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Négociants en bestiaux : « Face à la baisse de production, nous avons choisi d’unir nos forces »

Depuis le début de l’année, une nouvelle alliance a vu le jour entre trois négociants en bestiaux situés dans le bassin charolais. Sur un marché où l’offre ne cesse de s’amoindrir, Robert Corneloup, Stéphane Philibert et Bruno Ducerf se sont associés pour rester compétitifs.

Depuis le 1er janvier 2023, une nouvelle entreprise de commerce de bétail a vu le jour, baptisée Alliance du charolais, en Saône-et-Loire. Elle est le fruit d’un partenariat de longue date entre trois négociants en bestiaux : Robert Corneloup, Stéphane Philibert et Bruno Ducerf. « Dans un contexte de baisse structurelle de l’offre, nous sommes parvenus à conserver nos volumes d’achat en mutualisant nos forces, révèle Stéphane Philibert. Ce plus large choix dans la marchandise nous permet de constituer des lots plus homogènes et de meilleure qualité. Nous augmentons ainsi nos chances de servir à nos clients le produit le plus adapté à leurs attentes. C’est un atout de taille pour aller chercher des partenariats aussi bien auprès des éleveurs apporteurs que des acheteurs français ou étrangers ».

Si la structure de commerce Alliance du charolais est nouvelle, la génèse de ce travail d’équipe remonte, elle, à plus de vingt ans. Déjà en 2003, Robert Corneloup et Stéphane Philibert avaient fait le choix de se regrouper. Leur siège étant basé à Curbigny, ils organisent leur tournée principalement dans l’Allier, la Nièvre, la Saône-et-Loire et les départements limitrophes. En 2010, ils s’associent avec Parma France pour l’activité export de broutards et laitonnes charolais vers l’Italie. La même année, Bruno Ducerf devient l’un de leurs principaux fournisseurs. « Cette association nous a permis d’étoffer peu à peu nos approvisionnements et elle nous garantit un fonds de commerce sécurisé à la vente », évoque Robert Corneloup. L’affaire fonctionne puisqu’en 2021, un autre négociant, Alexandre Berthet, rejoint la société en tant qu’associé. L’entité, renommée Parma charolais, compte 70 000 broutards commercialisés sur l’année, via deux centres de tri à Curbigny et à Cortambert (SAS Berthet).

Un nouvel essor dans le commerce de viande

La SAS Alliance du charolais est, quant à elle, spécialisée dans le commerce de viande et de femelles maigres. Si Robert Corneloup et Stéphane Philibert ont toujours conservé leur association d’origine pour la vente de ces catégories, l’arrivée de Bruno Ducerf apporte un potentiel important au niveau du réseau d’abattage et donne un nouvel élan à l’activité. Le trio ambitionne de commercialiser près de 20 000 têtes à l’année, dont 60 % de bêtes grasses et le reste en maigre, auprès d’une quinzaine d’abattoirs localisés dans la région. La majeure partie est livrée en direct abattoir. Sinon, un tri intermédiaire est réalisé au centre d’allotement de Bruno Ducerf, à Saint-Julien-de-Civry, à 10 km du siège, à Curbigny. Voyant les abatteurs de plus en plus demandeurs, les négociants entendent développer ces filières de proximité. « Nous commerçons notamment des vaches, génisses grasses et bœufs sous label », indique Bruno Ducerf, qui estime 20 % des volumes de conformation supérieure. « L’enjeu est d’aller chercher de la valeur sur ces circuits de cheville dès que les catégories d’animaux le permettent », ajoute-t-il.

Construire une relation de confiance

Entre la société Parma charolais et celle Alliance du charolais, les associés concentrent un portefeuille d’environ 2 000 éleveurs fournisseurs. Ils réalisent la collecte 100 % en ferme. « La restructuration de nos activités n’a rien changé dans nos relations avec nos apporteurs et nos clients. Ces derniers conservent leurs interlocuteurs habituels. Nous avons juste davantage de pouvoir à la vente, grâce à des volumes plus garnis », indique Bruno Ducerf. « J’apprécie cette liberté de fournir en volumes et leur transparence sur les débouchés », témoigne un des éleveurs fournisseurs historiques, qui livre, depuis vingt-cinq ans, toutes ses vaches et génisses grasses, ainsi que 60 à 70 taurillons chaque année. Pour tisser ce lien de confiance, les négociants en bestiaux s’engagent sur un prix plancher avec l’éleveur mais pas que. « Nous faisons en sorte d’être les plus réactifs possibles et d’assurer un ramassage régulier. Quand nous nous engageons à prendre une bête, nous ne la faisons pas attendre en ferme », soutient Robert Corneloup. Ceci implique une organisation bien rodée entre la collecte, le centre de tri et le départ pour le site d’engraissement ou l’export.

Assurer une régularité en quantité et en qualité

La majorité des broutards sont collectés le matin en ferme et repartent le soir même du centre de tri pour l’export. S’agissant de la filière viande, les négociants privilégient la livraison en direct abattoir. « Ce sont des garanties sanitaires pour nos clients mais aussi de bien-être animal », souligne Stéphane Philibert. Pour ce faire, les associés assurent toujours une semaine « de réserve en ferme ». Ils connaissent à l’avance le potentiel disponible prêt à être ramassé et démarrent la collecte une fois que les ventes ont été organisées. Ainsi, les acheteurs sillonnent les routes toute la semaine et comptabilisent au fur et à mesure leurs volumes répartis par catégories. Le vendredi, ils se réunissent pour organiser le programme de vente. Tous les animaux sont classés au préalable en ferme en fonction de leur gabarit et de leur qualité. Ils sont réestimés à l’unité pour les gros bovins et par lots pour les broutards. « Ce fonctionnement donne de la visibilité à nos clients engraisseurs en France ou à l’export », appuie Stéphane Philibert. En parallèle, Robert Corneloup et Stéphane Philibert, aussi chefs d’exploitation, font un travail de repousse et d’engraissement. Cet apport vient compléter les camions quand le besoin s’en fait sentir.

Face à cette tendance de fond de décapitalisation, les négociants en bestiaux souhaitent montrer qu’une telle restructuration, rare dans le secteur, peut fonctionner et peut aussi être transposable au maillon amont.

Préparer la transmission pour faire perdurer le métier

Les associés ont tous à cœur de rendre leur entreprise plus facilement transmissible pour faire perdurer l’activité. C’est notamment le cas de Bruno Ducerf, qui travaille avec son fils de 24 ans. « Il est plus facile de transmettre un patrimoine quand les parts sociales sont prises petit à petit », souligne-t-il. Le fait d’être à plusieurs permet également aux associés comme aux salariés de mieux concilier vie personnelle et professionnelle. « Tous les postes sont plus aisément couverts et un roulement de la main-d’œuvre s’opère, rendant le quotidien plus sécurisant et confortable », constate Bruno Ducerf. Pour lui, c’est un argument de poids pour attirer des jeunes au sein de la structure.

Une flotte de camions bien gérée pour limiter les frais

Lors de la restructuration de la société en 2021 - qui devient Parma charolais avec l’entrée d’Alexandre Berthet - les associés en profitent pour créer leur propre flotte de transport. Ils achètent trois camions remorques et deux porteurs simples. La structure couvre 75 % de l’activité pour le compte de Parma charolais et d’Alliance du charolais, avec un système de redevance à la tête pour les frais de ramassage. Le reste de l’activité est dédié à la prestation extérieure de sorte à amortir les camions. « Afin d’appréhender la baisse de la production conjointement à la hausse des prix des bovins, nous avons souhaité reprendre la main sur ce poste dans l’objectif de réduire nos charges fixes », explique Stéphane Philibert. « Nous gagnons en confort et en visibilité pour suivre les coûts au plus près. Cela nous permet également d’être plus réactifs lorsqu’il nous faut ajuster la main-d’œuvre au nombre de camions selon les volumes prévus », reprend-il. Le responsable du ramassage, Ludovic Laurent, coordonne la tournée pour répartir l’ensemble des chauffeurs par zone géographique. Une organisation bien pensée qui limite le nombre d’intermédiaires, le temps et les frais de déplacement.

Chiffres clés

SAS Parma charolais et Alliance du charolais

120 millions d'euros de chiffre d’affaires 
2 000 éleveurs fournisseurs en portefeuille 
70 000 broutards (la quasi-totalité en race charolaise) par an. 70 % sont exportés vers l’Italie et les volumes restants sont engraissés en France 
18 000 vaches et génisses maigres et grasses ainsi que quelques bœufs livrés direct en abattoir par an

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