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[Coronavirus Covid-19] : Les villes doivent repenser leur système alimentaire pour être plus résilientes et durables

La crise sanitaire a révélé la fragilité des villes quant à leur approvisionnement alimentaire. Exposant des exemples internationaux réussis de résilience, l’association Let’s Food propose de repenser les systèmes alimentaires urbains.

© Julia Commandeur - FLD

Face à la crise sanitaire, l’association Let’s Food* a interrogé collectivités et société civile dans le monde sur les impacts et solutions d'adaptation. Quels systèmes alimentaires ont été les plus résilients ? Comment les différents maillons de la chaîne ont-ils réagi ? Les consommateurs ont-ils pris le temps de comprendre la complexité des systèmes et fait évoluer leurs pratiques alimentaires ? Les conclusions, publiées le 6 juillet, proviennent de 87 répondants majoritairement d’Europe (60 %) et majoritairement d’associations (33 %) et entreprises (28 %).

Dépendance aux importations, perte de pouvoir d’achat et maladies de “mal-bouffe”

Let’s Food souligne en premier lieu la dépendance des centres urbains aux importations que la crise a mis en exergue. « A centraliser la demande, multiplier les intermédiaires et allonger les distances, les risques se sont progressivement accrus pour tous les maillons de la chaîne alimentaire en cas de rupture. »

La crise a aussi dégradé les situations socio-économiques des ménages (arrêt des activités, hausse des prix et difficulté à se nourrir). Et les demandes d’aides alimentaires, à charge des associations et des collectivités principalement, ont explosé. En France, les Restos du Cœur estiment que le nombre de bénéficiaires a été multiplié par 3 au cours du premier mois du confinement.

Enfin, la crise est un « véritable coup de projecteur sur les conséquences sanitaires des changements de pratiques alimentaires en villes (produits trop gras, sucrés, salés, qui entraînent maladies cardiovasculaires, obésité et diabète et donc une fragilité face au Covid-19) ».

Mesures d’urgence : mise en relation entre production et consommation

« Face à la difficulté des Etats de répondre aux spécificités de chaque territoire, les villes se sont mobilisées pour assurer la sécurité alimentaire de leurs habitants. Les mesures ont avant tout visé à faciliter la rencontre de l’offre et de la demande locales tout en subventionnant l’accès aux produits frais pour les plus vulnérables », analyse l’enquête.

Portées par des collectivités (Bordeaux, Lyon, Marseille) ou des acteurs de la société civile (en Colombie, à Guanajuato au Mexique, Valparaiso au Chili, en Italie), des plateformes internet de mise en relation ont été mises en place. Des organisations collectives de producteurs ou des organisations entre tous les maillons ont permis le maintien du commerce et de la logistique. En France, les marchés de gros ont joué un rôle important pour la mutualisation et la coordination des producteurs locaux. Certaines enseignes de la GMS ont aussi renforcé les partenariats locaux (“Grow with Aldi” en Irlande, “Alliances Locales” de Leclerc en France).

Le digital, la fausse bonne idée ?

En France, en avril 2020, du fait des contraintes imposées par le confinement, le e-commerce a atteint 9,5% de part de marché. A l’échelle mondiale, les prévisions indiquent que d'ici 2024, 70% des consommateurs utiliseront internet pour leurs achats alimentaires (25% aujourd'hui). Alors, le tout digital, bonne ou mauvaise idée ? « Ces solutions digitalisées démocratisent l’accès à des produits locaux en facilitant la commande et la livraison mais accentuent la fracture numérique » et leur durabilité (coût énergétique, multiplication des services de livraisons…..) pose question.

Hausse des prix : de l’importance des ceintures vertes et des jardins urbains

Certains centres urbains avaient préservé les coopérations avec leur arrière-pays (Hô Chi Minh Ville au Vietnam ou Cork en Irlande) ou leur ceinture verte voir leur production urbaine (balcons, jardins partagés ou encore les jnens, jardins alimentaires autour de la ville à Sfax en Tunisie) et se sont montrés plus résilients, avec une atténuation de la hausse des prix des fruits et légumes.

Distribution de paniers et prix réduits pour les plus démunis

Parmi les exemples de succès concernant l’accès alimentaire des populations les plus vulnérables, citons : les cartes alimentaires à Lecco en Italie, permettant à leurs détenteurs d’avoir des prix réduits en GMS ; la distribution de paniers “santé” à près de 2,5 millions de familles dans l’Etat de Valparaíso au Chili (où 74 % de la population est obèse ou en surpoids) ; la distribution ou la revente « à des prix raisonnables » de paniers de légumes agroécologiques achetés à des producteurs locaux par la préfecture de Azuay en Equateur (30 000 paniers entre mars et avril) ; ou encore la procédure d’urgence de de la Métropole Aix-Marseille-Provence et du Pays d'Arles qui a mobilisé sept prestataires pour livrer pendant quatre semaines 27 000 paniers de fruits et légumes locaux auprès de 130 000 personnes bénéficiaires.

Leçons de crise et refonte des systèmes

A long terme, les auteurs suggèrent de s’attaquer aux causes de la pandémie, qu’ils attribuent entre autres « au système industrialisé » et « à l’élevage intensif », de renforcer la communication autour de l’importance d’une alimentation saine, favoriser l’agriculture durable et encourager l’auto-production, et que « la sécurité alimentaire soit désormais une compétence obligatoire des communes ».

 

*L’association Let’s Food analyse les systèmes alimentaires territoriaux à travers le monde et accompagne les démarches multi-acteurs pour développer résilience, durabilité et sécurité alimentaire à l’échelle locale.

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