La Cour des comptes enjoint le secteur agricole à moins prélever d’eau
Quelques mois après la présentation par le gouvernement d’un plan consacré à l’eau, la Cour et les chambres régionales des comptes ont décidé de consacrer une enquête à la gestion quantitative de l'eau en période de changement climatique. Leurs conclusions viennent d’être publiées dans un rapport.
Quelques mois après la présentation par le gouvernement d’un plan consacré à l’eau, la Cour et les chambres régionales des comptes ont décidé de consacrer une enquête à la gestion quantitative de l'eau en période de changement climatique. Leurs conclusions viennent d’être publiées dans un rapport.
Dans ce rapport, la Cour des comptes part du constat que, selon les données de la BNPE (Banque nationale des prélèvements quantitatifs en eau), les prélèvements d’eau destinés à l’irrigation agricole ont plus que doublé en une décennie, pour atteindre 3,42 milliards de m³ en 2020. En France en 2010, la surface irriguée représentait 1,57 million d’hectares, soit 5,8 % de la surface agricole utile (SAU). Selon elle, en moyenne annuelle, plus de 2 000 m³ d’eau sont nécessaires par hectare irrigué. Ces volumes sont majoritairement puisés en eaux de surface (environ 60 %). Les régions Nouvelle-Aquitaine, Centre-Val de Loire et Occitanie réalisent plus de 50 % de ces prélèvements et représentent plus de 70 % de la surface irriguée de céréales. Toujours selon le rapport, tandis que la surface irriguée diminue dans les régions où l’irrigation est ancienne, elle augmente rapidement dans d’autres régions.
Pour la Cour des comptes, la PAC favoriserait une agriculture consommatrice d’eau
Le rapport constate par ailleurs que « Les contrôles réalisés révèlent que les mesures d’économies d’eau sont mises en place avec un succès variable ». Si la Cour des comptes estime que le suivi de l’état hydrique des sols au moyen de sondes pour optimiser l’irrigation apparaît comme une solution efficace, elle dénonce le fait que « les mesures agro-environnementales de désirrigation proposées par la PAC, la culture de variétés moins consommatrices en eau ou encore la modification du matériel d’irrigation progressent lentement ». Et d’ajouter : « Ces aides ponctuelles pour une moindre consommation d’eau restent moins intéressantes financièrement que les aides de la PAC qui ne sont subordonnées à aucun critère concernant une baisse des prélèvements en eau, voire encouragent certaines cultures nécessitant un fort apport en eau sans condition de lieu ».
Réduire les quantités d’eau utilisées
La Cour des comptes conclut que le financement public d’infrastructures d’irrigation de terres agricoles doit être conditionné à des engagements de pratiques agricoles plus respectueuses de l’environnement et à la réduction des quantités d’eau utilisée. Elle estime par ailleurs que la planification stratégique et les plans territoriaux de gestion de l’eau devraient comporter des objectifs de réduction des prélèvements.
La mission sénatoriale sur l’eau rejette l’idée d’un moratoire sur les retenues agricoles
Un autre rapport vient d’être publié : celui de la mission sénatoriale d’information dur la gestion de l’eau qui compte 53 recommandations. Elle y rejette notamment l’idée d’un moratoire sur les retenues agricoles, qui selon elle « n’est en réalité qu’une interdiction générale déguisée ». Elle appelle à « permettre l’installation de micro-retenues de sécurisation dans les exploitations agricoles destinée à une irrigation de résilience, selon des modalités définies par chaque comité de bassin ». Selon elle, les retenues doivent être conditionnées à des contrats d’engagements réciproques, « portant notamment sur des changements de pratiques allant vers l’agroécologie ». Elle insiste enfin sur la gestion collective des autorisations de prélèvement d’eau. « Tous les usages de l’eau devraient entrer dans une procédure d’encadrement », a précisé Hervé Gillé, le rapporteur de la mission.