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Bien utiliser la génomique sur génisses

Les tests génomiques en troupeaux allaitants représentent une opportunité pour gérer le renouvellement et les accouplements. Mais à quel coût ?

Pour réaliser un test génomique, il existe trois possibilités de le faire, par prélèvement de poils, de cartilage ou de sang. Après réception par le laboratoire, il faut compter entre 1 et 2 mois pour obtenir une évaluation.
© S. Leitenberger

Afin d’identifier les intérêts techniques et économiques de l’utilisation des tests génomiques dans les élevages allaitants sur la voie femelle, un programme multi-partenarial(1) a été initié en 2015 pour une durée de trois ans. Ce travail s’est déroulé en plusieurs phases.

« Dans un premier temps, une enquête terrain a permis d’appréhender la perception de la sélection génomique et d’évaluer son potentiel d’utilisation chez les éleveurs. Les interviews de 141 exploitants ont révélé que cette nouvelle technologie trouvait un écho plus favorable auprès des éleveurs utilisant l’insémination, des adhérents à Bovins croissance ou des acteurs de leurs races. La majorité des personnes interrogées se sont montrées intéressées par les bénéfices que peut apporter la génomique mais restent demandeuses d’informations à la fois sur les principes de la sélection génomique, sa fiabilité et sa rentabilité », a rapporté Olivier Leudet, de l’Institut de l’élevage, lors de la journée technique viande bovine des Pays de la Loire.

Au terme de cette enquête utilisateurs, huit élevages volontaires en races Blonde d’Aquitaine, Charolaise et Limousine ont été sélectionnés afin d’effectuer, dans un second temps, une expérimentation en élevages. Cette dernière a consisté à génotyper 157 génisses nées à l’automne 2015, avant sevrage. L’échantillon n’étant pas suffisamment important, seule une analyse globale a été réalisée. Il n’a pas été possible de la faire par race ou par type d’engagement de l’éleveur.

Une génisse sur deux reclassée

« Au cours de l’expérimentation, on a demandé aux éleveurs de classer les génisses génotypées pour le renouvellement et ce, uniquement à l’œil. Le même travail a été réalisé par les techniciens. Globalement, les éleveurs classent 79 % des animaux dans les catégories de bonnes à très bonnes, 61 % dans les moyennes et le reste dans les catégories mauvaises à très mauvaises. Côté technicien, on retrouve environ la même proportion de génisses bonnes à très bonnes. Par contre, il y a davantage d’animaux classés dans les extrêmes (très bonnes ou très mauvaises). Ainsi, un regard extérieur permet de mieux différencier les génisses. Le tri des éleveurs s’effectue principalement à partir du poids au sevrage des animaux. Le caractère étant un facteur éliminatoire. Les techniciens trient sur le poids et le développement squelettique. Le développement musculaire élimine les plus mauvaises », explique Olivier Leudet.

Un second tri a été réalisé par les techniciens, à qui l’on a fourni en plus l’indexation classique Iboval, puis un troisième à l’aide des données génomiques. Comparé au tri visuel, le tri sur index classique a permis de reclasser une génisse sur deux. De la même manière, l’utilisation des index génomiques reclasse une génisse sur deux par rapport aux index classiques. « L’éclatement des index est plus important avec la génomique, particulièrement sur l’aptitude au vêlage, la croissance et le développement squelettique. Les génisses étant plus différenciées sur leurs valeurs génétiques, le tri devient plus facile. Ainsi, la génomique sécurise le renouvellement, notamment sur les qualités maternelles », poursuit Olivier Leudet.

Trier les génisses jugées bonnes ou moyennes

Afin d’élaborer des recommandations d’utilisation des tests génomiques pour le tri des génisses de renouvellement, « on a réalisé des simulations économiques pour un système naisseur de 100 vêlages, avec un taux de renouvellement de 26 % et de 31 %. Ceci a nécessité de simuler le progrès génétique à dix ans. On a regardé le gain potentiel sur la mortalité (meilleur IFNaiss) avec un bonus sur l’IVV (moins de vêlages difficiles, donc un IVV qui a tendance à diminuer) et sur la complémentation des broutards (amélioration du potentiel laitier des mères, donc diminution du nombre de jours de complémentation des broutards) sans toucher au poids et à l’ingestion », explique Vincent Poupin, de Bovins croissance Sèvres Vendée conseils. Avec un taux de renouvellement de 26 % et 100 vêlages, l’éleveur devra choisir 28 génisses pour le renouvellement, sur 46 femelles nées. « Or, quand on demande à l’éleveur de trier à l’œil, les génisses qualifiées de meilleures sur le plan morphologique sont toujours conservées pour le renouvellement. Celles qualifiées de mauvaises sont, quant à elles, automatiquement éliminées et ce, dans les deux cas, sans tenir compte des objectifs de l’éleveur ni du niveau génétique des animaux en indexation classique ou génomique. Il n’est donc pas nécessaire de réaliser des tests sur ces animaux là, mais sur ceux qualifiés de moyens ou bons car les tests génomiques permettent de reclasser une génisse sur deux triées à l’œil. Pour notre simulation, cela représente 37 animaux à tester. Ainsi, dans notre exemple, l’usage des tests permet une accélération du progrès génétique de 7 % par rapport à un tri habituel. Au bout de douze ans, 34 % du troupeau est constitué de génisses améliorées sélectionnées avec la génomique. »

La génomique ouvre des perspectives

Avec un taux de renouvellement de 31 %, le progrès génétique est inférieur à 2 %. Plus le taux de renouvellement augmente, plus la pression de sélection baisse et moins les tests génomiques pour trier les génisses sont utiles. « Par contre, ils restent pertinents pour optimiser les accouplements (en cumulatif ou en correctif). De plus, ils permettent de détecter des gènes particuliers : gènes d’intérêts (sans corne, culard…) et les anomalies génétiques (ataxie, axonopathie, épilepsie, palais fendu, tourneur…). La génomique reste une technique nouvelle. Elle ouvre de nombreuses possibilités : plus de caractères, des estimations plus précises et plus précoces. Elle est encore en plein développement, avec des perspectives pour de nouveaux caractères. Les modèles d’évaluation se spécialisent, permettant des gains de précision. La connaissance des valeurs génétiques de manière anticipée dans la vie de l’animal, notamment sur les qualités maternelles, va changer les moyens de sélection des éleveurs. C’est la massification qui va faire avancer la génomique », conclut Vincent Poupin.

(1) Partenaires du projet : Bovins croissance, Apis Diffusion, Evolution, Blonde d’Aquitaine, Charolais France, France Limousin sélection, Parthenaise, Rouge des prés, Institut de l’élevage, avec le soutien financier de la région Pays de la Loire.
Dico

La génomique

est la science qui étudie le génome, c’est-à-dire l’ADN dans les chromosomes. La sélection génomique est une méthode qui consiste à choisir les reproducteurs à partir des résultats d’une évaluation valorisant les informations connues sur le génome des animaux, en plus des informations classiques de phénotypes et de généalogies. Ainsi, l’index génomique (GEBV) est la combinaison de l’Index Iboval (EBV) et de la valeur génomique directe de l’animal (DGV).

Génotyper les taureaux de monte naturelle, un réflexe essentiel

« Il existe un vrai 'plus' à faire génotyper les taureaux. En élevage allaitant, une vache produit en moyenne 3 à 4 veaux dans sa carrière alors qu’un taureau donne en moyenne 50 descendants sur un élevage. L’investissement dans le test génomique est limité. Il représente 2 à 3 euros par descendant né. Génotyper les taureaux de monte naturelle est donc indispensable », insiste Vincent Poupin, de Bovins Croissance Sèvres Vendée conseils.

Un même prélèvement permet de disposer rapidement d’une évaluation génétique complète, et donc d’avoir des données sur les qualités maternelles (aptitude au vêlage et potentiel laitier) du mâle reproducteur. Disposer d’informations génétiques complètes avant la mise à la saillie du taureau permet de raisonner son utilisation dans le troupeau. La génomique indique si le taureau est porteur de gènes d’intérêts ou d’anomalies qu’il pourrait transmettre à sa descendance. Elle permet d’obtenir l’identification ADN obligatoire lorsqu’un élevage adhère à la certification de parenté bovine et éventuellement la vérification de compatibilité génétique.

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