Chez Côme Deffontaines en Indre-et-Loire
Une installation minutieusement préparée
Installé hors cadre familial depuis janvier 2015, Côme Deffontaines dispose déjà d’un troupeau Charolais bien en place. L’installation a été minutieusement préparée et les réglages du système fourrager ont vite avancé.
Installé hors cadre familial depuis janvier 2015, Côme Deffontaines dispose déjà d’un troupeau Charolais bien en place. L’installation a été minutieusement préparée et les réglages du système fourrager ont vite avancé.
Il y a deux ans, Côme Deffontaines s’est installé seul avec un troupeau Charolais de 65 vêlages. Situé à une dizaine de kilomètres de l’exploitation de son père (ancien éleveur laitier, aujourd’hui apiculteur), cet élevage inscrit faisait preuve de performances honorables. Côme Deffontaines y a participé aux travaux depuis « tout petit » pendant les vacances scolaires, et donc il connaissait très bien l’exploitation. Quand la perspective d’une installation s’est précisée, une expertise a été commandée à un cabinet et une négociation avancée avec l’éleveur cédant a été réalisée. « J’ai énormément travaillé le prévisionnel, avant d’avancer dans ma décision de reprendre ou pas cette exploitation », explique l’éleveur. Il avait d’ailleurs auparavant travaillé pendant trois ans en tant que chargé de clientèle agricole dans une banque, avant de bifurquer complètement sur d’autres métiers (charpentier…). Une année de parrainage a ensuite permis de bien ficeler le projet avant de se jeter dans le grand bain.
Un peu de renouvellement de matériel a été fait l’année d’avant son installation. Avec une petite moitié des surfaces en cultures fourragères, il s’est engagé dans la MAE(1) polyculture élevage pour cinq ans. Il bénéficie aussi de l’aide aux protéagineux. Le pois ayant été abandonné en raison de problèmes d’irrégularité du rendement, de verse et de bruche, la féverole est entrée dans l’assolement sur cinq hectares (rendement visé de 35 à 40 quintaux). Les sols sont hétérogènes, de qualité très variable, la partie « plaine » présente un potentiel moyen.
L’un des points sur lequel Côme Deffontaines a du travail est le groupement des vêlages. Ils sont organisés entre début septembre et fin décembre et s’étalent un peu sur janvier. L’objectif de l’éleveur est d’arriver à bien les centrer sur les mois de septembre et octobre. Avec un taux de renouvellement de plus de 30 %, en réformant le plus possible les vaches qui vêlent les dernières, l’éleveur estime qu’il lui faudra une petite dizaine d’années pour y arriver. Il doit en effet en même temps travailler sur les facilités de vêlage. Si 80 % des vêlages se sont déroulés sans aide l’an dernier, c’était le cas pour 60 % seulement d’entre eux l’année précédente. Environ 60 % des vaches sont inséminées. L’éleveur observe les chaleurs quatre fois par jour. Un taureau assure le rattrapage. L’IVV était de 391 jours l’an dernier et 367 jours pour la campagne précédente. « Le troupeau est typé viande et manque un peu de gabarit. Je sélectionne pour faire progresser le développement squelettique. » Côme Deffontaines est adhérent au contrôle de performances en VA4. L’Ivmat du troupeau a beaucoup progressé sur les trois dernières années, et atteint 104,6 de moyenne.
Pâturage tournant avec changement de paddocks tous les 4 à 5 jours
L’autre point à régler est un problème de diarrhées chez les veaux naissant en fin de campagne. Si l’éleveur a réussi à contenir la maladie l’année dernière, cette année il déplore sept pertes (les seules de l’année). Cet hiver, une analyse de selles du premier veau qui a déclaré la maladie a permis de cibler le traitement antibiotique pour les suivants. C’est E. coli K99 qui est en cause. L’année prochaine, les vaches seront vaccinées, bien que ce ne soit pas facile car la première injection est à faire au pré où il n’y a pas encore de cornadis… et Côme Deffontaines compte modifier sa case de vêlages et redoubler d’effort sur l’hygiène des soins aux nouveau-nés.
La conduite des surfaces fourragères est déjà très bien maîtrisée. Sur les six hectares semés de maïs ensilage, l’éleveur dispose d’une marge de sécurité car il a besoin d’environ 4,5 hectares. « Ici, en non irrigué, il n’est pas toujours intéressant de récolter du maïs grain. » Toutes les surfaces en prairies sont déclarées en temporaires. « Je veux pouvoir de façon souple les mettre deux ans en cultures avant de ressemer une prairie. » Les animaux sortent au pré entre mars et avril selon la portance des sols. Côme Deffontaines a beaucoup travaillé sur la conduite du pâturage avec l’appui technique du GDA de la chambre d’agriculture d’Indre-et-Loire. Il se sert de son herbomètre pour faire son planning, et fait tourner les lots tous les quatre à cinq jours au printemps, une fois par semaine au maximum. « Maintenant je récolte en enrubannage précoce 50 % de la surface qui auparavant étant dédiée uniquement au pâturage. La pousse est homogène, et elle garde toute la saison une bonne valeur alimentaire avec des légumineuses bien présentes (environ 20 % du couvert). » Des clôtures avec piquets en fibre et un fil sont installés au printemps. « Les animaux deviennent dociles et il me faut seul cinq à dix minutes pour changer un lot de paddock, même si j’ai parfois des chemins à faire traverser. » Les prairies reçoivent de l’azote entre 200 et 250 °C cumulés depuis le 1er janvier (30 à 60 unités selon le potentiel et le nombre de coupes). L’éleveur distribue très rarement du foin au pré (l’an dernier un peu en août).
90 % des vaches de réforme en filière Bœuf fermier du Maine
Toutes les vaches qui ont moins de neuf ans — soit 90 % d’entre elles — sont commercialisées dans la filière label rouge Bœuf fermier du Maine, affiliée à la démarche Bleu Blanc Cœur. « La plus-value est d’environ 50 centimes par rapport aux cotations, sur des carcasses de 480 kilos de moyenne (qui varient entre 460 et 500 kilos). »
Les petits veaux reçoivent un mash, distribué dans leurs cases au nourrisseur. Les mâles sont sevrés au moment où ils montent dans le camion de leur acheteur. « Je vends des broutards jeunes et habitués au concentré. L’an dernier, le premier lot a été vendu le 30 mars. Ces broutards pesaient 270 kilos sont partis à 950 euros », explique Côme Deffontaines. Au total, leur poids est compris entre 280 et 300 kilos, entre l’âge de six et dix mois. Il y a trois acheteurs potentiels : l’organisation de producteurs Agrial et deux négociants.
Pour les vaches après vêlage et les génisses, Côme Deffontaines distribue un mélange d’orge, féverole et d’un aliment complémentaire du commerce. Il fait appel à une entreprise qui se déplace sur l’élevage avec un camion pour réaliser l’aplatissage. « Cinq tonnes de mélange est aplati en trois quarts d’heure et stocké en big bag (37 €/t). Et le réglage de l’aplatisseur est impeccable. » Fini la corvée d’aplatissage et de respirer de la poussière (1 % d’huile étant ajouté), ce qui est très important pour les voies respiratoires des animaux et pour celles de l’éleveur.
(1) Mesures agro-environnementales et climatiques.Application de gestion du troupeau sur smartphone et détecteur de vêlages
Côme Deffontaines se sert beaucoup de son application pour smartphone Smart’Pilot, en particulier au moment de la reproduction. Elle tient lieu de carnet sanitaire, permet la notification des mouvements, donne accès à toutes les informations détenues par la coopérative d’IA et le contrôle de performances. La saisie est possible en tout lieu, couvert ou non par le réseau. Les informations ne sont pas stockées sur le smartphone mais sont sécurisées à distance sur un serveur. Smart’Pilot est relié à Osmos'Pilotage (outil de pilotage de troupeau version ordinateur) (166 € HT/an).
Il s’est aussi équipé depuis deux saisons d’un système de détection des vêlages, dont le capteur se fixe sur la queue de la vache (SmartVel). « C’est très simple à mettre en place et cela marche parfaitement bien. Je me déplace beaucoup moins pour rien. Quand je reçois une alerte, je regarde s’il s’agit d’une vache dont le vêlage est a priori facile. Dans ce cas, j’attends une demi-heure avant d’aller voir si tout se passe bien. Le coût est assez élevé (environ 3500 €) mais j’estime que cela est valable étant donné la tranquillité et le temps gagné avec cet équipement. Je l’estime aujourd’hui amorti car il m’a permis de sauver plus d’un veau par campagne. Il peut aussi permettre de soigner un retournement de matrice dans la mesure où il est détecté dans l’heure. »
"Beaucoup de progrès en deux ans"
Installé depuis deux ans, Côme n'a cessé de progresser dans la conduite de son troupeau: 12 vaches de plus, 50 jours de gagnés sur son IVV et un gain de cinq mois sur l'âge au premier vêlage.
Armé de courage, il s'est installé hors cadre familial, Côme n'hésite pas à investir dans les nouvelles techniques. Et grâce à l'ensemble des actions mises en place sur son exploitation, il a pu gagner 4400 euros sur sa reproduction et 3000 euros grâce à la mise en place du pâturage tournant.
"Une formation à l'autonomie alimentaire"
« Nous avons travaillé avec Côme depuis son projet d’installation à la mise en place d’un système de production qui soit robuste sur les plans technique et économique, et qui soit vivable. L’idée d’utiliser au mieux les processus naturels liés aux légumineuses et à la maximisation de la pousse de l’herbe est rapidement devenu une évidence. Cela passe par le pâturage tournant. L’autre axe de travail consiste à sécuriser les stocks avec des mélanges de céréales et protéagineux immatures récoltés à partir de la mi-avril. Côme fait partie d’un groupe d’éleveurs se formant sur l’autonomie alimentaire ». Stéphane David