef(fe) d’exploitation peut prendre sa décision en connaissance de cause. En cas d'achat d'un tracteur, il faut penser à inclure dans la négociation le passage au banc de puissance pour un tracteur afin de s’assurer que la puissance commandée est réellement livrée et que la consommation de carburant est conforme aux données annoncées.

Le délai de livraison doit être clairement mentionné sur le bon de commande et il est judicieux de prévoir les modalités en cas de retard, en particulier s'il y a une reprise.

5 - Procéder à un bilan

Réaliser le bilan de la décision n’est pas aisé à réaliser car de multiples facteurs interagissent sur une campagne agricole. Cependant, l’exercice doit être envisagé, notamment dans le cas de résultats insatisfaisants ou bien d’un impact travail plus lourd qu’espéré.

Côté web

Le document Coûts des opérations culturales 2023 est un référentiel pour le calcul des coûts de production et le barème d’entraide établi par les chambres d’agriculture.

Vers l’usage des outils de contrôle de gestion

Tels que pratiqués dans l’industrie, différents critères technico-économiques d’évaluation sont à renforcer et ont toute leur place dans l'agriculture du 21e siècle, avec des investissements de plus en plus lourds dans certains systèmes de production. Citons la notion de retour sur investissement (ROI) et de capacité à valoriser la performance des équipements. Les prévisionnels d’investissement évaluent l'impact sur l’EBE et sur le temps de travail. Le contrôle de gestion est un outil de pilotage, de management et de communication au service de la prise de décision. Son objectif : améliorer et optimiser au maximum l’efficacité de l’entreprise.

Enfin, pour évaluer la rentabilité des investissements en élevage, les conseillers d'Idele et des chambres d’agriculture ont initié une nouvelle approche : le coût du temps gagné

Une forte hausse des prix des matériels

La forte hausse des prix des matériels et de la maintenance, et une augmentation des puissances de traction, peuvent conduire à des hausses de charges de mécanisation dans les exploitations.

Ces dernières années, le marché du machinisme agricole a connu une véritable flambée des prix, de l’ordre de 30 % en trois ans. Après des ventes historiques, le marché a ralenti en 2024 et baisserait en 2025. 

Avec des prix de l’ordre de 1 000 à 1 200 euros du cheval, le tracteur 170 ch se négocie donc autour de 170 000 à 200 000 euros. Ce n’est pas une paille ! D'où l’utilité d’une réflexion rigoureuse, voire d’une étude prévisionnelle avant de signer un bon de commande qui engage à supporter des charges sur plusieurs années. Il faut aussi signaler l’augmentation des puissances, avec des ventes de tracteurs de 200 ch et plus, assez courantes.

Le coût des consommables augmente aussi

Les prix de la maintenance globale grimpent aussi. Pas simplement les tarifs de main-d’œuvre (concession, distributeur), de plus en plus formée et spécialisée d’ailleurs, mais aussi des consommables (huiles, carburant, pièces d’entretien…) dont les volumes augmentent en proportion de la puissance et de la performance. Il est bon d’en avoir connaissance avant l’achat pour éviter les surprises des coûts de fonctionnement.

Lire aussi Gare aux dérapages des charges de mécanisation en élevage laitier

De ces éléments, il est aisé de prévoir que les charges de mécanisation dans une grande majorité des exploitations agricoles bondissent. Il faut espérer que cela serve à une amélioration des conditions de travail et ne dégrade pas les revenus. On peut être réservé sur ces points quand on lit que « les frais de mécanisation (affectés à l’atelier lait) sont le plus souvent responsables du dérapage du coût du système d’alimentation quand l’atelier lait dégage un revenu négatif ou faible » (Source : Agreste-Rica, traitement Institut de l’élevage).

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