L'outil de diagnostics de l'autonomie protéique Devautop livre ses premiers enseignements dans les élevages bovins viande
Du projet Terunic a émergé un outil multi-filières de diagnostics de l’autonomie protéique, Devautop. Il nous livre ses premiers enseignements chez des éleveurs bovins viande avec un fort niveau d’autonomie.
Du projet Terunic a émergé un outil multi-filières de diagnostics de l’autonomie protéique, Devautop. Il nous livre ses premiers enseignements chez des éleveurs bovins viande avec un fort niveau d’autonomie.
L’outil Devautop a été développé dans le cadre de suivis de fermes des régions Bretagne et Pays-de-la-Loire ayant un haut niveau d’autonomie protéique. Les 16 élevages pilotes bovins viande ont permis de tirer des enseignements sur le sujet. « Tout d’abord, ces exploitations présentent un très bon niveau d’autonomie en protéines par rapport aux autres filières. En moyenne, l’autonomie oscille entre 80 et 97 %. Les naisseurs sont autonomes à 91 %, les naisseurs-engraisseurs à 87 %, pénalisés par l’engraissement des jeunes bovins. Chez les engraisseurs, il est difficile de dépasser ce taux. Ceux qui l’améliorent réduisent les achats de complémentaire azoté pour l’engraissement des jeunes bovins, en intégrant de l’herbe ou des protéagineux dans leur ration », remarque Denis Follet de la Chambre d’agriculture de Bretagne.
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L’autonomie baisse avec la part de maïs
Les surfaces mobilisées pour produire 10 tonnes de viande vive (surface nécessaire en fourrages et concentrés – produits et achetés) varient entre 17 hectares pour les naisseurs-engraisseurs et 29 hectares pour les naisseurs. Une part faible des surfaces est liée aux achats de concentrés, aux alentours de deux hectares pour les deux systèmes. La majorité des systèmes allaitants est autonome au niveau des fourrages. « La part des protéines importée n’est pas toujours optimisée dans les élevages qui ont été suivis. Elle devrait être inférieure dans les systèmes herbagers en récoltant des fourrages plus riches en MAT et en utilisant des céréales de l’exploitation », souligne Silvère Gelineau, Chambre d’agriculture des Pays-de-la-Loire
Les élevages avec une part de maïs importante ont des besoins conséquents en correcteur azoté. La substitution par des protéines nationales, type colza, ou des évolutions de régimes finition, type céréales avec herbe de qualité peuvent permettre une forte réduction des protéines importées. A contrario, ce sont les systèmes valorisant bien l’herbe où l’autonomie protéique est la plus haute.
Les élevages suivis et les plus autonomes en protéines ont également de bonnes performances technico-économiques (Marge brute naisseurs de 6 502 €/UGB et une production de viande vive de 307 kg/UGB/ Marge brute naisseur-engraisseur de 675 €/UGB et une production de viande vive de 358 kg/UGB).
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Des leviers qui tournent autour de l’herbe
« Les leviers actionnés tournent principalement autour de la modification et de l’optimisation de l’alimentation et de la composition des prairies temporaires (associations et légumineuses). Viennent ensuite la récolte précoce de l’herbe, la gestion optimisée du pâturage, l’utilisation des dérobés, l’introduction de mélanges céréaliers ou protéagineux », ajoute Silvère Gelineau.
En viande bovine, l’adaptation et l’ajustement de la conduite alimentaire notamment dans le choix de périodes de vêlages appropriées, de rations ajustées aux besoins des animaux, d’un niveau de finition adapté aux bêtes sont essentiels.
« L’herbe représente la première ressource de protéines, il faut donc la valoriser au mieux soit avec le pâturage, soit avec la récolte de fourrages de qualité (en privilégiant les prairies avec associations voire, une part de légumineuses pures). Elle constitue également et avant tout un fourrage de haute valeur alimentaire. Les récoltes précoces permettent de disposer d’un fourrage plus concentré en protéines pour les animaux en bâtiments. Enfin, l’engraissement est un poste gourmand en protéines avec des régimes peu remis en cause. Des pistes de progression possibles sont mises en place dans certains élevages. Elles reposent sur l’introduction de fourrages riches en MAT ou de protéagineux (travaux 4AgeProd) », conclut Silvère Gelineau.
Plusieurs partenaires ont participé aux travaux globaux du projet Terunic et ont été notamment impliqués dans le développement de cet outil (Seenovia, BCEL Ouest et Eillyps, Chambres d’agriculture de Bretagne et des Pays-de-la-Loire, Réseaux Civam, et Institut de l’élevage).
Mesurer son degré d’autonomie avec Devautop
L’outil multi-filières de diagnostic de l’autonomie protéique Devautop a été développé dans le cadre du projet Terunic qui visait à évaluer les leviers et les conséquences d’une augmentation de l’autonomie protéique des élevages via le suivi de pratiques d’éleveurs ayant renforcer cette autonomie et ce, à différentes échelles (exploitation, territoire, filières).
« Simple d’utilisation, il permet un diagnostic rapide entre 30 minutes et 1 heure. Les indicateurs ainsi obtenus (niveau d’autonomie massique et protéique, répartition des besoins et sources de MAT, coût de la dépendance en MAT, nombre d’hectares utilisés pour produire 10 tonnes de viande vive…) permettent de discuter, de se comparer et de se projeter grâce à des simulations de changements de pratiques ou de mises en œuvre d’innovations. Le volet simulation permet de mesurer les marges de manœuvre de l’exploitation et d’obtenir une liste de réflexions ou de solutions adaptées à l’élevage, avec des calculs de conséquences sur les impacts potentiels sur le technique, l’économique, l’autonomie et le travail », souligne Silvère Gelineau.
Le calcul du niveau d’autonomie protéique se base sur la différence entre les besoins théoriques du troupeau en MAT et la quantité de MAT achetée pour les nourrir. Le suivi sur plusieurs années donne le niveau de progression d’une ferme.
Lire aussi : Rechercher l’autonomie alimentaire à l'échelle du territoire
Définition :
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Efficience : représente la capacité à transformer une quantité apportée en production
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Efficacité : représente la capacité à atteindre l’objectif demandé
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Autonomie : représente la capacité à produire par soi-même, c’est-à-dire à produire sans dépendance extérieure et dans ce cas, les achats. Aujourd’hui, si on supprime les achats, quelle est notre capacité à produire de façon autonome ?
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Autonomie protéique à l’échelle territoriale s’entend comme le rapport entre la quantité de protéines produites et celle de protéines consommées par le bétail dont les achats.
Le saviez-vous !
Le ratio moyen de déficit de matières riches en protéines pour la France est autour de 54 %. Le déficit d’autonomie, est en particulier, sur une matière riche en protéines, le soja. On en importe en France 3,5 millions de tonnes. Seulement 5 % des tourteaux de soja utilisés en alimentation animale sont originaires de l’Union européenne et 10 % sont importés non OGM.
Pour aller plus loin
Tous ces enseignements sont à retrouver dans différents livrables qui prennent la forme de plaquettes ou de fiches de synthèse réalisées par filière et reprenant les principaux indicateurs, références et leviers d’action, en fonction des systèmes de production, de fiches témoignages et de vidéos.
Sos Protein
Initié par les régions Pays-de-la-Loire et Bretagne, le programme de recherche et d’expérimentations Sos Protein s’est articulé autour de quatre axes de parties complémentaires, ayant tous la même finalité : renforcer l’autonomie protéique des éleveurs de l’Ouest. Le programme Prograilive porte sur la sécurisation des cultures de pois, lupin et féverole, le projet 4Ageprod cible la production des fourrages riches en protéines, DY+ s’est penché sur l’optimisation de l’utilisation digestive de la fraction azotée et Terunic sur l’évaluation de l’impact territorial des différentes stratégies de l’autonomie protéique. DY+ a été piloté par Valorial, les autres par Vegepolys Valley. Environ 70 partenaires dans tout l’Ouest ont été mobilisés sur une durée de quatre ans, à compter de 2016. Ces projets ont été cofinancés par les deux régions et dans le cadre d’un projet européen Feader.