L’élevage bovin et l’agrivoltaïsme sont-ils compatibles ?
Dans le Lot-et-Garonne, l’énergéticien français Reden a mené une expérimentation pour vérifier la bonne adéquation entre l’élevage bovin et la production d’électricité solaire au sein d’une centrale agrivoltaïque. Le suivi d’un troupeau aubrac durant quatre mois a abouti à la validation d’un modèle de tracker compatible avec l’activité des animaux.
Dans le Lot-et-Garonne, l’énergéticien français Reden a mené une expérimentation pour vérifier la bonne adéquation entre l’élevage bovin et la production d’électricité solaire au sein d’une centrale agrivoltaïque. Le suivi d’un troupeau aubrac durant quatre mois a abouti à la validation d’un modèle de tracker compatible avec l’activité des animaux.
Après une première expérimentation menée en 2020 avec quelques vaches gestantes de race garonnaise sur une centrale photovoltaïque fixe à Condom dans le Gers, le producteur français d’énergie Reden a souhaité réitérer l’expérience avec cette fois-ci des effectifs bovins plus étoffés, observés sur une plus longue période et sous des panneaux mobiles de type trackers. À partir de novembre 2022, ce sont donc dix vaches suitées, ainsi qu’un taureau aubracs prêté par un éleveur, qui ont pris leurs quartiers sur l’une des centrales à Moncrabeau (1), dans le Lot-et-Garonne.
En partenariat avec la chambre d’agriculture départementale, l’activité du troupeau a été suivie tous les jours et ce, durant quatre mois, dans le but de vérifier la comptabilité entre l’activité bovine (ici avec des bêtes d’un certain gabarit et cornues) et la présence de modules agrivoltaïques. « Trois cent cinq trackers bifaciaux étaient implantés dans ce parc clôturé de 15,5 hectares, représentant un taux d’occupation d’environ 30 % », décrit Olivier Bousquet, directeur exécutif du développement France chez Reden. Le chargement avoisinait 1 UGB par hectare.
Aucun comportement anormal
« Après une période d’adaptation de quinze jours, le troupeau a évolué sur toute la parcelle, y compris sous les panneaux en mouvement constant. Aucune blessure physique ni comportement anormal n’a été relevé, et l’éleveur a pu confirmer quelques mois plus tard le bon déroulé du cycle de reproduction. En effet, toutes les vaches ont été constatées pleines après cette expérimentation », souligne Agnès Chabrillanges, directrice de la chambre d’agriculture du Lot-et-Garonne.
Les observations sur l’adaptation des bovins à leur environnement (occupation de l’espace, zones de couchage, suivi de l’alimentation…) ont été répertoriées par le conseiller d’élevage en charge de l’étude et l’éleveur propriétaire lui-même. Les visites quotidiennes ont été complétées par de la vidéosurveillance. « Les modules photovoltaïques ont pu servir d’abri lors d’intempéries (pluies et vents) », complète la spécialiste. Le potentiel agronomique de la parcelle et la production fourragère associée, bien que faible à cette période de l’année, ont été conservés.
Maintien du chargement à l’hectare
Dans le Lot-et-Garonne, « deux tiers des exploitations agricoles – majoritairement des élevages bovins et ovins – prévoient une coactivité avec l’agrivoltaïsme. Il nous paraissait donc primordial de démontrer que l’implantation de panneaux – lorsque les modalités d’environnement sont respectées – n’engendre pas une perte en chargement », explique Agnès Chabrillanges, directrice de la chambre d’agriculture départementale. « Pour considérer que la production agricole demeure l’activité principale, la mise en place d’installations agrivoltaïques ne doit pas influencer le chargement à l’hectare. Le taux doit rester identique à celui sur une parcelle nue », insiste Olivier Bousquet, de Reden. En bovins, « le maintien d’une conduite extensive implique le déploiement de projets sur des surfaces plus importantes, d’au moins 40 hectares », concède-t-il.
Des réflexions sont aussi à mener sur l’aménagement des abreuvoirs, des râteliers et des zones de confort dans la parcelle pour ne pas altérer le bien-être animal.
Sur les aspects techniques, l’énergéticien Reden a pu valider son choix de modèle de tracker. Les structures mobiles utilisées mesuraient 40 m de long sur 4,5 m de large. Au fil des heures, la hauteur au sol variait de 50 cm à 2,30 m. Les panneaux étaient espacés de 8,50 m pour faciliter le passage en interrangs des engins agricoles et des animaux. Reposant sur deux pieds, ils avaient une certaine flexibilité par rapport à la pente du terrain, allant jusqu’à 10 % sur le site de Moncrabeau. Durant l’expérimentation, « le seul réglage apporté a été de protéger les onduleurs et de rehausser le boîtier, afin qu’il soit hors de portée des animaux », ajoute Olivier Bousquet.
Un moyen de remédier aux difficultés d’accès au foncier
Les dix femelles suitées ainsi que le taureau appartiennent à Xavier Cazenave, à la tête d’un cheptel de quatre-vingts mères aubracs à Bardos, dans les Pyrénées-Atlantiques. L’éleveur, très investi dans le suivi de ses animaux au cours du test, a été conforté dans son futur projet agrivoltaïque avec Reden. « Xavier Cazenave s’est tourné vers cette solution pour sécuriser son foncier de façon pérenne, car il avait signé de nombreux contrats avec les collectivités, et que ces dernières semblaient moins enclines à lui renouveler », explique Olivier Bousquet.
Les permis ont été obtenus pour l’implantation de panneaux agrivoltaïques sur près de 400 hectares (dont plus de la moitié dédiée à l’élevage bovin) pour une puissance énergétique totale de 350 MWc. « C’est aussi une opportunité pour limiter les déplacements en estive. Mes parcelles propres vont être réensemencées pour faire pâturer et faucher. Mon troupeau pourra ainsi paître autour du siège de l’exploitation, à l’abri du soleil l’été, dans un système toujours aussi extensif et en autosuffisance », témoigne l’éleveur.
En vidéo
Retrouvez notre vidéo « Quel est le bilan de la loi sur l’agrivoltaïsme ? » sur notre chaîne Youtube Réussir