Coopérative / restructuration
Vivescia, un groupe d’ampleur internationale au service de la Champagne
La nouvelle entité assure 4 Mt de collecte et représente un CA de 3,5 Md d'euros.
Les dirigeants de Nouricia, basée dans l’Aube, avaient toujours refusé de se faire « emMarner », comme s’en est amusé son président, Christian Rousseau, le 15 mars à Reims lors d’une présentation du nouveau groupe coopératif Vivescia, né de la fusion avec Champagne Céréales. C’est pourtant chose faite, et avec enthousiasme, puisque la mutation – qui doit encore recevoir l’aval de l’Autorité de la concurrence – a été validée massivement, mi-décembre lors de leurs AG respectives. Les adhérents y voient un moyen « de peser » au niveau français, européen voire même planétaire. Et ils ne s’y trompent pas. Poids lourd dans sa région avec 4 Mt de collecte (45 % des volumes de Champagne-Ardenne), 240 silos, 12.000 adhérents, 16 usines, 100 chercheurs et un centre R&D de renommée internationale, ARD, la nouvelle entité comptera parmi les 10 premiers groupes mondiaux. Elle dispose en effet de 138 sociétés et 80 usines dans 25 pays différents.
Un succès bâti sur des alliances
Nouricia et Champagne Céréales se sont appuyées sur la recherche et les alliances pour dégager des revenus complémentaires pour leurs adhérents. Elles ont toutes deux vécu des sessions multiples et sont nées de la meunerie. C’est d’ailleurs sur ce terrain que ces sœurs ennemies ont initié un premier rapprochement. En 2001, elles se fédèrent en effet au sein de Nutrixo, leader européen de la meunerie, avec comme fleuron les Grands moulins de Paris. Le CA de Champagne Céréales franchit à cette époque le cap du milliard d’euros. En 2005, les deux coopératives se retrouvent, avec d’autres, autour de Siclae, qui regroupe les activités de transformation. Cette structure a permis la construction de sites de biocarburants, développés dans une logique d’accroissement du revenu des agriculteurs : Cristanol à Banzancourt (51) et celui de Saipol à Le Mériot (10). L’usine de Diester consomme 1,5 Mt de colza champenois, Cristanol 2 et l’amidonnerie Chamtor, 900.000 t de blé. « La région est ainsi devenue importatrice de céréales », souligne Christian Rousseau. Malteurop, union de malteries régionales, développée par Champagne Céréales, s’est aussi imposée comme un moteur. Implantée en Europe et en Chine, elle est partie à la conquête de l’Est en 2003, sous l’impulsion d’Inbev. Mais c’est le rachat d’ADM malt, en 2008, qui lui permet de devenir numéro un mondial. Cette année-là, malgré la crise financière, Champagne Céréales enregistre un CA de 2 Md€. Vivescia entend poursuivre cette politique de croissance à l’international. Pour Alain Le Floch, son premier directeur général, une envergure mondiale « permet d’avoir une information précise de ce qui se passe sur les marchés. Cela est indispensable à la croissance économique du groupe. »
Devenir expert de la gestion du risque prix
Le nouveau géant coopératif souhaite renforcer l’innovation, et ce, aux niveaux agronomique, technique, logistique, organisationnel ou encore commercial. Parmi les priorités : la gestion de la volatilité. En 2007, les coopératives ont dû composer avec ce phénomène inédit. « Il a fallu réagir avec des modes de commercialisation qui n’étaient plus adaptés. Le système bien huilé du prix moyen a volé en éclats. Nous avons dû instaurer très vite de nouvelles méthodes. », rappelle Alain Le Floch. Désormais, le groupe « doit proposer une solution innovante aux agriculteurs pour une meilleure maîtrise du prix » mais aussi un service optimisé à ses clients. Vivescia entend se doter de moyens techniques et physiques pour « devenir un expert en la matière ».
« La croissance, accomplie en vingt ans, nous a permis de conforter nos fonds propres de 300 à 750 M€ » pour la nouvelle entité, souligne Christian Rousseau, président délégué à l’agriculture et à l’innovation. Le CA proforma atteint 3,5 Md€ dont 43 % générés par l’agriculture et 57 % par la transformation. « Le groupe est équilibré dans ses métiers », met en avant Alain Le Floch, commentant : « Nous avons les moyens de les développer pour le succès de l’agriculture régionale. » Un élément valorisé par les représentants de Vivescia : « Nous irriguons le tissu économique » champardennais. Sur les 15 plus grosses entreprises du groupe, 14 ont leur siège social dans la région. Le groupe agroalimentaire représente 2.500 emplois directs et investit en moyenne 50 M€/an localement.