En Gironde, export et désirabilité du vin, un combo gagnant
Depuis son arrivée sur le domaine en 2005, Vincent Lacoste a remplacé les volumes vendus en vrac par de l’export. Il a également basculé une partie de sa production en vin de France, plus désirable que le bordeaux aux yeux des consommateurs.
Depuis son arrivée sur le domaine en 2005, Vincent Lacoste a remplacé les volumes vendus en vrac par de l’export. Il a également basculé une partie de sa production en vin de France, plus désirable que le bordeaux aux yeux des consommateurs.
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En vingt ans, le prix moyen de sa bouteille est passé de 1,40 euro à 4 euros ! Mais Vincent Lacoste, du Château de Cranne à Donzac, en Gironde, prévient sans détour : il n’a pas de recette miracle, c’est une stratégie au long terme qui lui a permis d’en être là aujourd’hui.
Tout a démarré en 2005, lors de son installation sur l’exploitation familiale. « Je voulais passer en bio », plante-t-il. Mais à l’époque, le marché du bio n’était pas structuré, la demande inexistante. « Par ailleurs, il y avait une crise du vrac à Bordeaux », ajoute-t-il. Le tonneau de 900 litres était en dessous des 1 000 euros, un cours insuffisant pour un domaine en bio. Fort de ces constats, Vincent Lacoste a décidé de se lancer à l’export. Et ce, via les salons tels que Vinexpo, Prowein, Millésime Bio. « Mais je me suis vite rendu compte que je n’étais pas attendu, se remémore-t-il. J’ai fait face à une grande solitude, je n’avais pas les contacts, pas les codes. » Le vigneron s’est alors questionné, a interrogé les acheteurs, les vignerons. « Je me suis aperçu que tout le monde proposait la même chose à Bordeaux : les mêmes vins, aux mêmes prix et avec les mêmes packagings, et que les acheteurs n’avaient pas besoin du mien, en ayant déjà à leur catalogue », indique-t-il.
Le groupement de vignerons, un véritable tremplin
Il a alors cherché à se démarquer en décrochant des notes dans les revues comme le Wine Spectator ou des médailles. Nouvelle déception. « Toutes les médailles se valent, résume-t-il. Et une très bonne note n’est pas la clé des marchés. Cela permet d’ouvrir les portes, mais le prix est similaire à celui des autres circuits. »

C’est alors qu’il a rejoint un groupement de vignerons, Patrimoine des terroirs. Et là, le premier déclic s’est produit. « Appartenir à ce groupement m’a permis de diminuer les frais des salons en mutualisant, témoigne-t-il. Et surtout, d’obtenir de la visibilité, les autres membres ayant déjà des clients. Cela m’a ouvert des marchés et mis le pied à l’étrier. » Petit à petit, les acheteurs ont fait boule de neige. « Cela m’a pris du temps, observe Vincent Lacoste. Je n’ai jamais eu de gros clients mais plein de petits. Mais c’est aussi ce qui rend l’entreprise plus résiliente en période de crise. »
Des produits atypiques pour éveiller la curiosité
Parallèlement à cela, le viticulteur a travaillé sur la désirabilité de ses vins. « Les clients que je rencontre veulent des produits pour éveiller la curiosité des consommateurs, rapporte-t-il. Ils recherchent des vins étonnants, qui suscitent l’envie de la découverte. » Pour répondre à cette demande, il a commencé par planter des cépages atypiques tels que du marselan, du malbec, mais aussi des variétés résistantes comme de l’artaban, du vidoc. Puis a basculé une partie de sa production en vin de France, afin de sortir du carcan du bordeaux et de l’AOC. Cette année, sur ses 800 hectolitres de récolte, il en a revendiqué 500 en vin de France. Il a également approfondi sa gamme, avec à présent 25 références, et développé des produits originaux, à l’instar de sa cuvée Sterenn avec finition poivre de Sichuan, feuilles de cerisiers, feuilles de figuiers ou romarin. Ses prix consommateurs s’échelonnent à présent de 8 à 25 euros la bouteille, pour un chiffre d’affaires d’environ 650 000 euros par an.
Vincent Lacoste dispose également d’une structure résiliente. Il n’a qu’un seul salarié en apprentissage. Le reste des travaux est effectué par un prestataire. Il juge cette formule « beaucoup moins chère et bien plus efficace ». Par ailleurs, il autofinance ses achats et présente donc un taux d’endettement « ridicule ». Autant de facteurs qui font que son domaine serait rentable même sur 12 hectares, quand ses parents avaient besoin de 45 hectares pour vivre. De là à diminuer la surface de son domaine, il n’y a qu’un pas, que Vincent Lacoste envisage de franchir dans les années à venir. « Petit à petit, je souhaite me rapprocher des 20 hectares, conclut-il. Je vivrai pareil, mais je travaillerai moins. »
Château de Cranne
Surface : 32 ha en production
Nombre de cols : 100 000/an
Circuits de commercialisation : 50 à 70 % export, cavistes, un grossiste, Naturalia et des plateformes numériques
CA 2024 : environ 650 000 euros