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HVE : qu’est-ce que change le nouveau référentiel ?

Le nouveau référentiel HVE est plus exigeant mais diversifie les possibilités d’obtenir les points nécessaires à la certification. Le volet biodiversité se corse, tandis que la gestion des phyto et de la fertilisation reste délicate.

Dans le nouveau référentiel HVE, le durcissement du barème de points de l'item "bilan azoté" et la vulnérabilité aux impacts de la météo renforcent le risque de ne pas obtenir les points nécessaires pour le volet fertilisation.
Dans le nouveau référentiel HVE, le durcissement du barème de points de l'item "bilan azoté" et la vulnérabilité aux impacts de la météo renforcent le risque de ne pas obtenir les points nécessaires pour le volet fertilisation.
© N. Cornec

La certification environnementale, surtout connue pour son niveau 3, la Haute valeur environnementale (HVE), entre dans une nouvelle phase. Son intégration à l’écorégime de la nouvelle PAC s’accompagne d’une refonte du référentiel. Les deux événements sont liés : les pouvoirs publics ont justifié la prise en compte de la certification environnementale dans la nouvelle aide verte par le rehaussement des critères environnementaux.

Le référentiel HVE de 2023 est donc, sans surprise, plus exigeant, mais aussi plus complexe. Le principe de base reste identique, du moins pour la voie A, la voie B étant supprimée : pour accéder à la HVE, l’exploitation doit valider quatre grilles, ou volets (biodiversité, produits phytosanitaires, fertilisation et irrigation), en cumulant au moins dix points pour chacune des grilles à l’aide de plusieurs items. Les connaisseurs de l’ancien système vont devoir, comme les nouveaux candidats à la certification, se plonger dans la jungle des critères, car les modifications ne sont pas anodines.

HVE : qu’est-ce que change le nouveau référentiel ?

L’utilisation de CMR1 désormais interdite

« Dans le nouveau référentiel, tout n’est pas plus dur, et c’est parfois plus cohérent, mais il est souvent plus difficile de gagner un point, analyse Joël Lorgeoux, directeur Développement innovation agronomique à la coopérative Scael, dans la région Centre. Or, dans notre secteur, obtenir les dix points pour le volet phytosanitaire se jouait parfois à un point. »

« Parmi les changements principaux, il y a d’abord l’introduction de deux critères obligatoires, souligne Marilou Legeay, animatrice agronomique au sein de la coopérative Oxyane, située en région Rhône-Alpes. Le premier est l’obligation de respecter au moins 4 % d’infrastructures agroécologiques (IAE), et le second est l’interdiction d’utiliser les produits phytosanitaires classés CMR1. » Ces produits, identifiés comme cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques, sont parmi le plus dangereux et sont dans le collimateur des pouvoirs publics.

Autre évolution notable : il devient plus compliqué d’aller chercher un grand nombre de points avec un seul item. Pour plusieurs d’entre eux, le nombre maximal de points qu’ils permettent d’engranger a été réduit. C’est le cas pour le pourcentage d’IAE dans la SAU, le poids de la culture principale ou encore le solde du bilan azoté. Le bon revers de la médaille est que « de nouveaux items ont été créés dans chaque volet, ce qui permet d’aller chercher des points ailleurs, par rapport à la version précédente du référentiel », indique Marilou Legeay. Le nouveau cahier des charges propose donc une plus grande diversité d’accès pour cumuler des points… mais avec un niveau d’exigence relevé. De nombreux seuils ont été durcis, imposant un effort plus important pour décrocher le même nombre de points que dans l’ancienne version.

Des items plus diversifiés et plus exigeants

Cette évolution concerne notamment la grille biodiversité : on ne peut désormais obtenir que 7 points maximum avec le poids des IAE (contre 10 points auparavant), et le coefficient de certains éléments (haies, arbre isolé, lisière de bois) est minoré. Idem pour la part de la culture principale. Jusqu’ici, on obtenait 1 point si cette culture couvrait moins de 70 % de la SAU. Le compteur est désormais ouvert à 60 %. Dans le cas, fréquent en grandes cultures, où la culture principale occupe 30 à 40 % de la SAU, seuls 3 points sont attribués, et non 4 comme avant. Nouveauté positive : on peut désormais capitaliser des points sur la diversité des IAE.

La prise en compte de la taille des parcelles fait aussi son entrée dans la grille biodiversité. Ce paramètre, à l’impact avéré, permettra difficilement de prendre des points en grandes cultures. Pour 1 point, il faut en effet que la somme des surfaces des unités culturales inférieures à 6 hectares représente 40 % de la SAU. « Globalement, il va être plus compliqué d’aller chercher les 10 points du volet biodiversité », prévient Damien Larbre, à la chambre d’agriculture de la Marne.

Les volets fertilisation et phytosanitaires restent les deux talons d’Achille pour les exploitations en grandes cultures. L’item du bilan azoté, soit le solde entre l’azote apporté et ce qui a été utilisé par la culture, devient encore plus délicat. Il faut désormais que ce solde s’inscrive entre 30 et 40 unités à l’hectare pour gagner 5 points, avec seulement 2 points si l’excédent calculé se situe entre 40 et 50 unités. Obtenir 8 points impose de descendre sous les 20 unités. Et en cas d’apport d’azote organique, c’est la dose totale de celui-ci qui est intégrée dans le calcul, sans considérer la vitesse de minéralisation.

Risque accru pour le volet fertilisation

« L’abaissement du niveau d’excédent du bilan azoté pourrait plomber les grandes cultures, craint Joël Lorgeoux. En suivant la méthode des bilans, il reste souvent un solde de 50 à 60 unités d’azote. Il faut donc faire un effort au-delà de la méthode du bilan pour aller chercher davantage de points, via un pilotage plus fin par exemple. » De plus, il y a une obligation de résultat. « Si on travaille au mieux mais qu’un accident climatique de fin de cycle fait chuter le rendement, on perdra des points, même avec l’implantation de Cipan derrière », avertit le spécialiste. De quoi hypothéquer l’obtention des 10 points pour le volet fertilisation. Pour tenir compte de la variabilité interannuelle de cet indicateur, le référentiel permet toutefois de lisser le calcul sur trois ans. « Si l’on est confronté à une gamelle, on devra donc croiser les doigts pour que la moyenne triennale soit favorable », indique Maud Evrard, conseillère à la chambre d’agriculture d’Eure-et-Loir.

Certes, le nouveau cahier des charges valorise l’apport d’azote organique, selon la part qu’il représente sur la fertilisation azotée totale : 1 point entre 25 et 35 %, 2 points entre 35 et 45 %…  Mais en l’absence d’élevage, l’impact positif sera très limité. S’assurer des 10 points pour le volet fertilisation devient donc plus incertain. Or, « sous l’ancien référentiel, avec des règles moins strictes sur le bilan azoté, nous constations déjà des situations dans lesquelles valider ce volet était délicat », signale Marilou Legeay.

Révision des indices de fréquence de traitement de référence

La vigilance sera aussi de mise pour la stratégie phytosanitaire, qui nécessitait souvent des adaptations en grandes cultures pour atteindre les 10 points. Les points de l’item indices de fréquence de traitement (IFT) sont toujours calculés en fonction des IFT herbicides et hors herbicides de l’exploitation par rapport aux moyennes régionales. Celles-ci ont été mises à jour, en incluant désormais le maïs, le tournesol et les prairies temporaires pour l’IFT hors herbicides. « L’impact de ces changements d’IFT va très fortement dépendre des secteurs et des systèmes, affirme Maud Evrard. Les assolements en colza-blé-orge vont être plutôt pénalisés, tandis que les rotations plus diversifiées, notamment avec du maïs, devraient bénéficier de ces changements. Dans tous les cas, il faudra bien raisonner ses programmes pour obtenir les points, et favoriser si possible les cultures à bas niveau d’intrants. » Colza et betteraves, notamment, ne faciliteront pas la tâche.

La mise à jour de la liste des méthodes alternatives au phyto devrait donner accès à au moins 1 ou 2 points. Même chose pour l’ajout de l’item « surveillance active des parcelles », avec l’utilisation d’outils de diagnostic (modèles informatiques, cuvettes jaunes…) ou la participation active à un dispositif de collecte de données d’observation. « Cela va pousser encore plus à aller observer dans les champs », apprécie Damien Larbre.

Un autre item fait son apparition : se passer des produits CMR2 apporte 1 point pour les herbicides, et 1 point pour les produits hors herbicides. « L’exclusion des CMR1, désormais impérative, ne posera pas de problème, mais il sera quasiment impossible d’aller chercher les points avec les CMR2 sans créer d’impasses techniques en grandes cultures », considère Maud Evrard. La technicienne prévient que le nouveau référentiel pourrait « coincer pour certaines exploitations qui ne feraient pas évoluer les pratiques », mais elle reconnaît à la HVE « l’intérêt de se poser pour évaluer son système dans sa totalité, se situer en termes d’IFT et de balance azotée afin d’identifier les leviers d’amélioration ».

Nouveau référentiel : quel impact pour l’écorégime ?

Le nouveau cahier des charges de la HVE est entré en vigueur au 1er janvier 2023.

Certification obtenue à partir du 1er janvier 2023 : c’est nécessairement avec le nouveau cahier des charges. Vous pouvez donc prétendre au niveau 2 de l’écorégime.

Certification avant le 1er octobre 2022 : la certification, obtenue avant la publication des nouveaux textes, permet de toucher l’écorégime en 2023. La HVE peut être conservée trois ans sur la base de l’ancien référentiel (à condition de remplir les conditions chaque année), mais ne permettra pas de toucher l’écorégime au-delà de 2023.

Certification entre le 1er octobre et le 31 décembre 2022 : la certification est obtenue sur la base de l’ancien référentiel et ne permet pas de toucher l’écorégime en 2023.

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