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En Allemagne, les consommateurs s’investissent pour les chèvres de la ferme Hof Mevs

Depuis 2020, Katya et Thomas Schmidt ont repris un élevage de chèvres en Allemagne, dont la philosophie repose sur une agriculture respectueuse de l’environnement et un engagement solidaire et éthique des consommateurs.

Hof Mevs est une ferme caprine située dans le village de Schinkel, au nord de l’Allemagne. Elle se transmet depuis dix générations et suit les critères Bioland depuis 1988. Cette ferme regroupe un atelier céréalier et, depuis 2005, un atelier caprin. En 2015, elle rejoint l’association Solawi, et ce n’est qu'en 2018 que Katya et Thomas Schmidt, hors-cadre familial, sont arrivés à la ferme.

Si on regarde leurs parcours, ils ont fait quatre ans d’études afin de pouvoir s’installer dans le domaine agricole. Leur première approche a été le maraîchage et la recherche du bio-dynamisme, puis ils se sont lancés dans l’aventure chevrière. C’est ainsi qu’ils ont connu Hof Mevs. Pour Thomas, les chèvres ont toujours eu une place importante dans sa vie. Alors que pour Katya, cette installation est avant tout une aventure humaine, puis une révélation. Ils commencent par un an de salariat avant de décider de s’installer.

C’est donc en 2020, après un an de démarches administratives, qu’ils sont devenus officiellement éleveurs caprins indépendants au sein d'Hof Mevs. En 2022, ils mettent en place la fromagerie et créent ainsi une valeur ajoutée avec la production de fromages de chèvre.

Un Solawi comme une Amap

Solawi est l’acronyme de Solidarische Landwirtschaft qui est l’équivalent de notre agriculture pour le maintien d’une agriculture paysanne (Amap) en France. Le but de cette association est la production de produits frais, locaux et de saison. Elle soutient une agriculture respectueuse de l’environnement et un engagement solidaire et éthique. Les membres de Solawi s’engagent pour un an auprès des producteurs, en apportant un soutien moral, financier et parfois manuel.

Des réunions mensuelles et des visites de fermes ou des chantiers collectifs quatre fois par an

Pour Katya et Thomas, cela permet de partager les risques, d’avoir une sécurité au niveau de la planification, ainsi qu’une sécurité financière. Ils peuvent alors produire suivant leur philosophie. En retour, ils s’engagent à livrer leurs produits caprins chaque semaine, ainsi qu’à communiquer. Une réunion par mois est organisée avec les adhérents pour faire les comptes, le point sur les besoins, les futurs investissements ou développements. Il y a aussi des festivités, comme des visites de fermes ou des chantiers collectifs qui sont organisés au moins quatre fois par an. Ils instaurent ainsi une réelle transparence vis-à-vis du consommateur.

Le Solawi de Schinkel regroupe environ 203 ménages, soit environ 400 personnes qui viennent se partager les denrées produites dans les vingt points de retrait situés à Kiel, la grande ville la plus proche.

Une conduite extensive avec des lactations de deux ans

Les 90 chèvres de l’élevage font des lactations de deux ans. Elles sont réparties en deux groupes, avec une alternance au niveau des mises bas, afin de produire du lait toute l’année. Les chevreaux sont élevés sous la mère jusqu’à leurs trois mois et les chevrettes sont mises à la reproduction dans leur neuvième mois. La reproduction est naturelle et saisonnée avec un début des mises bas en février. Petite particularité allemande : Katya et Thomas engraissent les chevreaux, puis vendent en produits carnés.

Au niveau de l’alimentation, les chèvres sont nourries d’enrubanné de trèfle toute l’année et pâturent durant les beaux jours dans l'enclos de 1,6 hectare, accolé à la ferme. L’été, lorsqu’il n’y a plus d’herbe, les éleveurs affouragent en vert. C’est une alimentation surtout protéique, donc, lors de la traite, ils complémentent avec un mélange contenant de l’orge, du maïs, de la féverole ou des pois produits à la ferme. Ils donnent aussi du tourteau issu de la production de l’huile.

« Il est très dur de faire du foin de qualité dans le nord de l’Allemagne, explique Thomas. C’est pourquoi nous faisons de l’enrubanné sur des prairies de trèfle, ce qui donne un bon apport protéique. »

Thomas transforme environ 300 litres en fromage tous les mercredis pour le réseau Solawi. Le reste du lait, entre 650 et 1 100 litres, est vendu à la fromagerie Backensholzer Hofs. Le lait traité par Thomas est pasteurisé et transformé en camemberts, fetas ou fromages frais. La fromagerie peut ainsi approvisionner les membres de Solawi, les épiceries locales et la vente à la ferme.

Un rationalisation de l’élevage

Pour l’avenir de la ferme, Katya et Thomas ont pris la décision de faire du tri dans leur cheptel. Cette année, davantage de chevrettes ont été gardées afin de pouvoir réformer les chèvres malades, maigres ou trop âgées.

Un de leur souhait serait de se dégager plus de temps en famille, notamment avec leur fils, Noah, et pour cela, ils pensent diminuer le cheptel tout en gardant une économie sereine. Ils ont aussi des projets plus personnels, comme l’achat d’une maison afin de gagner en indépendance.

« Une vision globale allant de la production à la consommation »

Pour Cécile Jouffrey, cycliste et future éleveuse, cette ferme inclut le point de vue des consommateurs.

« Cette ferme m’a impressionnée par sa conduite extensive, les interactions entre tous les ateliers et son système de commercialisation diversifié. De plus, les produits transformés sont en lien avec d’autres artisans comme la boulangerie de Schinkel, BioLand-Kornkraft. Toutes ces productions et produits transformés offrent un grand panel de produits, ce qui est attrayant pour le consommateur. Le fait d’inclure les consommateurs à ce fonctionnement donne une vision globale, allant de la production à la consommation. »

Repères

Les chèvres en Allemagne

L’Allemagne compte 155 000 chèvres qui sont à 86 % dans des exploitations de moins de vingt têtes et à 91 % dans des élevages de moins de cinquante têtes. La chèvre est ainsi davantage considérée comme un loisir plutôt qu’une source rémunératrice. La plus grosse région caprine est la Bavière, avec 31 % des exploitations du pays, suivi par le Bade-Wurtemberg avec 25 % et, enfin, de la Rhénanie-du-Nord-Westphalie (9 %).

Chiffres clés

Chèvrerie d'Hof Mevs

2 UMO + main-d’œuvre volontaire
80 chèvres
70 000 litres de lait par an
130 000 euros de chiffre d’affaires : 58 % Solawi, 33 % laiterie et 9 % vente directe
1,6 ha de SAU

22 000 km à vélo à la découverte des fermes caprines

Cécile, 32 ans, travaille depuis trois ans en tant que chevrière dans plusieurs fermes de Côte-d’Or. Elle a choisi de quitter le confort de sa vie actuelle afin de partir découvrir le fonctionnement d’autres systèmes caprins. Voilà deux ans qu’elle préparait assidûment ce projet, et l’aventure a commencé il y a quelques mois. Depuis, elle parcours l’Europe accompagnée de sa chienne, Lula, bicyclette au bout des pieds, allant de ferme en ferme et bivouaquant en chemin.

Le voyage a débuté le 1er avril 2024 en direction de l’Allemagne, puis suivra le Danemark, la Suède pour redescendre par la Finlande, traverser l’Europe de l’Est, découvrir la Grèce et suivre toute la côte méditerranéenne. Près de 22 000 km sont prévus pour un an et demi de voyage, avec pour objectif de visiter au moins une chèvrerie par pays.

Ce début de voyage à commencer par un temps d’avril quelque peu surprenant et inattendu : beaucoup de pluie, une vague de froid, des averses de grêle… Mais qu’importe, cela fait partie de la beauté du voyage que de se soumettre aux aléas climatiques. Lors des premières haltes dans les fermes allemandes, la bienveillance et la gentillesse des éleveurs qui lui ont ouvert leurs portes n’invitent qu’à renforcer son envie de découverte et de voyage. L’accueil étant si chaleureux, le plus dur, c’est de repartir ! Elle garde en tête l’envie de revenir en France pour s’installer dans sa propre ferme. Elle pourra ainsi continuer de faire vivre ce voyage en utilisant des méthodes et organisations du travail découvertes en chemin.

Rédaction Réussir

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