Production Biologique
[Coronavirus Covid 19] Filière meunière bio : tension sur la farine en sachets
Le boom des commandes en farines bio des boulangers durant la 1e semaine de confinement a vite chuté, remplacé par un pic de demande de sachets en magasins.
Le boom des commandes en farines bio des boulangers durant la 1e semaine de confinement a vite chuté, remplacé par un pic de demande de sachets en magasins.
«Depuis quinze jours, c’est la ruée sur les farines bio en sachets de 1 kilo », relate Julien-Boris Pelletier, directeur-général de Moulin Marion, meunier et Fab dédié à la bio, situé à St Jean-sur-Veyle dans l’Ain. « On s’adapte, il nous faut être réactifs. » Pour les meuniers bio, la première vague, en début de confinement, a été de répondre à un pic de demande exceptionnel des artisans boulangers, mais le soufflet est vite retombé. Les grandes villes sont touchées. « Paris et sa périphérie sont très impactés, souligne Olivier Deseine, patron des Moulins de Brasseuil dans les Yvelines, et représentant de la bio au sein de l’association nationale de la meunerie française. L’activité diminue, lié à l’arrêt de l’activité traiteur et de la RHD. Les boulangeries ferment, ou alors réduisent leurs gammes, voire suspendent celles en bio.» Les ventes sur les marchés chutent aussi. Les volumes de farine bio aux artisans boulangers auraient baissé de 70 % dans la Capitale, de 30 % en banlieue, et de 20 % en régions.
La seconde vague
Puis la seconde vague est arrivée : les commandes en petits sachets de farine explosent, venant de la grande distribution et des magasins spécialisés. « Nous croulons sous les demandes de partout. Notre usine tourne plus qu’à plein régime, dans des conditions de sécurité de protection drastiques. Et nous avons dû faire appel à l’intérim», précise Julien-Boris Pelletier (8000 tonnes de farine bio par an). Pas de demandes spécifiques sur la céréale ou le type de mouture, tous les références bio font l’affaire. « Les gens ont peur de manquer…Mais l’arrêt d’importations européennes expliquerait aussi cette tension. » A la minoterie Dupuy-Couturier à L’Etrat dans la Loire (25 000 tonnes de farines bio par an), même scénario : « Impossible de répondre à toutes les demandes, car nous ne bradons pas », explique Béatrice Deflandre, responsable des achats. Pour autant, pas question non plus d’augmenter les tarifs : « Nous ne profiterons pas de la situation, nos prix sont les mêmes », assure-t-elle. Le seul frein pour ces meuniers vient de la rupture des stocks de sachets, cette fabrication n’étant pas considérée comme de première nécessité.
Atouts des partenariats
Au final, il est trop tôt pour faire un bilan. « Nos objectifs risquent d’être affectés », craint Olivier Deseine, dont le moulin visait 13 000 tonnes de farine bio, toute d’origine française, en 2020. A la minoterie Dupuy-Couturier, le pic du début, suivi d’une chute, puis d’une reprise avec les sachets, rendent le mois de mars conforme aux prévisions. Pour avril, c’est l’inconnu. « Le consommateur ne va pas continuer à stocker de la farine indéfiniment, s’étonne Julien-Boris Pelletier. On travaille vraiment à court terme, on se mobilise.» Chez ces meuniers bio, habitués à nouer des partenariats pluriannuels en filières, et recentrés sur l’origine française, la situation reste sous contrôle.
Client de Moulin Marion, les pains Belledonne en bénéficie : «Nos partenariats avec des moulins et des agriculteurs bio, sur des prix et des volumes, et basés sur la confiance, sécurisent notre activité, d’autant plus en temps de crise » , confirme Bruno Anquetil, fondateur-président de cette entreprise savoyarde, qui écoule actuellement de 12 à 14 tonnes par jour de pains bio au levain en magasins spécialisés bio, à partir de quatre fournils en France. «Et nos farines locales et traçables jusqu’aux producteurs, rassurent le consommateur. » Alors que le pain frais à la coupe est délaissé, ceux prétranchés en sachets ou emballés sous vide font un carton. Idem pour le pain de mie dont les ventes ont plus que doublé. Pour Bruno Anquetil, à la tête de 170 salariés, « il faut preuve d’agilité et de souplesse, ce que notre projet d’entreprise et notre management participatif favorisent».