Conférence “Black Sea Grain”
Consensus baissier sur les prix des grains à court et long terme
Les analystes invités à la 14e conférence « Black Sea Grain » estiment que la concurrence mondiale est trop forte actuellement pour espérer une reprise des prix en 2017 et à plus long terme.
« Les cours des grains devraient rester bas cette année, au niveau observé sur la période 2014-2016 », s’est exprimé Sergey Feofilov, directeur général du cabinet de conseil ukrainien UkrAgroConsult, lors de la 14e conférence “Black Sea Grain” à Kiev les 5 et 6 avril. En cause, les importants stocks de grains mondiaux, et la concurrence accrue entre les principaux pays exportateurs. Sur le long terme, l’expert partage dans l’ensemble la vision de Philippe Chalmin, fondateur du cercle Cyclope. « Le cycle baissier devrait se poursuivre jusqu’à la fin des années 2020, où l’on verra peut-être une forte croissance de la demande indienne et/ou des pays d’Afrique », analyse ce dernier.
Baisse des 8 % des prix du blé entre 2016 et 2017 ?
Philippe Chalmin s’attend « à un retrait des prix en moyenne de 8 % en blé, de 2 % en maïs et de 12 % en soja entre 2016 et 2017 ». Les autres spécialistes présents ont tendance à donner des arguments favorables à ces projections. « Les conditions de cultures d’hiver en Ukraine sont meilleures que l’an dernier à pareille époque », indique Elizaveta Malyshko, analyste chez UkrAgroConsult. Elle projette des stocks de grains russes, ukrainiens et kazakhs à respectivement 26,4 Mt, 3,9 Mt et 3,5 Mt en 2017/2018, contre 25 Mt, 3,9 Mt et 3,5 Mt en 2016/2017.
À plus long terme, les conditions logistiques, principal frein à la compétitivité à l’export de grains en Argentine et en Ukraine notamment, devraient s’améliorer. Concernant la première, « seules 11,6 % des routes sont goudronnées, et la flotte de camion a en moyenne 22 ans. Mais le gouvernement Macri a promis des investissements publics pour y remédier », explique Leandro Pierbattisti, économiste au sein de la fédération des exportateurs argentins. Ce dernier estime une production de grains en Argentine pour 2016/2017 à 125 Mt, et la projette à 140 Mt en 2025.
Hausse des capacités de stockage dans les ports ukrainiens
En Ukraine, Elizaveta Malyshko indique que « les capacités de stockages dans les ports ukrainiens ont progressé, passant d’environ 50 Mt à 60 Mt entre 2016 et 2017 ». Si la logistique reste un point faible dans le pays, « le coût du fobbing est à seulement 15-20 $/t actuellement. Il n’est pas exclu que dans les prochaines années, les Ukrainiens soient au même niveau que l’Hexagone, grâce aux investissements des firmes étrangères (le quatuor de négoces agricoles ABCD notamment) dans les ports », ajoute Jean-Jacques Hervé, vice-président de la Chambre de commerce France-Ukraine, et conseiller pour les questions agricoles. Alors que bon nombre d’analystes pointent du doigt le manque d’infrastructures (manque de wagons, de voies ferrées, etc.), l’expert estime qu'« il y a certes des progrès à faire dans ces domaines, mais le principal problème réside dans une réglementation encore trop complexe. » L’entreprise publique Ukrzaliznytsia, détenant le monopole du transport ferroviaire en Ukraine, dispose potentiellement d’un nombre de wagons suffisant pour transporter les marchandises selon lui, mais impose « des démarches administratives lourdes pour mettre à disposition ses wagons. Ajoutons à cela des problèmes de corruption. »