“Le pois est là” mais il a du mal à s’imposer dans les formulations
Marché – Avec son indicateur interprofessionnel de prix en alimentation animale, l’Unip milite pour un approvisionnement durable des fabricants
En organisant une Journée nationale, intitulée “Le pois est là !”, le 17 février dernier à Rennes, l’Interprofession des protéagineux (Unip) comptait « donner la parole aux acteurs de terrain » de la filière pour « organiser l’approvisionnement durable de l’alimentation animale en protéagineux », a expliqué en préambule son président, Pierre Cuypers. Cette « journée de formation », comme l’a qualifiée Jean-Yves Tessier, administrateur de la Fop (Fédération française des producteurs d’oléagineux et de protéagineux), a permis de diffuser les derniers résultats de recherche concernant les atouts nutritionnels, agronomiques et économiques du pois. Mais cette manifestation avait avant tout pour but l’appropriation par les acteurs de la filière de l’indicateur interprofessionnel du prix du pois en alimentation animale, lancé le 31 mai 2010 et publié depuis dans nos colonnes (cf. cotations “Protéagineux”).
Pour une production de pois fourrager qui atteindrait le million de tonnes
« Approvisionner durablement en protéines l’alimentation animale est possible : on a tous les outils pour le faire », affirme Pierre Cuypers. En 2009, le gouvernement français décidait de renforcer l’aide couplée européenne de 55,57 €/ha en affectant une enveloppe de 39 M€ (divisée par la sole totale en protéagineux). Compte tenu des surfaces implantées en 2010, le montant de ce complément d’aide devrait être proche de 100 €/ha. En conséquence, le montant total de l’aide protéagineux en 2010 pourrait atteindre près de 155 €/ha. Par ailleurs, les professionnels faisant état d’une baisse des surfaces de pois et de féverole dans plusieurs régions, le complément national d’aide couplée aux protéagineux devrait augmenter en 2011, puisque l’enveloppe globale reste inchangée. Ce soutien renforcé en France est exceptionnel dans le contexte actuel de la Pac et perdurera encore au moins deux ans. « Cette mesure de relance peut nous permettre de retrouver des volumes d’approvisionnement d’un million de tonnes de pois » que les professionnels de la nutrition animale seront en mesure d’incorporer dans leurs formulations puisque, dans les années de forte production, ils en utilisaient facilement près de 2,2 Mt.
Pour une meilleure visibilité du marché du pois sur le long terme
Cependant, l’existence d’une aide n’est pas suffisante pour décider l’agriculteur à produire des pois, le prix des autres matières premières agricoles entre également en ligne de compte. Il a besoin d’avoir une vision sur le long terme de l’évolution des cours d’une culture pour pouvoir en déterminer la rentabilité par rapport à une autre. Et ce, d’autant plus quand il raisonne en terme de rotation et non plus seulement en terme d’assolement. D’où la création, en l’absence d’un marché à terme dédié, d’un indicateur interprofessionnel de prix du pois en alimentation animale. Il est exprimé sous forme d’écart de prix entre le pois rendu centre Bretagne et le blé Matif. Cet indicateur est destiné à fournir des données objectives aux opérateurs pour leur permettre de se positionner dans le futur, afin de décider un assolement ou négocier un contrat. Pour Patrice Rialland, responsable Achat chez Sanders, « cet indicateur n’a de sens que pour raisonner sur l’avenir, afin de construire un schéma d’approvisionnement à terme ».
Car ce que demandent les fabricants d’aliments pour animaux, c’est avant tout une marchandise disponible en quantité et en qualité. Pour que le pois soit « de moins en moins une variable d’ajustement pour la nutrition animale », il est impératif « d’en régulariser l’approvisionnement », insiste Denis Cour-zadet, responsable Collecte chez Axereal. Mais « il faut également améliorer la qualité du pois pour qu’il devienne indispensable en nutrition animale », complète Bertrand Bacheley du Groupe Michel. A l’image de son utilisation en aliment porc, où il est une source protéique de premier choix.
Ainsi l’avenir de la filière pois passe-t-il par une contractualisation de la production, entre fabricant d’aliments et organisme stockeur, puis entre collecteur et producteur. « Certes les agriculteurs sont à l’amont de la production. Mais c’est bien à partir de l’aval que tout s’organise, que tout se construit », explique le président de l’Unip. Et de conclure : « Fabricants d’aliments pour animaux, l’avenir de la filière est entre vos mains. »