La filière céréalière à l’heure des revendications
Stratégie – La meunerie demande la constitution de stocks de réserve et les producteurs de grandes cultures énoncent leurs attentes face aux prix bas
La meunerie plaide, dans une lettre adressée au ministre de l’Agriculture Bruno Le Maire, pour la constitution « d’un stock européen de réserve de blé tendre » d’ici la fin de la campagne 2009/2010, indique un communiqué diffusé le 15 avril par l’ANMF (Association nationale de la meunerie française). Une demande qui intervient dans un contexte où la profession pourrait bien trouver une oreille attentive de l’état qui vient d’entamer ses travaux visant « à résoudre les problèmes conjoncturels et structurels » de la filière des grandes cultures. Tel serait, selon un communiqué du ministère, l’objectif du comité de suivi qu’il a installé le 14 avril. Il réunit les organisations syndicales de producteurs et des organismes stockeurs ainsi que des membres de l’APCA, de FranceAgriMer et les services du ministère.
Constituer des stocks stratégiques
« La forte volatilité des marchés des matières premières, notamment du blé, pour la période 2006/2008 puis la crise financière ont démontré la nécessité de disposer de tels stocks de réserve », commente l’ANMF dans son communiqué. Compte tenu « de la bonne récolte mondiale et de l’incertitude de la réalisation de certains programmes d’exportations » la période serait selon l’organisation « favorable » à la constitution de réserves. En France, 10,21 Mt de céréales devraient être reportées sur la prochaine campagne, contre 7,13 Mt l’an passé, selon FranceAgriMer. En blé tendre, le volume résiduel gagnerait en particulier 13,6 % sur un an, à 3,5 Mt. Au niveau de l’UE à 27, le stock de fin de campagne toutes céréales se situerait à 39,1 Mt, contre 35,4 Mt fin 2008/09, d’après le CIC. Elaborer des stocks stratégiques répondrait « à la fois aux besoins des utilisateurs (…) et à ceux des producteurs », argumente le président de l’ANMF, Joseph Nicot, dans sa lettre au ministre. Le représentant des meuniers l’invite à présenter cette proposition à ses collègues européens pour « une mise en œuvre rapide par la Commission européenne ». « Ce dispositif répondrait également, ajoute l’ANMF, à la volonté exprimée par Bruno Le Maire de mettre en place des mesures pour faire face aux situations de crise. » Et d’assurer : « C’est lors des moments calmes que se préparent les outils permettant de mieux aborder les périodes de forte volatilité et de cours élevés. »
Des aides au stockage
Dans le cadre du comité de suivi des grandes cultures, rencontres visant justement à orienter les décisions ministérielles, Orama a lui aussi demandé que « les pouvoirs publics français et européens s’engagent de façon responsable, aux côté de la profession, dans la régulation des marchés », notamment par le maintien des outils de gestion de crise, indique un communiqué du syndicat de producteurs. Aux côtés des collecteurs, il a par ailleurs appelé à des aides au stockage, problématique cette campagne et peut-être la prochaine. Notons à ce sujet que FranceAgriMer a indiqué mi-mars vouloir faire le point sur les capacités réellement disponibles dans l’Hexagone compte tenu du décalage observé entre les offres et les capacités théoriques à l’occasion de la gestion de l’intervention de l’orge. 57 Mt sont agréées par l’établissement. Mais les coûts des mises aux normes des silos, parfois rédhibitoires, peuvent avoir conduit certains OS à fermer des capacités. Des abandons qui n’apparaissent pas forcément dans les fichiers.
Parmi les autres mesures susceptibles de renforcer la compétitivité de la filière défendues lors de ce premier tour de table : la généralisation des 44 t, la résolution des « dysfonctionnements en matière de fret ferroviaire » ou encore le crédit export, notamment sur les marchés du bassin méditerranéen et des Proche et Moyen-Orient.
En amont, Orama a insisté sur les moyens de soulager la trésorerie des agriculteurs et demandé, entre autres, la réévaluation de l’intérêt des mesures environnementales. La Coordination rurale a défendu se son côté la libre commercialisation des céréales et la suppression de la CVO blé tendre.
Trois groupes de travail, intégrant les organismes techniques, bûchent sur les questions du revenu et de la compétitivité, des marchés et des contraintes spécifiques au secteur. Un point est prévu le 6 mai, mais les conclusions du comité ne seront rendues qu’en fin d’année, comme l’avait indiqué Nicolas Sarkozy.