Insolite
Dans l’Eure, Javier Gorga cultive champignons et légumes bio et exotiques
A Louviers, dans l’Eure, Javier Gorga est à la tête d’une ferme un peu particulière : il y cultive de façon biologique des champignons exotiques mais aussi des légumes sans serre. Récit d’un parcours pour le moins atypique d’un exploitant non issu du monde agricole.
A Louviers, dans l’Eure, Javier Gorga est à la tête d’une ferme un peu particulière : il y cultive de façon biologique des champignons exotiques mais aussi des légumes sans serre. Récit d’un parcours pour le moins atypique d’un exploitant non issu du monde agricole.
Né en Uruguay, Javier Gorga a décidé de s’installer en France après avoir rencontré sa femme en 2008 lors d’une Armada à Rouen alors qu’il y participait en tant qu’officier de marine. Des projets plein la tête, il trouve à Louviers, au bord de l’Eure, un endroit qui lui permet de les concrétiser. Nous sommes en 2020 et c’est le début de l’aventure. Dans un bâtiment de 700 m² dans lequel il a aménagé cinq chambres totalisant 300 m², il se lance dans la culture de champignons exotiques pour les vendre à des primeurs, restaurateurs mais aussi pour des usages médicinaux, ce qui est très rare en France, l’essentiel des fournisseurs pour les laboratoires étant basés en Chine. « Les champignons sont beaux, bons et font du bien » résume l’exploitant.
Une centaine de variétés de tomates
Autodidacte, il apprend vite et se lance seul. « Je voulais faire quelque chose de différent, je n’aime pas faire les choses comme tout le monde » glisse dans la conversation celui qui est aussi maraîcher. Javier Gorga a en effet réalisé son idée première qui était de faire du « maraîchage exotique ». Quand l’occasion s’est présentée et pour combler « le vide laissé par les champignons l’été puisque l’on consomme surtout les champignons en hiver », il a planté des légumes de saison, parfois rares, dans les trois hectares de terre qui se situent derrière la champignonnière. Et les résultats sont à la hauteur de ses espérances puisqu’il est parvenu à récolter, entre autres, une centaine de variétés de tomates, une quarantaine d’aubergines et une trentaines de piments. Autre corde à son arc, lorsqu’il a du temps libre, Javier Gorga s’adonne aussi à une autre passion : le travail du bois. Il réalise des planches à découper avec un effet 3D.
Légumes de saison…
Fier de sa production, Javier Gorga explique : « Je cultive des légumes de saison, je n’ai pas besoin de serre. Et comme le terrain est situé en contrebas de l’Eure, il y a zéro irrigation. Je veux faire découvrir aux gens le goût des bons produits que je cultive en bio et que je vends au même prix que les légumes conventionnels ». Sa palette de débouchés est large puisqu’il vend sa production à des magasins bio, à des primeurs, à ceux qui sont intéressés par la cueillette mais aussi à des restaurateurs qui lui passent parfois commande de légumes rares pour les mettre à la carte de leur table de prestige, en France mais aussi à Dubaï, en Finlande ou encore en Belgique.
… et champignons rares
La production de champignons est elle aussi certifiée bio. Javier Gorga produit une dizaine de variétés en tout. Les uns sont à usage médicinal comme le reishi ou le cordyceps qui n’ont pas d’intérêt gustatif mais un grand potentiel thérapeutique. Il les vend à des laboratoires, à la start-up French Mush qui commercialise sous forme de poudre ou de gélules, les principes actifs ultra-concentrés de quatre champignons médicinaux, « plus qu’un client, un partenaire » confie le producteur, ou à des naturopathes sous la marque Gorga Champignons.
Après être récoltés, les champignons sont séchés puis réduits en poudre. « C’est un marché en devenir » explique Javier Gorga qui commercialise donc l’autre moitié de sa production à des restaurateurs haut de gamme. Passionné par tous les champignons du monde, il a cherché à faire découvrir de nouvelles espèces rares aux restaurants gastronomiques comme le maïtaké, le shitaké ou diverses variétés de pleurotes.
Les champignons qui poussent dans la champignonnière sont cultivés avec du substrat réalisé avec des produits bio.
Les champignons poussent sans antibiotiques
« L’idée est de démultiplier les champignons à partir d’une boîte de Pétri avec du mycélium de base acheté à des sociétés spécialisées » explique Javier Gorga. Sa production est réalisée avec des matières premières qu'il va chercher localement, notamment le substrat réalisé à partir d’un mélange de sciure de bois, d’eau de pluie et de son bio dans lequel le mycélium est placé pour que le champignon se développe, le tout sans aucun apport d’antibiotiques. Il faut ensuite entre 3 mois à un an pour que les champignons se colonisent dans le substrat. Le reishi met 12 mois pour arriver à maturité, ce qui explique son prix onéreux : 1 000 euros le kilo.
« La champignonnière n’est qu’à 10 ou 15 % de sa production »
Avec un investissement de départ de 50 000 euros pour l’achat du matériel de ventilation et d’humidification, l’isolation, l’électrification et l’aménagement du bâtiment, Javier Gorga qui travaille 6,5 jours sur sept, réalise un chiffre d’affaires d’environ 100 000 euros avec une dizaine d’espèces cultivées et une production de 5 à 6 tonnes par an alors qu’il confesse que « la champignonnière n’est qu’à 10 ou 15 % de sa capacité de production ». Le champignonniste confie qu’il pourrait aisément en produire une quarantaine, c’est là son prochain objectif.