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Algérie : un marché complexe mais prometteur

Le scénario de l’eldorado turc qui a viré au feu de paille peut-il se reproduire en Algérie ? Rien de semblable estiment les connaisseurs de ce marché qui devrait rester modeste mais s’avérer durable et de nature à dynamiser l’exportation des broutards français.

© Infographie Réussir

es hydrocarbures ? C’est notre malheur », s’exclamait Amine Bensemmane, directeur du salon agricole (Sipsa), lors de la dernière édition qui se tenait en mai dernier à Alger. Une manne pétrolière et gazière, qui donne pourtant à l’Algérie une assise financière extrêmement confortable. Mais, ces pétrodollars qui coulent à flots et représentent près de 40 % du PIB, ont créé une économie de rente. « L’économie algérienne est une économie à faibles performances dont les finances dépendent essentiellement des recettes d’hydrocarbures », analysait Mohamed Chabane, doctorant à l’université de Rennes, dans les Cahiers de la Méditerranée en 2010. Beaucoup d’Algériens déplorent de voir leur pays se reposer sur sa providence pétrolière et ne pas parvenir à prendre le virage d’une économie plus productive alors qu’elle ne manque pas de potentiel dans bien des domaines, y compris l’agriculture.
Outre les produits manufacturés, l’Algérie achète pléthore de biens alimentaires hors de ses frontières. Elle importe la quasi-totalité de ses besoins en sucre et huiles végétales, près de 60 % de sa consommation en céréales et en lait, 35 % de la viande bovine… Des importations qui dépassent les dix milliards d’euros par an, pour satisfaire les besoins d’une population de 38 millions d’habitants, qui croit de 2 % par an. Pour prévenir les risques sociaux et politiques, l’État algérien subventionne également les produits de première nécessité (pain, lait, huile, sucre…) à des prix très bas. La viande, produit cher dont la consommation ne cesse pourtant d’augmenter, ne fait pas partie de cette catégorie. L’Algérie est autosuffisante en viande ovine et en volaille.



Un encadrement technique déficient


Depuis le début des années 2000, les autorités algériennes ont placé les secteurs agricoles et agroalimentaires au rang des priorités nationales pour réduire la dépendance alimentaire du pays, voire exporter dans certains secteurs. Profitant du prix élevé des hydrocarbures, l’Algérie consacre des moyens colossaux au développement de la production agricole et les déploie tous azimuts. La « politique de renouveau agricole et rural » a ainsi prévu de mettre sur la table six milliards d’euros, sur la période 2010-2014. Mais, la filière viande bovine, considérée comme moins prioritaire que le lait ou les céréales car elle ne représente qu’une faible part des importations, est assez peu concernée par ces soutiens financiers.
Les résultats de ces politiques sont difficiles à évaluer faute de statistiques fiables. La production agricole a augmenté dans plusieurs filières, mais ces progrès ont été absorbés par l’accroissement des besoins de la population. Les importations de biens alimentaires sont en constante augmentation. Les résultats ne semblent pour l’instant pas à la hauteur des moyens investis. L’agriculture reste très administrée par l’État qui orchestre des programmes de développement ambitieux procédant sans doute d’une réelle volonté politique, mais d’une efficacité toute relative. « L’agriculture se développe beaucoup dans tous les domaines », assure cependant Oualid Smida, importateur de bovins d’engraissement.

Construire une filière franco-algérienne d’engraissement


Tous les observateurs de la filière viande bovine algérienne s’attendent, à moins d’un évènement sanitaire ou politique imprévu, à une poursuite des importations de bovins mâles à engraisser dans les années à venir. L’autosuffisance n’est pas pour demain. Une filière d’importation s’est structurée. Et, dans tous les domaines, l’importation, en Algérie, est devenue un véritable business, sans doute assez lucratif, que beaucoup, y compris au sommet de l’État, n’ont intérêt à voir se substituer par une véritable production nationale. L’épizootie de fièvre aphteuse, qui s’est déclarée fin juillet en Algérie et semblait fin août en voie d’être maîtrisée, ne devrait pas perturber durablement ce marché, même s’il est momentanément fermé.
Néanmoins, ce marché ne devrait pas non plus exploser. L’engraissement ne semble pas avoir la capacité de se développer très rapidement pour de nombreuses raisons : manque de ressources fourragères, accès difficile aux financements, filière peu organisée dont la valeur ajoutée est captée par de nombreux intermédiaires, manque de savoir-faire en matière d’engraissement… La France ne pourra d’ailleurs pas se contenter d’expédier des animaux vers l’Algérie. Pour pérenniser ce marché, voire le développer, et se prémunir contre la concurrence d’autres pays fournisseurs d’animaux, elle serait bien inspirée d’y associer un « transfert de technologie » en construisant une véritable filière bovine franco-algérienne d’engraissement. Les relations étroites entre les deux pays et la langue commune l’y prédisposent. « Inch Allah », comme disent les Algériens avec leur légendaire sens de l’hospitalité, quand on évoque le futur.

Chiffres clés

• Superficie du territoire - 2,4 millions de kilomètres carrés dont 84 % en zone saharienne et 16 % dans la zone côtière, longue de mille kilomètres où sont concentrées les cultures.
• Superficie agricole - 42 millions d’hectares dont 8,5 millions d’hectares cultivés (un tiers de cette surface appartient au domaine privé de l’État).
• Population - 38 millions d’habitants. Les ménages algériens consacrent 45 % de leur budget à l’alimentation.
• L’agriculture, première activité après les hydrocarbures, assure 10 % du PIB

Pour en savoir plus

 

voir dossier Réussir Bovins Viande de septembre 2014. RBV n°218 p. 50 à 75.

Au sommaire :

p. 54 - Un marché en vif complexe et exigeant
Exportations de broutards en Algérie

p. 60 -  L’engraissement doit se professionnaliser
Production de viande bovine

p. 64 - Un atelier de 500 places
Chez Salim Djouablia, engraisseur

p. 66 - Médecin, importateur et agriculteur
Chez Sobhi Habès, engraisseur

p. 68 - « Les exportations vers l’Algérie devraient se stabiliser »
Interview de Jean-Marc Chaumet

p. 70 - L’Algérie a besoin de viande transportable
Consommation de viande bovine

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