Les chèvres, championnes de l’adaptation au pâturage
Apprentissage, durée, quantité d’herbe disponible… une série d’essais menée par l’Inrae décrypte les comportements des chèvres face à différentes situations au pâturage.
Apprentissage, durée, quantité d’herbe disponible… une série d’essais menée par l’Inrae décrypte les comportements des chèvres face à différentes situations au pâturage.
« La gestion de l’alimentation des chèvres est un point de vigilance majeure en élevage caprin, particulièrement au pâturage où la ration n’est pas connue précisément », exposent Rémy Delagarde, Hugues Caillat et Alexandra Charpentier, chercheurs à l’Inrae dans une étude publiée récemment (1). Les équipes de l’institut de recherche ont mené une dizaine d’essais avec des Alpine à la ferme de Méjusseaume (Bretagne) et à Lusignan (Nouvelle-Aquitaine) au cours des dernières années. Ces travaux ont permis de mesurer la quantité d’herbe ingérée ainsi que le temps de pâturage de chaque chèvre en essai afin de mieux comprendre et analyser le comportement des chèvres.
Les chèvres apprennent vite à pâturer !
Une première expérimentation a été menée sur « la découverte du pâturage » par un troupeau de 90 alpines en bâtiment et toujours alimentées avec des fourrages conservés secs. Si le premier jour de sortie aucune chèvre n’a pâturé pendant les deux premières heures d’accès, de vrais repas collectifs se sont rapidement mis en place. « Le temps total passé à pâturer a augmenté rapidement et fortement pour atteindre 6 h 30 pour un temps d’accès de 8 h dès la troisième semaine », précisent les auteurs. Par ailleurs, aucun tri marqué n’a été observé entre les graminées et les légumineuses présentes dans les prairies multiespèces de l’essai. Les espèces préférées en entrée de parcelle sont la chicorée et les rumex !
Pas d’effet du temps de présence au pâturage au-delà de 6 h/j d’accès
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Les essais ont montré la capacité des chèvres à pâturer et maintenir longtemps des activités de pâturage avec de longs repas tout au long de la journée, sans montrer de fatigue, contrairement aux vaches laitières par exemple. Jusqu’à 6 à 7 heures d’accès au pâturage par jour, le temps d’accès a une faible influence sur l’ingestion, la production laitière et la composition du lait, exposent les auteurs. Deux mécanismes principaux d’adaptation ont été observés : la concentration des activités de pâturage dans le temps disponible, sans repos, et la compensation partielle par une augmentation de la vitesse d’ingestion.
2,5 kg de MS/j suffisants avec une herbe de bonne qualité
L’effet de la quantité d’herbe offerte a été mesuré sur trois essais, variant de 1,6 à 3,3 kg de MS par jour. « La baisse de production et de la composition a été forte entre les niveaux moyens et bas de quantité d’herbe offerte. Dans de bonnes conditions de pâturage, avec une complémentation de 600 g de concentrés par jour, une quantité d’herbe offerte proche de 2,5 kg de MS par jour (> 4 cm), semble suffisante pour permettre d’avoir de bonnes performances et de bien valoriser l’herbe », conclut l’étude.
Avec ces premiers résultats, l’Inrae ouvre la voie à de plus amples recherches sur le lien entre gestion du pâturage et résultats technico-économiques, mais aussi sur le lien avec le parasitisme.
Mesurer l'activité des chèvres au pâturage avec précision
Pour obtenir les résultats décrits ci-dessus, les activités de pâturage des chèvres ont été enregistrées grâce à un appareil portatif, le Lifecorder Plus. Contrairement aux vaches laitières, peu d'instruments de mesure portables ont été testés sur les caprins. Les travaux de l'Inrae(1) ont permis de valider l'utilisation de cet appareil, dont la précision est qualifiée de très bonne. Pour cela, 187 heures d'observation ont été effectuées et comparées aux enregistrements du Lifecorder Plus, mesurant la durée de pâturage journalière, mais aussi la répartition des activités des chèvres au cours de la journée, le nombre et la durée des repas. Ces résultats devraient faciliter les futurs essais sur le comportement des chèvres au pâturage.