Manche
« Une production fragilisée par ses besoins en main-d’oeuvre »
La SCEA Hubert cultive des salades dans les polders de la baie du Mont-Saint-Michel. Les deux frères associés ont choisi de mécaniser la récolte pour tenter de recruter plus facilement du personnel.
La SCEA Hubert cultive des salades dans les polders de la baie du Mont-Saint-Michel. Les deux frères associés ont choisi de mécaniser la récolte pour tenter de recruter plus facilement du personnel.


« Si les difficultés avec le personnel continuent, nous serons contraints de diminuer notre surface de salades », regrettent Stéphane et Christophe Hubert qui en cultivent 32 ha à Boucey, dans la Manche. Pourtant, la production de salades a connu un fort développement ces dernières années au point de devenir la culture légumière principale, devant les carottes (15 ha), le céleri rave (10 ha), les navets (9 ha), les pommes de terre (2,5 ha) et les choux blanc et rouge (1 ha) sur les 210 ha mis en culture. L’exploitation dispose de 70 ha de terres limono-argileuses, fines, légères et drainantes, favorables à la culture légumière dans les polders, et d’une cinquantaine d’hectares de terres un peu plus lourdes dans les marais. « Nos terres ont été fatiguées par la culture de carottes, reconnaît Stéphane Hubert. Nous avons misé sur la diversification en salade afin de limiter la désinfection des sols », expliquent les professionnels.
Des difficultés de recrutement
Depuis une dizaine d’années, l’exploitation emploie du personnel. Neuf salariés actuellement. Mais en 2015, face aux difficultés de recrutement, Christophe et Stéphane Hubert ont décidé de mécaniser la récolte. Pas moins de 100 000 euros ont été investis dans une machine neuve, cofinancée par le fonds opérationnel Agrial. L’objectif était d’apporter plus de confort au personnel afin de faciliter l’embauche et d’anticiper la mise en oeuvre du compte pénibilité des salariés. L’utilisation de la machine évite aussi aux produits et caisses de toucher le sol afin de répondre aux exigences des clients. Véritable aide à la récolte, la machine déplace les salades coupées et déposées par le personnel dans des bols jusqu’à une plate-forme de conditionnement. Cinq à six personnes assurent la récolte au sol. Quatre salariés travaillent sur la plate-forme. Les salades sont reprises une par une pour être mises en caisse avant la palettisation. « Nous ne voulions pas d’une machine qui coupe les salades car, selon le type de salade, nous n’avons pas le même nombre de rangs par planche, quatre en laitue et trois en frisée et iceberg, précisent les spécialistes. Nous avions vu cette machine dans le Finistère chez des collègues. Nous avions aussi réfléchi au tapis à choux-fleurs associé à une remorque mais nous craignions que l’ensemble ne se déplace pas facilement sur des terres humides. Notre machine possède quatre roues motrices et présente l’avantage de déposer la palette au sol ».
Un investissement de 100 000 euros
Malheureusement, l’arrivée de la machine n’a pas résolu les problèmes de main-d’oeuvre. La machine impose une cadence élevée fixe identique pour tous les opérateurs qui n’est pas toujours appréciée. « Le personnel ne reste pas, précise Stéphane Hubert. Ce qui agace les autres salariés stables qui doivent compenser les absences. Cela engendre de la mauvaise humeur, surtout lorsque les absents ne préviennent pas », commentent les responsables.
Les deux frères adhérents de l’OP Légumes Agrial travaillent en contrat avec la société Florette basée dans la Manche et détenue par la coopérative Agrial. « Ce contrat sécurise notre revenu. Nous connaissons les prix de vente avant la mise en culture ». Les salades sont conditionnées en prêt à l’emploi sous la marque Florette. La frisée part en frais pour le Royaume-Uni. Les cahiers des charges sont revus chaque année en fonction des exigences des clients. Les exploitants ont en outre l’obligation de respecter le référentiel environnemental Leaf. Les retours sont rares. Un seul l’an passé, zéro cette année. « En moyenne, sur la station de Saint-Georges-de-Gréhaigne, les retours sont de 5 à 6 % pour l’ensemble des producteurs, signale Thierry Bisson, directeur des ventes salades pour Agrial. « Nos objectifs sont élevés, reconnaît Stéphane Hubert, notamment sur les retours et le poids par motte plantée. En moyenne, la salade reste le légume le plus intéressant sur notre exploitation. »
En pleine saison, les salariés passent 80 % du temps sur la salade. La récolte s’étale sur cinq à six jours par semaine. Après la récolte du matin, les salariés assurent la plantation, le sarclage, notamment dans la frisée, ou bien travaillent dans les navets.
Trois variétés pour plus de souplesse
Les frères Hubert cultivent trois types de salades : laitue, chicorée, iceberg. « Cela apporte de la souplesse pour ramasser les produits au bon moment, explique Christophe Hubert. Pour réussir la salade, mieux vaut avoir l’oeil dessus tous les jours. » Il faut surtout surveiller le mildiou dans la laitue, le bordage, la présence de noctuelles et de pucerons, la nécrose dans la frisée et décider de la récolte au bon moment. La SCEA Hubert est équipée de deux planteuses qui permettent un débit de 10 000 mottes à l’heure avec six à sept personnes. « Nous protégeons au maximum la plante à l’implantation. Plus tard, les interventions sont rapidement limitées par le délai avant récolte. Ici, nous produisons sans irrigation. On en aurait parfois un peu besoin mais il n’y a jamais de catastrophe. »
Thierry Bisson, responsable production OP Légumes Agrial
« Une exploitation d’élite »
"Implantée au coeur des polders de la baie du Mont-Saint-Michel, la SCEA Hubert cultive ses légumes dans une zone exceptionnellement productive. Ce contexte, associé au travail consciencieux et exigeant des deux producteurs, confère à leur exploitation le statut d’élite. La production de salade dans la baie du Mont-Saint-Michel s’est développée à la fin des années 1980 pour répondre aux besoins du marché des salades prêtes à l’emploi. Le développement est réussi grâce à un terroir exceptionnel. Les sols sont limoneux et restent frais en été. Les salades y poussent lentement et se conservent très longtemps après récolte. Environ 600 ha de salades sont plantées chaque année dans la baie : 200 ha de frisées, 180 ha de laitues icebergs, 120 ha de laitues beurre, 75 ha de scaroles et 25 ha de batavia."