Hérault
La Chèvre baillarguoise se fait connaître
Installée dans la métropole de Montpellier, la ferme de Cédric et Nathalie multiplie les événements pour faire connaître ses fromages fermiers biologiques.
On voulait une exploitation en ville pour être près de nos consommateurs », explique Cédric Carpentier, 45 ans, installé sur le tard avec Nathalie son épouse. Après 25 ans d’agence immobilière, le couple qui s’est rencontré lors d’un BTS en transformation fromagère à l’Enil de la Roche-sur-Foron et revient à ses premiers amours en montant un élevage de chèvres aux portes de la ville de Baillargues, dans l’Hérault. Le couple se forme à l’élevage caprin car « nous savions faire du fromage mais pas forcément élever des chèvres ». Bien accueilli par leurs collègues éleveurs de l’Hérault, le couple veut aussi se faire connaître des 7 000 habitants de Baillargues et plus largement des 460 000 habitants de la métropole montpelliéraine.
Pour cela, l’emplacement est important. À la sortie de la ville, à côté de l’autoroute, près d’un rond-point, le grand bâtiment abritant chèvres et fromagerie est bien visible. La Chèvre baillarguoise multiplie aussi les animations. Notamment en juillet et août avec les « apérobiques » du mardi soir. « On sort des tables et des ballots de paille pour faire les bancs et nos clients peuvent déguster en musique les assiettes de fromages, tapas de toros ou vin bio local », sourit l’éleveur fromager qui aime à partager son métier. De 18 à 22 heures, ce sont 150 à 300 personnes qui s’assoient, consomment et deviendront plus tard des clients réguliers. Début octobre, l’événement s’est décliné en bal champêtre pour clore le mois de la transition agroécologique de la métropole. Si, jovial, Cédric s’épanouit en multipliant ces rencontres, Nathalie, plus réservée, admet parfois se fatiguer un peu à enchaîner ces rendez-vous prenants.
Coûteux passage en bio
Encore un peu la tête dans le guidon après deux ans d’installation, Cédric et Nathalie aimeraient maintenant trouver le bon équilibre. Avec 84 chèvres, 50 000 litres de lait transformés par an et deux salariés, ils cherchent à optimiser le rendement fromager et la commercialisation pour pouvoir vivre de leur métier. Après avoir investi 880 000 euros dans l’installation (bâtiment, matériel, cheptel, maison d’habitation…), ils ne se prélèvent pas encore de salaire. Le récent passage en bio pourra être une occasion de monter les prix dans les grandes surfaces, restaurants et épiceries.
Car si le troupeau continue de pâturer 81 hectares de garrigue dans le cadre d’une convention avec la commune, le passage au bio a augmenté les prix des foins de Crau, luzernes, maïs et granulés. Alors que le maïs conventionnel est à 260 euros la tonne, celui en bio est, par exemple, à 480 euros. La tonne de granulé distribué à la traite est, elle, passée de 330 à 600 euros la tonne.
Un livre de recettes avec les enfants
Autre animation sympathique coorganisée par la Chèvre baillarguoise, les parents d’élèves et la ville de Baillargues, le concours Top chèvre. 150 enfants ont imaginé 50 recettes originales à base de chèvre. Depuis la classique salade de chèvre chaud jusqu’au plus original biqu’cake, le lait et le fromage de chèvre ont été déclinés en corne, chausson, mille-feuille, makis ou raviole. Un livre d’une centaine de pages a été édité et commercialisé. Les écoles sont ainsi devenues des habituées de la fromagerie. En 2018, pas moins de 40 classes, de la maternelle au lycée, ont visité la ferme. Les enfants et leurs parents ont ensuite plaisir à revenir à la ferme.
Anciens de l’immobilier, Cédric et Nathalie connaissent bien l’importance de la communication pour vendre leurs fromages. Leur page Facebook est suivie par près de 3 000 personnes et les fromagers postent régulièrement des images de la ferme, des chèvres ou des fromages. « Dernièrement, nous avions 120 steaks de cabri à écouler, explique Cédric. Nous avons posté une photo et tout a été vendu en une matinée. »
Des chèvres à têtes de taureau
Pour l’instant, environ la moitié des fromages sont vendus en direct mais l’objectif est bien d’augmenter cette part. Ainsi, les fromagers ont étendu leurs horaires d’ouverture en semaine de 16 à 20 heures maintenant contre 17 à 19 heures auparavant. Depuis peu, ils accueillent aussi sur la ferme un magasin de producteurs où sont vendus des fruits et légumes, des terrines, des bières, des confitures et, bien sûr, les fromages de chèvre. L’idée est que ce magasin, abrité pour l’instant dans une cabane attenante, se développe et remplace la boutique des fromagers.
Les fromages lactiques de petits formats sont principalement produits à l’aide de caillé égoutté en sac. L’un d’eux, en forme de tête de taureau, est protégé par un brevet. Les fromagers ont acheté 5 000 euros la protection juridique en même temps que le bloc moule à un voisin qui arrêtait son activité. En plus des types cabécou, pélardon et bouchons apéritifs, les fromagers fabriquent des faisselles, yaourts et crèmes dessert au chocolat ou à la vanille. En étant en zone urbaine, les livraisons, le mardi et le jeudi, sont resserrées dans un périmètre de 40 kilomètres. À côté de la ville, les animaux ne peuvent pas paître sans surveillance, les temps de garde, cinq à six heures par jour, sont aussi un moment pour Cédric ou Laurie la bergère d’échanger avec les vététistes, chasseurs ou randonneurs et toujours leur faire connaître la ferme.
Une ferme aux portes de la ville
Surveillé à distance, le SBR traite les effluents
Situés en zone nitrate et pratiquant la vente directe, Cédric et Nathalie voulaient une solution discrète, clé en main et sans odeur pour traiter les eaux blanches, les eaux domestiques et surtout les 100 à 110 litres de lactosérum produits par jour. Le système SBR de la société Graf a été la solution « sans prise de tête », selon les termes de Cédric Carpentier.
Ce système de traitement biologique séquentiel est intégré dans une cuve où travaillent des bactéries aérobies soumises à des cycles d’aération et de repos. « Ici, avec une cuve de 32 m3 et 6 m² d’emprise au sol, c’est une assez grosse installation car il y a du lactosérum », explique Pascal Beckerich de la société Graf. Cependant, la cuve étant enterrée, l’installation reste discrète, ne laissant apparaître qu’un regard et une armoire de contrôle qui pilote les pompes à air et à liquide. L’armoire de contrôle mesure régulièrement les paramètres de la mini-station d’épuration et envoie les données au siège de l’entreprise, en Alsace. À travers ce suivi à distance, l’entreprise peut demander par exemple tous les trois à quatre mois de regarder le volume de boue décanté en 30 minutes dans une éprouvette. « Cela permet de voir s’il faut épandre les boues mais, ici, en un an et demi de fonctionnement, il n’y a pas eu besoin de le faire », détaille le fabricant. L’installation a coûté 30 000 euros en partie subventionnés par le Plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles.