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La filière betterave cherche la parade face à la jaunisse

La recherche se mobilise pour mettre au point des méthodes de lutte contre la jaunisse. L'enjeu : pouvoir prendre le relais des néonicotinoïdes, qui pourraient être réautorisés pour trois ans.

champ de betteraves touchées par la jaunisse
Parcelle de betteraves touchées par la jaunisse en Seine-et-Marne. Il y a urgence à trouver des méthodes de lutte alternatives aux néonicotinoïdes.

Front uni contre la jaunisse. En septembre, Inrae et l'Institut technique de la betterave (ITB) ont présenté un plan national de recherche et d’innovation (PNRI) pour mettre au point des solutions alternatives aux néonicotinoïdes dans la lutte contre la jaunisse de la betterave. Le parlement doit se prononcer sur la validation d’une dérogation pour pouvoir utiliser des traitements de semences à base de cet insecticide, mais cette autorisation temporaire, si elle est confirmée, ne sera accordée que jusqu’en 2023.

Variétés, auxiliaires et mosaïque de paysage

Outre des recherches sur une meilleure compréhension des virus et de leur propagation, diverses solutions de lutte contre virus et pucerons vont être élaborées et testées avec le PNRI : recherche de variétés tolérantes, impact de la conduite culturale, plantes répulsives des pucerons, utilisation d’éliciteurs, mosaïque des paysages pour favoriser l’action des auxiliaires

« Concernant les auxiliaires, des recherches vont être menées sur des hyménoptères parasitoïdes pouvant parasiter les pucerons à l’automne pour éviter leurs pullulations au printemps, indique Alexandre Quillet, président de l’ITB. Les scientifiques disposeront d’un « terrain de jeu » de 500 à 1000 hectares de betteraves pour mener à bien leurs essais. Le PNRI sera doté d’un budget de 20 millions d’euros, dont 7 millions d’euros de financement public.

Du côté de la sélection variétale, les travaux pourront s’appuyer sur les résultats d’Aker. Ce programme de huit ans, qui vient de s’achever, a permis de mieux identifier et d'élargir les ressources génétiques disponibles pour sélectionner de nouvelles variétés de betteraves, notamment en allant chercher des espèces sauvages. Outre cet apport de diversité génétique, Aker devrait permettre de réduire le temps nécessaire à l’obtention variétale. En revanche, Aker n’apporte pas de solution clé en main contre la jaunisse.

Diminuer le risque jaunisse de façon très sensible

Le 14 octobre, devant la commission des affaires économiques du sénat, le PDG d’Inrae, Philippe Mauguin, a affirmé que l’Institut aurait rempli sa mission si les solutions identifiées permettaient de « ramener le risque de perte de rendement de 40 % à 10 ou 15 % dans une année exceptionnelle » telle que celle que l’on a connu cette saison. « Dans les trois ans, en mobilisant tous ces leviers et avec l’implication de moyens, on pourra proposer des solutions qui diminueront le risque jaunisse de façon très sensible, mais pas à 100 % comme les traitements de semences à base de néonicotinoïde », a confirmé Christian Huyghe, directeur scientifique Agriculture d’Inrae.

Cominer la sélection variétale avec d'autres leviers

Le chercheur met notamment en garde sur le fait qu’une variété résistante à la jaunisse ne sera pas la panacée. « L’approche variétale devra nécessairement être combinée avec de nombreux autres leviers, notamment en raison du risque de contournement du gène de résistance », a-t-il expliqué lors de la présentation des résultats d’Aker.

En attendant, la filière fait grise mine. Elle est confrontée à la pire récolte depuis plus de vingt ans en raison de l’attaque sévère de jaunisse qui a touché une grande partie du territoire français cette année.

Le pire rendement national en betterave depuis vingt ans

La catastrophe était annoncée, elle se confirme : le rendement moyen des betteraves de la récolte 2020 ne dépasserait pas 70 t/ha à 16° de sucre, selon les dernières estimations de la CGB, au 15 octobre. Un chiffre provisoire en ligne avec ceux publiés par les services du ministère de l’Agriculture (72,5 t/ha). Une chose est certaine, le chiffre final sera le pire depuis plus de vingt ans. « La moyenne était de 75 t/ha en 1999 et de 68 t/ha en 1998 », confirme Jean-Louis Striebig, responsable technique à la CGB. La moyenne quinquennale est de 87,3 t/ha.

Les producteurs les plus touchés sont ceux de Seine-et-Marne, avec un rendement moyen de 31 t/ha et des écarts de 11 à 60 t/ha, suivis par ceux du Centre et de la Picardie. Dans ces régions, la baisse de rendements est estimée à 34 et 17 % par Agreste. « La baisse des rendements touche tous les secteurs sauf le Nord-Pas-de-Calais et la Seine-Maritime », résume Jean-Louis Striebig. Pour évaluer le préjudice « jaunisse », on peut comparer le rendement de l’année avec celui de 2019, pénalisé par un épisode de sécheresse similaire à 2020. Il était de 85 t/ha.

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