Colza biologique : préparer la plante à faire face aux ravageurs et aux adventices
Le colza biologique est sous la forte pression des ravageurs à l’automne ainsi que des adventices, notamment en Bourgogne-Franche-Comté. Agriculteur et conseillers témoignent sur la fertilisation, la préparation du sol et le semis pour rendre les colzas moins vulnérables aux bioagresseurs.
Colzas bio et conventionnel : même combat. Le colza doit être suffisamment robuste à l’automne pour faire face aux attaques de ravageurs. C’est le problème numéro 1 en région Bourgogne-Franche-Comté. La fourniture d’azote pour les semis est un premier préalable pour obtenir un colza robuste, via un précédent légumineuse notamment. Cultivée trois ans, la luzerne fournit une bonne quantité d’azote au sol, même un an après sa destruction. C’est la stratégie adoptée par Pascal Guérin, agriculteur à Billy-lès-Chanceaux, en Côte-d’Or, qui produit du colza biologique depuis vingt ans. « Mon colza succède à un blé qui suit une luzerne. Avec un labour après la moisson, ce blé me permet de "desserrer" un peu le sol pour que le pivot racinaire du colza puisse descendre. Lors du passage de herse que j’effectue ensuite, j’en profite pour épandre du fumier de mon élevage, puis un peu de fiente de volaille libérant rapidement de l’azote avant le dernier passage de vibroculteur. Cet outil détruit les repousses de blé et les adventices levées. »
Pour Cécile Le Gall, chargée d’études agriculture bio chez Terres Inovia, il est possible de cultiver un colza directement après un protéagineux récolté tôt (féverole, pois) qui a l’intérêt de produire peu de résidus de culture pour l’implantation. « Une céréale à paille a comme défaut d’engendrer des repousses parfois difficiles à gérer. »
Le colza est par ailleurs exigeant sur la qualité de préparation de sol. « Il est sensible au tassement et, avec de petites graines, il faut peu ou pas de résidus de culture, ainsi qu’un sol pas trop motteux avec une préparation suffisamment fine », conseille Julien Halska, de l’organisme Bio Bourgogne-Franche-Comté.
Les meilleures variétés parmi les hybrides
L’objectif pour le colza est d’atteindre le stade B4 (4 feuilles) avant le 20 septembre, stade à partir duquel il est apte à bien résister aux attaques de grosse altise qui ont lieu souvent en début d’automne. Outre la bonne préparation de sol et la fertilisation, le choix variétal est prépondérant ainsi que la densité de semis.
« Pour obtenir des colzas robustes et à floraison pas trop précoce, afin d’éviter les coups de gel en Bourgogne-Franche-Comté, les meilleures variétés sont parmi les hybrides, à savoir LG Aviron et Hostine, remarque Julien Halska. Cela impose donc un investissement en semences pas trop élevé, de l’ordre de 60 à 70 euros par hectare. » Pour Benjamin Delhaye, ingénieur chez Terres Inovia, « en investissant un peu de semences, on sécurise davantage le rendement. Des lignées se comportent assez bien également, la meilleure étant Randy (Saatbau) dans des essais de la région. »
Avec les graines de ferme, dont le taux de pertes à la levée peut être très important, il a été conseillé de semer dense par le passé. « Mais une surdensification peut produire des colzas « baguettes », remarque Cécile Le Gall. « Dans les années 2000, il y avait une tendance à surdensifier les semis. Maintenant, nous avons adapté la densité avec un objectif de 35-40 pieds par m2 pour obtenir des pieds plus gros et robustes en sortie d’hiver », expose Benjamin Delhaye. La surdensification pouvait toutefois être une réponse à apporter en cas d’infestation en adventices. Dans les autres régions de production, les adventices sont les principaux facteurs limitants à la culture de colza biologique, les ravageurs arrivant au second plan contrairement à la Bourgogne-Franche-Comté.
Passages de bineuse pour gérer les adventices
La date et les bonnes conditions de semis ne sont pas différentes du colza conventionnel. « Nous nous préparons pour les premiers jours d’août et nous attendons la météo propice pour semer, après une pluie de 5-10 mm au minimum », précise Pascal Guérin.
L’agriculteur sème son colza avec un semoir de précision à 45 cm d’interrangs de façon à pouvoir les biner. Il passe la bineuse de sa Cuma – une Pottinger 12 rangs avec caméra – dans les deux à trois semaines suivant le semis. Les passages sont réalisés également au printemps. « À l’automne 2023, je n’ai pas biné à cause du temps pluvieux. Mais le développement rapide du colza n’a laissé que peu de place aux adventices. Au printemps, il n’y avait pas nécessité d’intervenir et c’était d’ailleurs impossible à cause de la pluie. C’est la première année que je ne bine pas du tout. »
EN CHIFFRES
Tournesol et colza dédiés à la production d’huile à la ferme
Gaec de la Seine (Pascal, Sylvie et Louis Guérin) à Billy-lès-Chanceaux (Côte-d’Or)
265 hectares dont 25 de blé tendre, 20 d’orge de printemps, 20 de petit épeautre, 20 de seigle, 20 de sarrasin, 20 de luzerne déshydratée, 10 de lentille, 3 de moutarde
15 ha de colza et 10 de tournesol dédiés à la production d’huile à la ferme
100 à 120 ha de prairies temporaire et permanente pour un troupeau de vaches allaitantes limousines
Sols argilo-calcaires superficiels à RU faible