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LME, la meunerie attend de la GMS le respect des contrats
A l’occasion de la réforme de la Loi de modernisation de l’économie, les meuniers français font état de relations avec la distribution particulièrement dégradées. Ils attendent notamment une meilleure prise en compte des volumes contractés.
« Les relations sont très tendues depuis trois ans sur les farines en sachet », explique le responsable d’un moulin spécialisé sur les ventes farines en GMS. Comme la majorité des industriels de l’agroalimentaire, les meuniers dénoncent des relations commerciales avec la grande et moyenne distributions, particulièrement difficiles pour ne pas dire chaotiques. Historiquement musclées, elles se sont encore plus dégradées avec la volatilité que connaissent les marchés céréaliers depuis quelques années. Impossibilité de faire passer les hausses, non respect des conditions générales de vente, révision unilatérale des volumes contractés par les GMS… Autant d’éléments que les meuniers souhaiteraient voir évoluer avec la réforme, actuellement en discussion, de la Loi de modernisation de l’économie (LME), dont le passage en conseil des ministres a été décalé du 26 avril au 2 mai en raison de l’affaire Cahuzac, de source ministérielle.
Respecter les conditions du contrat, notamment le volume
Principale revendication des meuniers interrogés, le respect des contrats négociés en amont avec la distribution, et plus particulièrement la notion de volumes. « Si la LME a bien fonctionné concernant certains points, comme les délais de paiements qui sont globalement respectés, le problème reste la mise en place de vrais contrats, c’est-à-dire mentionnant une durée, un prix et surtout une quantité. C’est ce dernier point qui pose problème aujourd’hui », explique Erick Roos, directeur Meunerie du groupe Soufflet. Chez plusieurs meuniers, les volumes, quand ils sont indiqués dans les contrats (ce qui n’est pas toujours le cas), sont souvent oubliés en cours d’année. Le prix est fixé mais le tonnage reste incertain, évoluant en fonction de la conjoncture du marché du blé tendre. « Il n’est pas rare que les négociateurs de la distribution fassent des comparaisons avec les offres plus récentes d’autres meuniers (basées sur des prix de blé moins chers, le marché ayant évolué entre temps, NDLR) et renégocient unilatéralement le prix en fonction de ceux-ci », rapporte Alain Lenglos, directeur commercial Grande distribution et GMS aux Grands moulins de Strasbourg, qui fournit près de 45.000 t/an de farines en sachet à diverses enseignes, et autant pour leurs fournils.
La LME modifiée pourrait prévoir une clause de réouverture des négociations avec la grande distribution en cas de forte volatilité. Cette disposition pourrait pallier le problème de manque d’engage-ment des distributeurs sur la question des volumes. « La volatilité se gère tous les jours. C’est notre métier. Or la couverture se fait sur un tonnage donné, qui est souvent fonction des contrats de vente passés avec nos clients. Donc le plus important est de prévoir des volumes dans les contrats et que le contrat soit respecté dans son intégralité », estime Erick Roos du groupe Soufflet. Même constat chez Dijon Céréales : « Si la LME renforce l’engagement sur les volumes, une renégociation basée sur la volatilité n’a plus grand intérêt », estime Loïc Viguier, son responsable commercial Industrie et GMS. « Il n’y a pas de raison que l’on prenne tous les risques. Nous connaissons les volumes dont nos clients ont besoin. Donc la clause sur la volatilité pourrait présenter un intérêt », estime pour sa part Alain Lenglos des Grands moulins de Strasbourg.
La tentation de réduire le débouché GMS
Tous ne peuvent se le permettre, mais certains meuniers n’hésitent plus à se désengager du débouché de la grande distribution compte tenu du climat délétère de leurs relations commerciales. Les Moulins Soufflet ont ainsi « quasiment divisé par deux les volumes destinés aux fournils des enseignes de la distribution en deux ans, et presque autant pour les sachets », selon Erick Roos. Une décision d’autant plus facile à prendre que seulement 10 % de la production des Moulins Soufflet part vers la distribution. Les Grands moulins de Strasbourg, dont le débouché GMS est très important, tirent tout de même la sonnette d’alarme. « Il y a une limite au-delà de laquelle nous n’irons pas. Des refus de marché ne sont pas à exclure », regrette Alain Lenglos.
Il faut toutefois noter que, selon le débouché au niveau de la distribution, la relation entre meunier et distributeur peut être différente. « L’approche est souvent beaucoup plus professionnelle avec les fournils et les labos des grandes enseignes. Cela s’explique par le fait que les interlocuteurs n’ont pas du tout le même profil que ceux qui négocient pour le sachet. Dans les fournils, nous avons affaire à des professionnels qui connaissent les qualités du produit et n’ont pas une approche purement financière », explique Alain Lenglos des Grands moulins de Strasbourg.